Chapitre 15 : Surestimation importante

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Tout pouvoir sans contrôle rend fou.
Émile Chartier

- Pourquoi tu refuses en faite ?

- Ça ne te regarde pas, l'ignorais-je, à demi-mesure.

- Ça va dis-moi, qu'est-ce que ça te coûte ?

Nous étions assises au bord d'une longue route neigeuse, sur les rambardes de sécurités en bois où nous avions dégagés un peu de neige.

Je soufflais longuement suite à ses dires, au fond, lui dire ne me coûtait rien à part de la salive, et peut-être un peu de fierté, c'est vrai. Le seul problème c'est que je ne la connaissais pas le moins du monde, et je ne savais pas ce qu'elle pouvait faire de ce que je lui dirais, des informations personnelles au niveau morale, peut-être le répéterait-elle même à Morgan.

- Je ne sais pas où ira ce que je te dirais, lui fis-je remarquer.

- Et alors ? Ça fait quoi ?

- Ça m'embête ! Voilà ce que ça fait ! m'énervais-je.

- Ok, écarquillait-elle les yeux en levant les mains innocemment. Je ne vais pas le répéter tu sais.

- Qu'est-ce que j'en sais ?

- Je te le promets, leva-t-elle la même en signe de parole.

- Vraiment ? demandais-je surprise.

- Oui !

- Bon, eh bien, c'est principalement parce que, j'ai peur déjà, après tout, c'est pas mon monde et je ne sais pas ce qui m'attend ou ce qui pourrait m'arriver.

- Je comprends, t'as raison après tout. Mais tu vois, il y a toujours un truc que je me dis, commençait-elle en se repositionnant, avec un sourire très sarcastique. Que vais-je faire de ma vie ? Vais-je être celle qui a peur et qui s'abstient ? Comme toi ? Ou celle qui fait preuve de courage ? Hmm... Si j'en ai bien retenu une leçon, c'est que la première catégorie meurt avec des regrets.

Ce qu'elle disait, je savais qu'elle avait raison, et c'est aussi pour ça que je me trouvais lâche, mais il n'est jamais facile de se lancer dans la gueule du loup. Surtout quand celle-ci ne mène pas forcément à une sortie.

- Toi, qui vis dans le monde des ténèbres, qu'est-ce que tu sais des Silenpantriques qui pourrait m'être utile ?

- Si tu restes plantée là à rien branler, rien du tout.

- Aller arrête, lui frappais-je le bras la faisant rire.

- Tout ce que je sais est une généralité. Les Silenpantriques n'ont pas vraiment de pouvoirs à proprement parler comme le Gardien de Lune par exemple, ou comme les Bampi-les, me regardait-elle étrangement. Enfin, à ce qu'on m'a appris. Mais ils ont en eux une pure lumière. Les légendes des premiers jours dit qu'un Silenpantrique avait compris par le biais de messages que lui avaient laissé ses défunts parents, comment puiser dans sa nature, et qu'il avait transformé sa différence en un pouvoir inquiétant, m'expliquait-elle en récitant cela comme si elle l'avait appris par cœur. Mais, la légende aujourd'hui, parle d'un Silenpantrique d'une grande puissance, très grande, qui arriverait par les eaux, les yeux vers le ciel, et qui lui seul, résoudrait l'énigme du Gardien de Lune. Enfin tu vois le délire, c'est hyper énigmatique, même moi je ne comprends pas ce que ça veut dire.

- Explique-moi, qu'est-ce que c'est exactement cette énigme ?

- Eh bien, à la création des noirceurs, le premier Gardien fut choisi par les forces élémentaires, et les conseils de lumière ont rapidement vu un grand danger dans cette création. Les conseils se sont alors accordés pour charger des êtres, les Silenpantriques, à l'époque, surnommés les Anges des naissances, d'atteindre les Gardiens, d'une manière dont on ne connaît rien, de les voir différemment de la manière dont nous, nous les voyons. Évidemment, les Gardiens se succèdent, ils vivent des millions d'années. Mais pour l'instant, à aucune époque, aucun Silenpantrique n'a atteint un Gardien. Pour la suite de l'histoire, les Gardiens maintenant vulnérables, les conseils des noirceurs se sont à leur tour accordés pour mettre en place un moyen d'augmenter la difficulté pour les Silenpantriques, parce que leur puissance inverse ne permettait pas aux noirceurs de simplement les détruire. Alors les conseils ont ensemble mis en place, une grande énigme, basé sur la plus sombre des cruautés d'après les légendes, que seul le génie du Silenpantrique pourrait découvrir, et la seule chance pour un lui de réussir à atteindre le Gardien, c'est de la résoudre. Y paraît que c'est leur lucidité qui les aiderait.

- Je n'y arriverais jamais, désespérais-je à l'entente déjà absurde de la complexité de ce monde.

- Il ne faut pas désespérer, tu ne peux pas désespérer si tu n'as pas essayé.

- Certainement.

- Alors ? Une aventure comme ça, ça se tente non ?! souriait-elle enthousiaste, sûrement à l'idée d'avoir réussi sa mission.

- Eh bien ; pas vraiment, me levais-je, remontant mon sac sur mes épaules.

- Attends, quoi ? Mais pourquoi ? était-elle frustrée.

- Comme tu me l'as dit toi-même, tu travailles pour le conseil des Tristis, alors il y a certainement un millier de choses que tu arranges à ta sauce pour me convaincre de te suivre dans ta merde à la Sherlock, alors merci mais non merci.

Je me levais et commençais à partir, en longeant la route pleine de neige. Je n'étais pas naïve, j'étais sûre d'une chose, faire confiance à une fille qui travaille pour le mal, ça pouvait peut-être sembler cool, mais ça allait surtout m'offrir un joli bon de réduction pour la morgue.

- Elisa ! Attends ! S'il te plaît ! Tu n'as pas le droit ! l'entendais-je se rapprocher de moi.

J'entendais le son de ses pas marteler le sol, ses pas qui se rapprochaient de moi. Je sentis sa main agripper mon bras et me tourner violemment vers elle.

- Lâche-moi ! hurlais-je.

Camille écarquilla les yeux, en reculant de plusieurs pas, et pour la première fois, je me rendis compte d'un reflet rouge dans son regard. J'avais l'air de l'avoir choquée, j'ai toujours cru que j'avais une sale tête quand je m'énervais. Son visage arborait une mine d'égoïste inquiétude et de crainte soudain, elle ravalait sa salive.

- Tes yeux, voilà une chose que tu ne peux pas nier, commençait-elle en restant toujours en retrait, semblant ne plus oser m'approcher.

Je fronçais les sourcils, avant de sortir mon portable de ma poche, et de me regarder dans le reflet noir de l'écran éteint. Mon sang se refroidit sur le coup. Il est vrai, mes yeux avaient subitement changé de couleur, devenant jaune soleil, et en regardant de plus près, je voyais que des taches de plusieurs nuances de jaunes bougeaient dans mes iris, comme des centaines de minuscules gouttes d'eau et d'huile dorée qui ne se mélangeaient jamais. Puis je vis avec un soulagement indescriptible que mes yeux retrouvaient peu à peu leur couleur originelle. Qu'est-ce qu'elle m'avait fait ? C'était inconcevable que cela vienne naturellement de moi.

- Alors finalement, peut-être que la légende va se répéter.

- C'était quoi ça ?

- C'était juste, toi. Fais bien attention, tu te crois en sécurité maintenant, mais tu es plus en danger que jamais, il n'y a que Morgan qui peut te protéger.

- Comme par hasard.

- C'est loin d'être un hasard.

Gardien de lune - Le disque d'or Où les histoires vivent. Découvrez maintenant