Sept mois et douze jours. C'est exactement ce temps que j'ai mis avant d'avoir à accoucher, du moins le temps officiel. En réalité, il fallait rajouter deux semaines. Les deux semaines entre Erwan et Philippe. Mais ça, personne ne le savait, ou presque.
J'étais tranquillement assise dans un fauteuil, devant la fenêtre de ma chambre, en train de lire un roman lorsqu'une vive douleur dans le ventre m'a fait sursauter et lâcher un cri en même temps que mon livre. Philippe, qui était assis en face de moi, s'est tout de suite redressé, l'air inquiet, et a demandé :
– Est-ce que vous allez bien ?
– Je... je... je perds les eaux !, me suis-je exclamée en sentant mon cœur s'emballer.
C'était là. J'allais donner naissance à mon enfant, une fille ou un garçon, je ne savais pas. Mais c'était le moment.
Philippe a appelé les domestiques en criant, et ceux-ci m'ont emmenée dans une chambre aménagée depuis longtemps pour que je puisse accoucher en toute sécurité.
La sage-femme m'a fait allonger sur le lit avant de me fixer les chevilles dans une sorte de machine qui m'a écarté les jambes en l'air. Autant dire que plus gênant, tu meurs. Mais je n'y ai pas vraiment fait attention, dans le feu de l'action.
– Il va falloir pousser, Votre Altesse !, a-t-elle alors lancé tandis que Philippe saisissait ma main dans la sienne.
Une deuxième vague de douleur a déferlé dans mon corps et j'ai bien cru m'évanouir. Puis j'ai senti une brûlure dans la hanche et j'ai vu la sage-femme retirer une aiguille de mon flanc.
– Maintenant, poussez !
Je me suis exécutée, poussant avec toutes les forces qu'il me restait. Je sentais les doigts de Philippe qui s'écrasaient dans les miens, mais je n'y prêtais pas attention. Il fallait que je fasse sortir cet être de mon corps, j'allais donner la vie.
Aussitôt, je me suis mise à pleurer. Je ne savais même plus si je pleurais à cause de la douleur, qui refluait petit à petit grâce à l'anesthésie, ou si je pleurais parce qu'à mon tour j'allais accomplir le miracle de la vie. Peut-être même que je pleurais parce que j'étais frustrée que ce soit Philippe à mes côtés plutôt qu'Erwan.
J'ai continué à pousser comme une folle, et la sage-femme a poussé une exclamation avant de sortir un minuscule bébé. Il était couvert de sang et de je-ne-sais-quoi, mais j'ai pu distinguer que c'était une fille.
– C'est une petite fille !, a dit la sage-femme en souriant.
Elle a déposé le bébé dans un berceau en plastique tandis qu'une deuxième sage-femme entrait dans la pièce pour couper le cordon et nettoyait ma fille.
– Le deuxième arrive, Votre Altesse, s'est exclamée la première sage-femme.
– Le... le deuxième ?, ai-je bafouillé tandis que Philippe serrait ma main avec tendresse.
Je ne m'attendais pas à avoir des jumeaux, j'étais épuisée, comment allais-je pouvoir mettre au monde un deuxième enfant ?
– Allez-y, maintenant. Poussez.
Je me suis exécutée de toute mes forces, tandis que Philippe tenait ma main tout en m'encourageant. Facile, ce n'était pas lui qui devait expulser un deuxième enfant par voie basse !
La douleur m'a fait pousser un cri, puis deux. Peut-être bien que je criais aussi parce que c'était Philippe qui se tenait là, à côté de moi, alors que ça aurait dû être Erwan. Je criais dans l'espoir d'évacuer la douleur, la peine, la colère et la frustration.
Et alors, dans un soupçon d'énergie, j'ai poussé plus fort et la sage-femme en a tiré un deuxième enfant.
– C'est un garçon !
Je me suis mise à pleurer de soulagement et de bonheur. C'était enfin terminé. Même si la douleur était toujours présente, je pouvais enfin souffler.
J'ai arrêté de pousser et je me suis mise à pleurer plus fort tandis que Philippe embrassait tendrement mon front.
– Vous avez fait du bon travail, m'a-t-il félicitée en souriant.
– Comment allez-vous les appeler ?, a demandé la sage-femme en souriant.
Avant que Philippe n'ait pu ouvrir la bouche pour répondre, j'ai lancé :
– Claire Princesse Lily Lou Sabrina et Ilan Philippe Erwan Jim Jacob.
La sage-femme a lancé un regard gêné à Philippe, qui a tourné ses yeux vers moi d'un air ébahi.
– Qu'est-ce que...
– Je viens d'accoucher de non pas un mais deux enfants, je pense que j'ai le droit de choisir les prénoms !
Il a semblé sur le point de dire quelque chose, mais mon ton dur et froid a dû le convaincre de pas broncher et il a hoché la tête. De toute manière, j'avais décidé des prénoms bien avant. J'avais choisi un prénom de fille et un prénom de garçon, parce que je ne savais pas le sexe du bébé. Ils étaient deux, un de chaque, alors je leur donnais le prénom que j'avais choisi pour eux. Je ne laissais pas le choix à Philippe, et il pourrait bien protester, je ne changerais pas d'avis. De toute façon, ces enfants n'étaient pas les siens, même si le deuxième prénom de mon fils restait Philippe, pour éloigner les soupçons. Mais je savais que dans quelques temps, on commencerait à se poser des questions. Ilan avait déjà un léger duvet roux sur le crâne, et ni Philippe ni moi n'étions roux.
– Comme vous voudrez, ma reine, a-t-il dit en embrassant tendrement mon front.
J'ai soupiré longuement, épuisée. Je n'avais même plus la force de rager mentalement contre Philippe. Je voulais juste me reposer, dormir.
J'ai fermé mes yeux avant de dodeliner de la tête, et j'ai à peine entendu la voix de la sage-femme dire quelques mots que je n'ai pas compris avant de perdre connaissance.
Quand je me suis réveillée, j'étais dans mon lit. Deux berceaux étaient posés à côté, et je savais qu'il s'agissait de mes enfants.
Je me suis redressé et j'ai aperçu Philippe, assis sur le bord du lit.
– Bonjour ma reine. Vous avez bien dormi ?
Je me suis frotté les yeux. J'étais encore un peu sonnée, mais je me sentais nettement mieux.
– Pour information, vous avez dormi toute la journée. J'en ai profité pour faire un petit discours au peuple, avec votre père. Ils sont tous très ravis d'avoir enfin des héritiers à leur couronne.
Je me suis mordu la lèvre. Il n'avait tout de même pas fait ça ? Si Erwan l'avait entendu, il y avait de fortes chances pour qu'il se soit vexé. Je lui avais promis de tout révéler à Philippe, mais je n'en avais pas eu le temps.
– Quelle heure est-il ?, ai-je demandé avec le plus de détachement possible.
– Vingt-deux heures, environ.
J'ai hoché la tête avant de lui demander s'il pouvait me laisser dormir pour la nuit, prétextant une fatigue intense. En réalité, je n'étais pas si fatiguée que ça, je voulais juste pouvoir enfiler un jean, un t-shirt et des baskets et rejoindre Erwan. Même si nous avions gardé le contact par lettres, je ne l'avais pas vu en vrai pendant près de neuf mois, et c'était long. Très long.
Philippe a acquiescé et est sorti en éteignant la lumière derrière lui. Il a dit quelques mots à un domestique qui devait se trouver là, sûrement pour lui demander de ne pas me déranger. Puis j'ai entendu les pas s'éloigner dans le couloir.
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Hey ! Et voilà ce nouveau chapitre, j'espère qu'il vous plaira ! Accrochez-vous les amis, c'est l'avant-dernier chapitre de cette histoire !
Merci de lire cette fiction ! 💖
Axelle
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∞ Princesse 👑 ∞
RomanceJ'ai toujours rêvé d'avoir une vie différente. Une vie où je ne serais pas contrainte à me marier de force avec un homme que je ne connais pas alors que je viens juste d'avoir 18 ans. Une vie où je pourrais être libre, avoir des amis, voir la ville...