Chapitre 5 : Le disque d'or

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L'ignorance ne sait rien, ne voit rien, ne connaît rien, ni le bien, ni le mal.
Louis de Bonald

Mon réveil hurla dans mes oreilles, comme s'il avait des piques d'énergie soudains. Je me levais dans la panique d'un gros sursaut, dû à mon sommeil léger. J'éteignis mon réveil d'un faible coup sur son haut, et me tournais vers la porte de ma chambre, fermée, et qui pour le moment était ma seule protection.
Une fois de plus, mon ventre se tordît à cause du stress.
C'était parti pour affronter ma mère et le monstre maternel qui dormait au fond d'elle.
Je sortis de ma chambre, craintive, à pas de loup qui auraient même trompé les loups, la cherchant du regard. Je la vis assise au comptoir rouge de la cuisine, derrière, qui formait une sorte de bar. Elle prenait son petit déjeuner, un bol de céréales ; l'air insouciante de toute chose, dans une quiétude accablante.

- Coucou puce, me disait ma mère avec un sourire.

Je me figeais au seuil de ma porte, face à sa réaction. Comment était-ce possible ? J'avais dû rester le temps d'une journée chez Morgan, jusqu'à la nuit, une hypothermie ne prend pas une heure à se soigner, puisque dans beaucoup de cas, elle tue.

- Bonjour, répondis-je les yeux plissés.

- Qu'est-ce qui va pas ? me demanda-t-elle les sourcils froncés face à mon air curieux.

- Rien, mal dormi, lâchais-je finalement, pour éviter d'attirer les soupçons.

Je ne pris pas la peine de déjeuner avec ma mère, le stress d'il y a à peine quelques minutes m'avait volé mon appétit.
Je repartis donc dans ma chambre, prenant soin de refermer la porte, toujours aussi perturbée par la réaction de ma mère.
Je ne comprenais pas, c'était impossible. Ma mère n'avait pas pu ne pas se rendre compte de mon absence toute une journée jusqu'au soir. À moins qu'elle ait été retenu par le travail, mais encore une fois c'était démenti, forcément le matin elle s'en serait aperçue.

Je commençais à enfiler, toujours perdu dans le monde des interrogations, un jean serré, bleu, et un chemisier bordeaux rentré à l'intérieur.
Je pris ma veste kaki, que j'enfilais le regard dans le vide, mon sac se retrouva sur mon épaule droite, et je me dirigeais à pas hésitant jusqu'à la porte d'entrée.

Je sortis enfin de chez moi et commençais ma route, les écouteurs dans les oreilles, insensible pourtant à toute musique. Je devais absolument demander à Morgan combien de temps j'étais restée chez lui, car c'était trop perturbant pour moi. Beaucoup trop.

J'avais peut-être seulement l'esprit tourmenté, ou un peu confus. Après tout j'avais subi quelque chose d'assez rude, sûrement assez pour troubler mon esprit. C'est pour ça qu'il fallait que je l'éclaircisse.

Alors que je marchais encore, me perdant dans les sonorités qui m'arrivaient aux oreilles, je tripotais un peu le fond de ma poche, ayant cru sentir quelque chose. Une petite masse pesait dans ma poche, et je finis par attraper entre mes doigts, un petit objet lisse sur les bords, qui au toucher, me semblait arrondi, mais à la fois plat, sans l'être totalement.

Je le sortis de ma poche et le portais à mes yeux. C'était un petit disque doré au deux faces identiques, de pas plus de quatre centimètres de rayon, lisse comme une bille de verre. Au centre, comme un noyau, était installé une petite pierre rouge, aux allures de rubis. C'était un objet d'une exaltante beauté.
Je me demandais à quoi il servait, et à qui il pouvait appartenir, car loin de moi l'envie de m'en débarrasser, mais je n'étais pas une collectionneuse de curiosités.
Je le rangeais à l'intérieur de ma poche, mettant une virgule à mes questionnements, et montais les marches de ma fac.
Je longeais alors un long moment le couloir, à la recherche de la salle d'anglais.

- Mademoiselle Payn, entrez, me souriait le professeur, qui se nommait Mr. Ausset.

J'entrais donc à l'intérieur de la salle, allant vite trouver une place dans le fond. J'enlevais ma veste, et ne m'étais pas plains de ma solitude.
Je repris dans la poche de ma veste le petit disque d'or. Je l'observais, le palpais sous tous ses angles.
Un objet aussi étrange, à qui pouvait-il appartenir ? Sachant que j'ai passé une nuit ellipse chez Morgan, ça doit lui appartenir.

Je passais mon pouce sur la petite pierre centrale, elle était d'une beauté indéfinissable, et les deux faces du disque étaient strictement identiques, ça lui donnait comme un air d'authenticité, malgré que je ne sache pas du tout son origine, ni son utilité.
J'avais presque l'impression que la lumière pouvait se créer d'elle-même à l'intérieur de cette pierre tant elle reflétait la luminosité des néons de la salle.

Durant une infime seconde, je crus recevoir une petite décharge électrique sur la paume de mes doigts, sans pour autant me faire sursauter, c'était une décharge très peu intense, tant que je ne suis même pas sûre aujourd'hui de sa réalité.
Je me sentais bien trop étrange à m'extasier devant un simple objet.
Je le rangeais dans la poche de mon jean et relevais les yeux vers la salle.
Les élèves étaient en train de ranger leurs affaires, discutant du cours auquel je venais, d'assister ? Je n'avais pas pu passer une heure à admirer cet objet, ça ne m'a pas semblé durer plus de deux minutes ?!
Je rangeais donc mes affaires, me traitant moi-même d'imbécile, débarrassant le bureau de ma trousse fermée et de mes feuilles vierges.

J'avais deux heures devant moi, alors j'allais en direction de la salle de biologie, normalement réservée aux étudiants scientifiques. Je savais que le professeur de cette salle n'avait pas de classe à cette heure-ci, et il me connaissait bien. Alors je pris le sens inverse au courant de la foule de littéraire, et m'enfonçais plus ardemment dans le gouffre solitaire qu'encadrait le couloir.

- Elisa, ça fait longtemps que je ne t'ai pas vu, me Monsieur Owsianka.

- La dernière fois que je suis venue c'était il a quatre jours, lui fis-je remarquer amusée.

- C'est vrai mais tu viens tous les jours d'habitude, me fit-il remarquer à son tour.

- C'est vrai, mais j'étais occupée.

- Ce n'est pas grave, entre, la table du fond, comme d'habitude, m'indiqua-t-il en me dévoilant le passage.

Voilà, l'endroit où je faisais la plupart de mes "recherches". Disons plutôt que j'abordais le paranormal à ma manière. J'allais m'installer à la dite table, où était déjà installé un microscope branché. Il m'arrivait souvent d'étudier la biologie chez les animaux, pour me faire mon propre avis sur la mort, et la vie.
C'était essentiel pour moi, pour me faire un avis aussi extérieur sur le paranormal. Il faut aussi voir d'un œil contraire. Plutôt que de se focaliser sur les preuves sur le surnaturel, il faut analyser les preuves naturelles. Mais malheureusement, c'était aussi parce que j'avais fait des recherches personnelles à la fac, que les élèves l'avaient appris.
Je laissais alors mon sac retomber contre les pieds du bureau et allumais le microscope d'un coup sur l'interrupteur prévu à cet effet.

- Qu'est-ce que tu vas étudier aujourd'hui ? me demanda mon professeur curieusement.

- Ceci, lui répondis-je en brandissant le petit disque d'or de par-delà le bureau.

- Qu'est-ce c'est ? me regardait-il confus.

- En apparence, un magnifique, mais simple disque doré, mais je ne sais pas d'où il vient, à quoi il sert, de quoi il est fait et surtout, comment il est atterri dans ma poche alors qu'il ne m'appartient pas. J'espère que vous avez de l'acide nitrique.

- Je vois, Docteur Payn mène l'enquête.

Gardien de lune - Le disque d'or Où les histoires vivent. Découvrez maintenant