'Âtika bint Khâlid

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Elle habitait entre La Mecque et Médine, sur le chemin de l'Hégire qui conduisit les musulmans d'une ville à l'autre ! Sa tente aurait pu être un relais pour les voyageurs mais elle et son mari étaient si démunis qu'ils auraient été bien en peine de nourrir quiconque ! Mais les desseins de Dieu sont imprévisibles ! Ainsi, un jour, Um Ma'bad vit arriver au loin un petit groupe d'hommes fatigués et assoiffés se diriger vers sa tente.

Il s'agissait du Prophète accompagné de son fidèle Compagnon Abu Bakr, du domestique de celui-ci, 'Amar ibn Fuhîra, et de leur guide, 'Abdallah ibn Arîqat qui n'avait pas encore embrassé l'Islam. Ils lui demandèrent si elle avait quelque nourriture à leur vendre, mais elle répondit par la négative. C'est alors que le Prophète vit une chèvre chétive couchée dans un coin de la tente. Il demanda si elle avait du lait, et la pauvre femme dit : « Elle n'en est plus capable. »

Mais le Prophète insista : « Me permets-tu de la traire ? » - « Si tu crois qu'elle a du lait, alors fais-le ! » Et, nanti d'un récipient, il s'approcha de la chèvre, prononça le nom de Dieu, puis se mit à lui masser doucement les mamelles. La chèvre se laissa faire et soudainement, le lait gicla et il put remplir le récipient. Ses Compagnons et lui-même s'abreuvèrent, ainsi que Um Ma'bad qui ne put cacher son étonnement !

Après qu'ils eurent tous bu, il remplit à nouveau le récipient et le laissa à Um Ma'bad. Puis ils reprirent leur route vers Médine, sous le regard ébahi de cette femme, témoin d'un véritable miracle. Peu après leur départ, un groupe des gens de Quraysh à la poursuite du Prophète et ses Compagnons arriva près de la tente de Um Ma'bad. Ils lui demandèrent quelle direction ils avaient prise. Elle eut alors une conduite courageuse et répondit qu'elle n'en savait rien ! Ils insistèrent un peu mais elle les menaça : « Si vous continuez de m'importuner, je vais appeler les hommes de mon clan et vous savez de quoi ils sont capables ! »

Ils repartirent sans plus insister. Il faut préciser que le clan de Um Ma'bad, les Khuzâ'a, était un allié de Abd Al-Muttalib, le grand-père du Prophète, au temps de la Jahiliya ; ce clan demeura allié du Prophète même après la Révélation. Enfin, lorsque l'époux de Um Ma'bad regagna la tente, il trouva le récipient plein de lait et interrogea son épouse sur sa provenance ! Elle lui raconta en détail ce qui s'était produit en son absence et il lui demanda de décrire l'homme qui avait pu traire leur maigre chèvre alors que ses mamelles semblaient définitivement taries !

Um Ma'bad répondit : « C'est un homme d'une extrême beauté, au visage gracieux, aux vertus admirables. Il a des yeux d'un noir prononcé et ses cils sont d'une belle longueur ; le blanc de ses yeux est très affirmé et ses cheveux sont très noirs ; son cou est long et sa barbe est fournie. Lorsqu'il est silencieux, il est d'une grande dignité et lorsqu'il parle, il est tout auréolé de splendeur, comme si ses paroles étaient les perles d'un collier tombant l'une après l'autre... »

Et la brave femme continua de décrire l'Envoyé de Dieu à son mari qui l'écoutait avec attention. Finalement, Abu Ma'bad lui dit : « Par Dieu ! C'est l'homme que les gens de Quraysh recherchent. Si je le trouve, je le suivrai ! » Ils partirent bientôt rejoindre le Prophète à Médine où ils prononcèrent la shahâda devant l'Envoyé de Dieu. Ils furent accompagnés du frère de Um Ma'bad, Khanîs ibn Khâlid qui embrassa aussi l'Islam. Il mourut en martyr le jour de la conquête de La Mecque.

Um Ma'bad fit le serment d'allégeance et prit place dans l'entourage du Prophète ; elle fut très respectée et estimée par tous pour sa sincérité, sa piété et son savoir. En effet, elle fut avide de connaissances. C'est ainsi que lorsqu'un groupe de femmes prêta serment, l'Envoyé de Dieu leur dit : « Vous m'avez prêté serment de ne point associer d'autres divinités à Dieu, de ne point voler ni commettre l'adultère, ni tuer vos enfants, ni forger des calomnies, ni désobéir dans ce qui est convenable. »

Toutes les femmes présentes acquiescèrent. Mais Um Ma'bad demanda : « Ô Envoyé de Dieu, quel est l'acte le plus exécrable que tu nous interdis ? ». Il répondit : « Les lamentations ! » Après la disparition du Prophète , Um Ma'bad vécut dans la considération et l'estime des Compagnons. Les Califes lui vouèrent un grand respect. On rapporte qu'elle rendait parfois visite à Abu Bakr et lui rappelait le fameux jour où sa chèvre chétive avait fourni une telle quantité de lait alors qu'elle n'en donnait plus et qu'elle avait ainsi abreuvé le Prophète , ses compagnons de route et aussi sa famille !

L'historien Al-Wâqidî a rapporté que la chèvre vécut encore longtemps, donnant régulièrement du lait à Um Ma'bad et son époux : sans aucun doute un signe de Dieu qui les conduisit sur le chemin de l'Islam.

Que Dieu soit satisfait de Um Ma'bad

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