No Rules ║ Feel Real - T2

37 - Couleurs

- Louis -

Jamais je ne me suis senti aussi libéré qu'à cet instant, là, à danser, s'éclater, s'aimer.

L'alcool y est pour beaucoup je sais, et sans doute demain le poids des regards et des conséquences se fera sentir à nouveau, mais en attendant, il n'y a plus personne autour.

En fait si, il y a des gens autour, énormément, à nous en étouffer. Sauf que ces gens-là ne jugent pas, car eux non plus ne voudraient pas être jugés pour leurs fringues outrageuses, la drogue ingérée ou toutes les autres choses que la société stigmatise. Du coup, même si Carrie nous embrasse fiévreusement l'un après l'autre, que nos deux corps emprisonnent le sien et que nos bouches et nos mains glissent sur la moindre parcelle de sa peau, aucun regard ne se fait moralisateur. Ils sont amusés les yeux qui observent, curieux, envieux même ; parfois ils clignent à notre attention accompagné d'un sourire complice.

Si seulement le reste du monde pouvait réagir comme eux.

Les musiques défilent, la bouteille se vide. Les basses assourdissantes résonnent dans mon ventre et mon cœur. Les bras de Carrie m'enlacent, ses lèvres me cherchent. Quand la tête me tourne, je la pose dans son cou ou contre le front d'Harry. Je me sens bien.

Tout à coup je me retrouve avec un sachet de poudre rouge entre les mains sans même me souvenir d'où il provient. Des mecs les ont jetés depuis la scène je crois. S'ensuit des explosions de couleurs jaillissant de toutes parts, c'est magnifique. Harry me déchire le mien sur la tête, Carrie me secoue les cheveux et je ris, mon Dieu que je ris. Je vacille aussi.

Carrie est entièrement jaune, elle hurle et frappe un Harry vert qui l'emmerde. Je les attrape tous les deux et les serre le plus fort que je peux. Tellement de bras, de caresses, de rires à mon oreille. Autour il n'y a plus de gens, juste d'autres mélanges colorés et des sourires heureux. On ne peut plus se différencier, nous sommes tous pareils et c'est génial. Pour la première fois de ma vie je me sens normal et libre.

Harry attrape ma nuque, il me gueule des choses dans l'oreille mais je ne comprends plus rien, je pose juste mon nez dans son cou et ferme les yeux. On m'enlace et me traine, ça bouge. On traverse la foule. Puis ça me secoue de partout.

— Mec t'es déchiré !

La voix moqueuse de Liam je crois. Les bras de Maddie ensuite, qui me forcent à danser. On me balance encore de la poudre, elle est bleue. Je ne me sens pas très bien mais heureusement je retrouve les lèvres de Carrie et ne les lâche plus. Là je me sens mieux.

-

Une main s'écrase sur ma joue, m'arrachant un grognement. La lumière est orange tout autour, où-est-ce que je me trouve ?

C'est en se redressant précipitamment du matelas gonflable qu'Harry m'a écrasé le coin du visage et réveillé. La lueur du téléphone qu'il a plaquée contre son oreille éclaire sa figure encore colorée, il le coince dans son cou tout en enfilant un boxer.

— T'es où bordel, chuchote-t-il rageusement.

Ma nuque se relève difficilement pendant que je jauge l'étendue des dégâts.

Ho mon Di...

Du rouge, du vert, du jaune, partout dans la grande tente. Moi je suis complètement nu, allongé sur le dos avec une Carrie nue elle aussi agrippée à moi, qui dort profondément. Quelques brides de souvenirs m'arrivent de ça et là, c'est très alcoolisé et euphorique. Certaines images me collent même d'honteuses bouffées de chaleur.