Wings

XIII

Pour le moment j'avais trouvé cinq personnes, Axel, Sully, Arya, petit Lucas, et Grégory. Aucune trace de Théo, grand Lucas, ou Jérémie. Je n'avais loupé aucune cible, enfin je crois. C'était un peu compliqué de compter soi-même nos cibles. Je m'étais fait touchée quelques fois et préparais ma vengeance avec vivacité. Je vis Théo et tirais, mais mon gilet devint rouge quelques secondes plus tard. Je regardais autour de moi, mais ne vis personne, alors je continuais d'avancer. Dans une sorte de recoin, j'avançais lentement, on ne sait jamais, Arya adorait se cacher dans ce type d'endroit. C'est seulement au troisième virage que je tombais sur une silhouette familière.

Trop familière.

Mes mains tremblaient, mon souffle se coupa, mais lorsque je clignais des yeux il ne s'agissait que du grand Lucas. Il me tira dessus un sourire aux lèvres. Son gilet se changeait en bleu, le mien aussi. Le haut-parleur s'exclama "Groupe de 2" plusieurs fois, alors je compris que je me retrouvais avec lui. Je croisais discrètement les doigts pour qu'Arya se retrouve avec Sully, mais bon, la connaissant elle aurait préféré lui tirer dessus comme une psychopathe.

Nous recommencions à avancer, j'entendais une discussion vers la gauche, donc je me rapprochais, visant l'endroit, jusqu'à ce que je me rende compte que tout le monde voulait tirer sur moi. Avant de pouvoir agir, je me fis tirer en arrière. Je me retrouvais piégée dans un coin. Je ne pouvais pas bouger, peut-être parce qu'une personne me compressait au mur. Son souffle chaud s'abattait sur mon visage et il sentait légèrement la cigarette. Ça ne me gênait absolument pas, depuis toute petite je m'étais habituée à vivre dans l'odeur du tabac. Ma respiration s'était saccadée depuis ce rapprochement soudain, et je pouvais comprendre pourquoi. Je devinais son regard noisette sur ma silhouette, sa main contre le mur, et sa respiration régulière. Je n'arrivais même pas à remettre mes idées en place.

Pendant quelques secondes nous restions ainsi, je ne voulais pas bouger, honnêtement, j'étais bien là. Un bruit derrière lui me fit lever la tête, provoquant l'effleurement de nos nez. Mon cœur rata un battement, je ne pensais pas que nous étions si proches. Il ne suffisait que d'un malheureux centimètre pour...

Le bruit des pas retentit derrière lui, et, même si je ne voulais pas couper notre étreinte, je pris le bras de Lucas et l'emmenais dans un autre coin, pour que l'on ne se fasse pas tirer dessus.

Ce moment était bizarre, et agréable à la fois. La sensation du mélange de nos respirations était mémorable. Mes joues étaient en feu à partir de ce moment-là, et je me demandais comment j'ai pu stopper ce qu'il allait arriver. D'ailleurs, qu'est-ce qu'il allait arriver au juste ?

On allait s'embrasser ? Non, cette idée ne me vient pas en tête, Lucas et moi sommes amis, rien de plus.

*

Une fois la partie terminée, je regardais la feuille de résultats : j'étais première, Sully était arrivé deuxième, et petit Lucas troisième. Sully s'était éclaté, il avait passé une super journée et avait adoré ses cadeaux. Je lui avais offert quelque chose de banal : un carnet vierge. Il pouvait y dessiner tout ce qu'il souhaite. Alors oui, ce n'était pas le plus beau cadeau, mais ça lui a fait plaisir alors, c'était le principal.

*

- Racontes moi tous les détails ! me demanda-t-elle en sautillant presque.

- Que veux-tu que je te dise ? Il était cool ce laser-game, répondis-je d'un ton neutre.

On venait de rentrer à l'appartement, assez froid d'ailleurs. Après avoir fait 2 parties on était parti chercher des gaufres, puisque le stand de crêpe était fermé.

- Je sais qu'il s'est passé quelque chose Val', ne le nie pas.

La vérité c'est que, malgré mon indifférence totale à ce quasi-baiser, je ne faisais que d'y penser. Heureusement que lire dans ma tête était impossible, sinon j'aurai été fichue.

- Et bien oui, il s'est passé quelque chose, elle sourit de toutes ses dents et attendis la suite. Je lui ai tiré dessus et après on s'est retrouvé dans un coin et on a fait des enfants, son sourire s'effaça, voyant finalement que je me foutais de sa gueule.

C'était à mon tour de sourire à présent.

- Bon, ok, je vous ai espionné, dit-elle.

Je lui fis les gros yeux et espérais intérieurement qu'elle n'ait pas vu ce que je pense.

- Et, il se trouverait que lorsque tu as disparu en arrière derrière le mur, je me suis avancé et j'ai vu votre... étreinte, sourit-elle.

- Il ne s'est rien passé Ay', répondis-je catégorique.

- Mais ma question est : vous vous êtes embrassés ou pas ?

- Arya non ! Il ne s'est rien passé ! On était juste assez proche mais c'est tout !

Elle me regardait, un sourcil arqué et les bras croisés. Je détournais le regard, sachant très bien que j'allais cracher le morceau, puisque quand elle le voulait, elle était très téméraire. Je soufflais finalement au bout de quelques minutes.

- 3 questions maximum.

Elle sautait de joie et m'emmenait avec elle sur le canapé.

- Vous vous êtes embrassés ?

- Je te l'ai déjà dit, non.

- Et merde j'vais devoir passer 10€ à Théo alors..., marmonna-t-elle.

- Pardon ?

- Nan rien, bref. Du coup il s'est passé quoi ? demanda-t-elle.

- Rien j'te dis... On était juste super proche et c'est tout.

- Et t'as ressentis quoi ?

Là, je me bloquais. Je n'allais pas lui dire que c'était agréable, et que j'aurais voulu rester avec lui indéfiniment. Au plus profond de moi, même si je me l'interdisais, j'aurai peut-être voulu que la suite se produise.

- Rien. Enfin, c'était cool, sans plus.

Sans que je m'y attende, elle me claquait le front.

- C'est faux. Ça se voit dans tes yeux. Ils pétillent comme quand je te propose de manger pizza, sauf que là, c'est plus intense, souriait-elle.

Je soufflais une nouvelle fois, je n'avais pas vraiment le choix.

- Bon, et bah... je sais pas comment expliquer... On était super proche et il faisait super chaud, il s'est réellement rien passé, je marquais une pause et regardais Arya, qui attendait la suite avec insistance, ça me faisait presque rire. Mis à part qu'on a.. hm.. failli s'embrasser ?

Sa mâchoire inférieure tomba parterre. Elle semblait chercher les mots, je ne savais pas si elle allait m'engueuler ou sauter de joie, on n'est jamais sûrs avec elle.

- Mais pourquoi tu l'a pas fait ?! réchigna-t-elle un peu trop fort.

- Vous arriviez et je voulais pas me faire tirer dessus.

En le disant à voix haute, et devant Arya, je me rendis compte que mon excuse était minable, et elle aussi apparemment.

- C'est l'excuse la plus pourrie du monde, je riais, puis elle continua. Val', ne laisse pas Florian t'empêcher de vivre à nouveau. Qu'est-ce que tu ressens pour Lucas ?

Un silence envahit la pièce pendant quelques secondes, et j'étais fière de m'échapper de cette discussion :

- Ça fait quatre questions.