Pécheur

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Les jours s'étiraient sur mon agonie, avec une lenteur démesurée. J'étais en proie à ces instants à la culpabilité aussi je le confesse à l'ennui. Les premiers jours sans lui, mon genou me fit souffrir, esclave d'une paresse inaccoutumée. Je m'étais souvenu des plaintes formulées concernant le manque de temps au sujet de l'écriture, ironiquement je possédais tout le temps possible même pour une introspection littéraire sans avoir le cœur à l'ouvrage. 

Les jours suivants je l'entraperçus fugacement assez pour que mon cœur rate un battement peu pour que je tente la moindre parole ou me sente plus embarrassé. J'ignorais l'avancement de son enquête ou son intérêt.

Douloureux d'y songer or la vérité nue l'a toujours été, je ne lui étais pas d'une grande utilité pire je ne lui étais nécessaire. Désormais j'étais une nuisance à ses yeux, il ne jugeait bon de m'accorder la moindre importance, autrement ne m'aurait-il pas adressé quelques mots ?

Sans lui je ne suis rien.

Rien qu'un ancien médecin militaire tourmenté d'une guerre non évocatrice, un médiocre praticien incapable de se fondre dans la vie civile aux ambitions nulles.

Concernant ma pratique je me rendais plus que coutume à mon cabinet. Moi d'ordinaire la rechignant, la délaissant dès l'arrivée du mystère.

Mais même exercer ma profession m'était refusé car en dépit d'un climat automnal ce fut la morte saison.


Bien évidemment j'eus souvent auparavant des patients curieux de mon association avec Holmes -lorsque ceux-ci effectuent le rapprochement Dieu merci j'ai un nom commun- ou plutôt curieux concernant le personnage lui-même.

Ainsi je me retrouvais dans des discussions incongrues contre mon gré ou à entendre des aveux pour le moins étonnants. De cette façon une jeune fille me déclara apprécier tout particulièrement des récits gothiques inconvenants pour son sexe au détour de la conversation. La jeune personne me confia son engouement pour mon style -source de nombreux conflits- car m'affirma t'elle :« Votre façon de le détailler de le décrire possède une vivacité hors norme, c'en est si romantique » Ses flatteries me firent éluder ma fonction j'étais biographe non un romancier fantasque nostalgique des siècles d'antan. Mon ami lui dont je sais l'affection immodérée pour Goethe –au point de le citer constamment- aurait été tout bonnement enchanté d'être une figure romantique.. Intérieurement cela va sans dire, extérieurement il aurait pesté être un scientifique non un héros romanesque destiné à charmer le public féminin en m'accusant d'avoir dénaturé sa précieuse science.


Ce ne fut pas la seule me faisant forte impression. J'eus un patient, se disant confrère mais dont je soupçonnais l'affabulation sur la question, ses connaissances anatomiques laissaient à désirer, il était d'une volubilité incessante. Je le retins car il me déclara abruptement: « De vous à moi votre ami n'est-il pas une invention purement littéraire ?

-Comment ?! M'étais-je indigné. Jamais je n'aurais pu mener une telle duperie et à quelle entreprise aurais-je commis une action pareille ?

-Je n'avais pas pour dessein de vous offenser. Si vous le permettez je vous présenterais mon hypothèse. Sans malice, sans visée particulière si ce n'est pour la science cela va de soi.

-Faîtes donc ! Concédais-je afin que l'impudent se confonde par lui-même.

-Merci. Voyez-vous l'esprit humain recèle de bien des facultés extraordinaires, nous pensions auparavant naïvement ou par puérilité posséder une conscience dominant notre mécanique et rien de plus. Or il n'en est rien, nous ne sommes pas maîtres au bord du navire de notre esprit ! Revenons au sujet j'ai lu que vous étiez un médecin durant la guerre –triste affaire à ce propos- votre esprit a refoulé des images et désiré retourner à un temps plus calme en s'accrochant à une figure connue. Jeune homme n'aviez-vous pas été confronté à un professeur ayant fait forte impression sur votre personne ?

CulpabilitéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant