Âmes sœurs en Amérique

Chapitre 11

Judy s'accrochait désespérément à la crinière de Tempête, effrayée, regrettant sa stupide idée de le monter sans selle et sans rênes, dont elle réalisait maintenant le danger. Tempête était perdu aussi, il ne comprenait rien. Il sentait Judy sur son dos, mais pas de la même manière, et il n'avait pas la sensation des rênes et du mors ; il était complétement perdu et affolé.

En apercevant les collines, Judy se sentit soulagée mais le plus dur restait à faire arrêter son cheval dont elle ressentait l'affolement. De plus, sans étriers, s'il se cabrait, elle courait le risque d'être violemment éjectée et de se blesser gravement, voire même d'être tuée. Cette pensée la fit frémir mais ils ne pouvaient non plus continuer comme ça, elle allait devoir trouver une solution et vite.

Sous le coup d'une impulsion soudaine, elle serra le cou de Tempête avec force, le faisant dévier brusquement de sa trajectoire et se cabrer dangereusement. Avant qu'elle se rende compte de son erreur, son cheval croisa les pattes en tentant de récupérer son équilibre, éjectant sa cavalière tandis qu'il tombait lourdement sur le côté avec un hennissement strident. Judy cria en retombant en avant, et une violente douleur à sa cheville gauche lui arracha un nouveau cri.

Tempête se débattit dans le vide un moment, reprenant peu à peu ses esprits avant de se relever maladroitement sur ses pattes. Encore un peu perdu, il perçut néanmoins tout de suite les gémissements de Judy, sa cavalière et maîtresse. Il se rendit vite à ses côtés, hennissant doucement tout en frottant son museau contre sa joue ; il avait compris qu'il était coupable.

-Oh mon Tempête, prononça calmement Judy en embrassant son museau. Tu n'as pas à te sentir coupable mon beau, c'est uniquement de ma faute. Je n'aurais jamais dû faire ça. Mais maintenant, il va falloir que tu m'emmènes au village. Tu as compris ?

L'étalon noir la fixa un instant de ses yeux intelligents, puis il se baissa pour qu'elle puisse remonter sur lui. Judy lui flatta l'encolure en guise de remerciement et monta prudemment sur son dos en faisant attention à sa cheville ; elle espérait qu'elle n'était pas cassée, même si elle l'avait cherché avec son comportement dangereux à la fois pour elle et pour Tempête.

Dès qu'elle fut installée, son cheval se releva avec prudence et se dirigea d'un pas sûr vers le village Cheyenne. Aigle Vaillant reconnut la monture de loin, il l'avait guettée depuis les premiers rayons du soleil et le temps lui avait semblé atrocement long à attendre son Eau Vive, alors il ne retint pas sa joie pour s'élancer vers elle.

Cœur de Feu le vit faire et comprit rapidement, le suivant à son tour mais elle s'arrêta vite à ses côtés pour la même raison : la cheville de Judy, rouge et pleine de terre. Ils ne prirent conscience de sa tenue qu'après, échevelée, sale, chevauchant Tempête sans selle. Il lui était arrivé quelque chose, grave ou pas, ils n'allaient sans doute pas tarder à le découvrir.

-Qu'est-il arrivé à Eau Vive ? lui demanda Aigle Vaillant avec empressement qu'a-t-elle fait ?

-Je me suis enfuie, répondit Judy avec le sourire. Mais je ne pouvais pas seller Tempête sans attirer leur attention et me faire prendre, alors j'ai enfourché Tempête comme vous le faites.

-Mais Eau Vive s'est blessée ! s'écria Cœur de Feu.

-Aigle Vaillant l'emmène voir Esprit Lointain !

Avant que Judy ne puisse répondre, le jeune chef l'avait souplement enlevée de Tempête pour la prendre dans ses bras, la portant comme une mariée. Ses joues s'empourprèrent aussitôt lorsqu'elle prit conscience de la situation, elle ignorait si Aigle Vaillant s'en était aperçu mais elle se sentait gênée devant Cœur de Feu. Laquelle se contenta de sourire comme si elle savait déjà pour eux.