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Les pieds plongés dans l'eau du lac, j'inspirais calmement. Jey se tenait en tailleur à côté de moi et pour le moment, personne ne parlait. Nous étions derrière chez moi, mon ancienne maison. Je repensais vaguement à Charly dont je n'avais pas de nouvelles. A mes parents qui n'avaient plus cherché à me contacter depuis les retrouvailles violents avec mon père. Mais tout ceci n'était rien comparé au désarrois dans ma tête.

- Alors, pourquoi ?, soufflais-je finalement.

- Je te l'ai dit.

- Pour rajouter deux minutes après que tu n'en avais rien à foutre de moi, lui rappelais-je et il se crispa.

- J'ai horreur que tu remets ma parole en doute, marmonna-t-il.

- Pourtant, je pense que j'ai plutôt le droit. Tu m'en as fait voir de toutes les couleurs.

- Mais je t'ai toujours aimé Evan, grogna-t-il et mon cœur se serra brutalement dans ma poitrine alors que mes yeux s'écarquillaient. Je suis avide de pouvoir. C'est un défaut que j'ai hérité de mon père. J'ai voulu en abuser et au final, j'ai tout pris dans la tronche. J'ai fini seul et dans un sale état. Dans cette grotte, quand on s'est retrouvé, souffla-t-il d'une voix tremblante. J'ai vraiment eu l'impression de voir un rayon de soleil dans les ténèbres. Je me noyais et tu es apparu. Je ne pensais jamais te revoir. Sauf que tu étais là et... Et le regard plein de haine que tu m'as lancé m'a refroidi. J'ai réellement cru que tu allais me tuer. Et je me serai laissé faire. Je voulais que tout ça se termine.

- Je n'aurai pas pu te tuer. Et au fond, tu devais le savoir.

- Peut-être. Mais j'aurai réellement aimé que tu le fasses.

Je déglutis et baissais les yeux sur mes mains, triturant mon pull. Il avait vraiment voulu mourir. Je l'avais vu dans son regard. Or, j'avais cru qu'il s'agissait encore d'un jeu, de voir jusqu'où j'étais capable d'aller. Je ne pensais pas qu'il était aussi mal. Oros avait raison, je devrais arrêté de voir ma douleur parce que là, devant ce lac, je n'étais plus certain d'être celui ayant le plus souffert.

- Tu m'as brisé Jey, glissais-je et il encaissa le coup. Tu as joué avec moi, mes sentiments et même si tu dis m'avoir aimé, ça n'efface rien à tes actes. Et cette fois-là, tu as aussi voulu me tuer. Et tuer Erik.

- C'était la rage, me coupa-t-il précipitamment. Je n'en revenais pas de le voir avec toi, s'inquiétait pour toi. J'ai toujours été le premier dans sa vie, celui pour qui il faisait tout et toi... Toi, tu n'aurais pas dû être autant pour lui. J'ai pété les plombs et j'ai voulu lui faire payer de m'avoir lâché. Je regrette. Tu sais, j'essaye vraiment d'arranger les choses avec lui mais c'est dur. Il n'accepte pas ce que je t'ai fait.

- Je sais, on en a parlé, répondis-je en ignorant ces explications sur ce matin-là. Il a du mal à croire que tu es sincère. Mais je le pousse à t'écouter. Parce que je sais que tu ne joueras pas avec lui.

- Comment peux-tu...

- C'est ton ami, ton frère, lui rappelais-je en me tournant légèrement dans se direction. Tu ne lui feras pas de mal. 

- Non, jamais.

- Alors je sais que je peux le forcer à te parler.

Il hocha la tête et je me remis face au lac, posant mes mains derrière moi. Je n'avais pas eu les réponses que je cherchais. Je ne savais pas pourquoi il était là, pourquoi il me gardait encore près de lui. Pourquoi je restais avec lui. Je soupirais et secouais doucement mes pieds dans l'eau.

- Je n'arrive pas à te laisser derrière moi Evan. C'est pourquoi je suis toujours là. Je tiens à toi, même si tu ne veux pas y croire. C'est... compliqué. Pendant cette dernière année, je ne pouvais pas m'empêcher de penser à ce que tu m'as balancé avant de suivre Gô. Je me répétais constamment tes mots. Ça me tuait à petit feu mais ça me faisait réaliser ce que j'avais fait, à quel point j'avais merdé avec toi. Je ne veux pas changer d'équipe car je veux toujours avoir un œil sur toi, je veux pouvoir m'assurer que tu seras sauvé, épaulé, aidé par un autre, même si ce n'est pas moi. Car comme tu l'as dit, ça ne fonctionne pas entre nous, on n'arrive pas à trouver une stabilité. Mais je reste quand-même. Tant pis si on s'engueule, si on se tape dessus. Je ne supporterai pas d'être loin de toi. Je n'ai pas pu être loin de toi ces derniers jours, murmura-t-il délicatement et je fronçais les sourcils, gardant les yeux rivés sur l'eau. Oros me tenait au courant de vos avancés, et je passais de temps à autre le voir. Et au passage, je venais te voir.

Je ne devrais pas - Chasseurs D'ombres T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant