Chapitre 7 - Explications

77 19 11
                                    

• • •

     Nous voilà maintenant assis tous les trois, les uns à côtés des autres, sur la banquette arrière de la petite voiture grise de notre professeur. Qui l'eut cru ? J'étais là, entre mes deux amis qui se tenaient aussi droits que possible. Ils retenaient leur respiration, pour tenter de ne pas rompre le lourd silence qui s'était abattu dans le véhicule roulant. La neige tombait drue désormais, à en recouvrir les carreaux d'un épais coton immaculé. Tout le trajet se fit ainsi, dans le plus total des silences. Comme si nous nous étions retrouvés dans un cimetière, et que le deuil nous assayait tous.
Parfois, Monsieur Levasseur se retournait pour nous lancer un sourire et un regard qui se voulaient rassurants. Je crus que nous n'allions jamais nous arrêter. Enfin, nous commençâmes à ralentir. Tiens, je croyais bien reconnaître cet endroit...
   Mais oui !
   Comment ais-je pu être aussi idiote ?
   C'est ma maison !

   –   Que faisons-nous ici ? me devança Auguste, le visage blème. Nous avons fait un détour pour rien.
   –   Ne vous inquiétez pas, vous aurez des réponses tôt ou tard, fit-il simplement en haussant les épaules.

   Auguste me lança un regard perplexe, brillant d'incompréhension. Je lui rendis son expression, ne sachant que trahir d'autre.
   Monsieur Levasseur nous invita à sortir de sa petite voiture qui manquait gravement d'espace pour trois à l'arrière. Sans broncher, nous nous extraiions du véhicule gris nuage.
   Notre professeur s'installa alors sur un banc, non loin de l'entrée de ma demeure, alors vide. Il nous fit signe de venir autour de lui et nous nous executâmes avec hésitation. Qu'allait-il nous avouer ? Etait-ce vrai tout cela ?

   –   C'est toi qui habite ici, Fanny ? lança-t-il en posant son regard noisette sur ma silhouette.

   C'est la première fois qu'il me tutoyait et m'appellait par mon prénom. Je croyais qu'il l'avait oublié, d'ailleurs...

   –   Pourquoi cette question ? demandai-je avec méfiance, en croisant les bras.

   –   Cessez de vous inquiéter, je ne vous veux aucun mal. Je veux juste essayer de comprendre la situation, et la gravité de la chose.

   La gravité ? Mais de quoi parlait-il à la fin !?

   –    Finissons en ! s'écria Flavie avec humeur, perdant visiblement sa patience, de sa voix débordante d'ironie. Que se passe-t-il, monsieur ? Pourquoi tant de mystères ? Qu'y a-t-il de si grave ? Pourquoi savez vous ce que veux dire cette phrase si "épique" ? Que...

   –   Oh là ! Doucement Flavie voyons ! Ne nous emportons pas.

   –   Alors expliquez vous ! Je commence à geler sur place.

   Il remua. Puis, il prit une grande goulée d'air avant de la relâcher en un souffle blanc, qui s'évapora dans les secondes suivantes.

   –   Connaissez vous le passé de ce bâtiment ? commença-t-il en se tournant vers nous.

   –   Nous l'avons appris ces derniers jours, en effet, répondit Auguste, avec la même méfiance.

   –   Par quels moyens ?

   –   Un album photo que j'ai mystérieusement retrouvé dans ma bibliothèque ainsi que...

   Je préférai m'arrêter là pour l'instant. Je ne savais pas encore s'il était vraiment digne de confiance. Je vis du coin de l'œil Flavie me hocher la tête. Elle avait compris.

   –   Qu'un carnet que vous ne parvenez pas à ouvrir ? continua -t-il d'un sourire satisfait.

   Pardon ?! Comment sait-il... Mais ça ne sert à rien d'avoir la réponse à cette question, puisque que je la connaissais déjà.
   Un silence s'en suivit. Je croyais qu'il avait compris, vu l'expression convaincue qu'il affichait.

Domini temporis [ sous contrat d'édition ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant