Cela faisait quinze minutes que mes yeux s'ouvraient et se refermaient, à intervalles réguliers, lorsque je décidais qu'il était temps de me lever. Rester au lit toute la journée me dérangeait plus qu'autre chose, et je ne pouvais me permettre de devoir patienter pour rien ainsi.
On m'avait enfiler une tunique blanche, comme celles des hôpitaux, et bizarrement, je me fichais bien de savoir qui m'avait vu en sous-vêtements, tant que je ne portais plus la combinaison de la Mort.
Mes pieds, à peine recouverts de fines chaussettes blanches, rentrèrent en contact avec le sol. Un froid grisant m'assailli, me lever était vraiment la chose dont j'avais besoin. Le parquet, d'un blanc cassé, s'avérait être écorché à plusieurs endroits.
Ainsi, je tentais d'esquiver les brisures, de peurs d'abîmer mes pieds. Avoir une blessure ici était réellement synonyme de danger. Ne plus pouvoir courir ou se servir de ses mains m'étaient impensables. Et j'avais ce pressentiment que rien n'était calme à Sterbern, que rester sur le qui-vive était obligatoire, dans n'importe quelle situation.
Les murs délabrés offraient, quelques fois, une vue imprenable sur le ciel, grisé par le dôme. La maison, immaculée à sa construction, affichaient à présent un blanc salissant avec le temps.
Un long couloir zigzaguait, assez lumineux gràce à la lumière du jour. Savoir que j'avais dormi ici ne m'enchantait guère, n'importe qui pouvait rentrer ! Quelques rares portes entravaient mon chemin, toute aussi blanche que le reste de la maison. Bien évidemment, je passais mon chemin, de peur de ce qui pouvait se trouver à l'intérieur. Les murs était sobres, aucuns cadres photo ou vestiges du passé ne s'y trouvaient.
Enfin, au bout de cet interminable corridor plutôt effrayant, une porte ouverte baignée dans une douce lumière s'ouvrait face à moi.
Je fus éblouie quelques secondes lorsque je la traversai puis repris le contrôle de mes yeux.
J'étais dehors. Et j'étais aussi dedans. La végétation, plus que luxuriante, avait prit possession de l'ancienne pièce. On trouvait des plantes grimpantes, de grosses feuilles tombant jusqu'au sol, des petites par milliers. Le plafond était encore à ciel ouvert, mais cette fois, un arbre gigantesque couvrait la majeure partie de ce vide, ces millions de branches abritaient quelques nids d'oiseaux et son tronc était beaucoup plus épais que mon pauvre corps.
Un livre avait été oublié au pied de cet arbre, ouvert sur une page précise. L'écriture d'ancien ordinateur citait :
« 9 août - Rien, mais j'ai peur.
10 août - Rien ; qu'arrivera-t-il demain ?
11 août - Toujours rien ; je ne puis plus rester chez moi avec cette crainte et cette pensée entrées dans mon âme ; je vais partir.
12 août, 10 heures du soir - Tout le jour j'ai voulu m'en aller ; je n'ai pas pu. J'ai voulu accomplir cet acte de liberté si facile, si simple -sortir- monter dans ma voiture pour gagner Rouen- je n'ai pas pu. Pourquoi ?* »Troublée, je relisais le passage encore et encore, traumatisée par l'écho qu'il provoquait en moi. Le sentiment lassant de cette routine éphémère, en référence à ce que je vis. Malheureusement, je n'osais pas encore passé à la phase "12 août", sortir de la bulle, la cage que je m'étais construite en arrivant ici, m'exposer au danger, tenter de comprendre. Je ne pouvais pas faire ça maintenant, c'était... insurmontable, que tourverais-je dans cette quête du passé ?
Soudainement, cette lecture venait de m'ouvrir d'autres voies, d'autres pistes. Comme si tout ce temps, j'avais été endormie ou en transe, et je me réveillais brusquement, prête à autre chose que de me laisser porter par le rythme de la musique.
Il n'était plus question que les sales notes de cet orchestre macabre ne m'emporte, j'allais trouver ma propre symphonie et la jouerai et l'imposerai aux oreilles de tous, quitte à la faire rentrer dans la tête de chacun, un par un.
Je partis sans un regard en arrière pour ce livre qui venait de marquer un tournant dans mon histoire, décidée à continuer mon exploration.
J'ouvrais la porte blanche au fond du jardin intérieur et tomba nez à nez avec un salon lumineux, une large véranda donnant sur un immense jardin, cette fois pas le moins du monde improvisé.
Des vivres s'entassait dans un coin, à ma gauche, et je ne pus m'empêcher de saliver.
À ma droite, d'anciens meubles étranges avaient été déplacés de sortes à former une autre pièce que je ne pouvais distinguer, plutôt large, de hautes commodes s'élevait telle des remparts et je ne pouvais distinguer ce qu'il se trouvait à l'intérieur.
Poussée par une certaines curiosité malsaine, je m'approchait lentement de la minuscule ouverture afin de voir quand une main se posa sur mon épaule.
Sursautant, je fis volte-face, prête à en découdre. Mon adrénaline retomba immédiatement lorsque je découvrais le visage serein de Claimen. Mon soulagement ne dura qu'un temps, sa question vint à nouveau perturber mon cerveau.
- Tu m'as l'air en pleine forme... Peut-on parler ?
Il m'inspectait sous toutes les coutures, cherchant un élément défaillant dans mon système. Aussitôt, une voix sortie de nulle part intervint dans ma tête "Il ne faut pas qu'ils te trouvent, jamais ils ne doivent te trouver, tu m'entends ?".
Interloquée, je le regardais sans le voir mais le suivit jusque dans un canapé d'un vieux rose à vomir. Assise, il me parut plus qu'inconfortable, comme en relation avec la discussion que j'allais avoir. Déjà, Claimen me posait des questions, me parlait d'un tas de choses que je n'entendais plus.
La voix dans ma tête tourbillonnait en moi, comme un avertissement ou un murmure du vent. Un mécanisme avait été enclenché en moi, impossible de l'arrêter. Cette voix me hantait, plus je m'interrogeais sur elle, moins je ne comprenais.
Elle appartenait au passé, à mon passé. La seule certitude que j'avais résidais en mon être, inébranlable. Et je commençais tout juste à le comprendre, à l'accepter quand Claimen me secoua.
- Tu veux bien m'expliquer ?
Le mécanisme s'était réellement enclenché, la descente aux Enfers commençait.

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Sterbern
Mistério / SuspenseLa folie ou la raison, telle est la question. Le Système, nouveau gouvernement extrémiste, a fait son choix. Pour lui, seule la raison à sa place dans ce bas-monde. Ainsi, tout assassins sanglants, malades mentaux, handicapés, voleurs habiles et poè...