AL, LISA, LE CHIEN, ET MOI.

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Voilà des jours que les stores restent fermés. Que  je végète sur mon canapé en cuir dans le même caleçon, la même crasse, la même carcasse, les mêmes gestes: je me lève en bousculant les détritus, qui ne se réveillent pas. Comme d'habitude je vais pisser en ne prenant même plus la peine de viser. Le parterre autour du chiotte ressemble à une mare d'urine croupie que j'évite du regard en basculant ma tête vers l'arrière. Je bois un café arrosé avec une clope et/ou un pétard. Un Xanax. Puis un live de Bashung à l'Olympia sur la fraîcheur du cuir en buvant jusqu'au trou noir pour supprimer les larmes.
L'appartement est de plus en plus en désordre. Et j'en est de plus en plus rien à foutre. Rien à foutre de tout, rien à foutre de rien. Rien à foutre du fait même de n'en avoir rien à foutre.
Al est un de mes rares amis. Il arrive à me supporter quand je m'emporte. Mieux, il me supporte lorsque mes fils se touchent  et que ma boussole se bousille en cherchant la merde. Malgré le fait que Je le connaisse depuis longtemps, je n'ai aucune envie de le voir, ni de mettre un pied dehors pour me mélanger à la foule. Voyons le bon côté, il ira faire des courses car il ne me reste des munitions que pour deux jours à vue de nez. Sûrement moins en prenant en compte que Al ne boit pas que de la tisane. Il laisse exploser sa folie entre des moments réfléchis et posés de manière imprévisible. Cela fait un bout de temps que je ne l'avais pas vu, et il ne devrait pas tarder selon  ses dires. Mais le temps est relatif et surtout, plus il passe, moins il en reste. Le miens s'étale à n'en plus finir. Il c'est mis en quelque sorte au diapason avec son hôte. Il apporte les rides en emportant avec lui les rires insouciants de l'enfance. Cette insouciance qui ne m'a pas quitté contrairement aux rires se faisant plus rares. J'ai abandonné la notion imaginaire du temps, de ses fuseaux, de ses contraintes. Et pires que tout, des obligations ridicules que cet esclavage moderne inclus sous la coupe de la trotteuse. Je suis mon rythme. Ni plus, Ni moins.
C'est dans cette logique que j'en suis à présent à ma prise d'anxiolytiques suivant mes rites journaliers énumérés tantôt. Je prends une bonne lampée de rhum pour faire descendre la pilule qui est rapidement suivie d'une toux grasse que je tente de faire passer en allumant une Windfield. Ma santé m'importe peu. Je ne me suis jamais trop occupé de moi et ça ne pouvait qu'empirer suite aux événements du passés.

Depuis qu'elle c'est barrée avec son prof de yoga tout est parti en vrille. Ça on peut le dire qui lui a fait travailler, sa putain de souplesse! Qu'il lui a détendu, son putain de cul! Il lui a effectivement bien ouverts, ses putain de Chakra! Il lui les a bien écartés...enfin vous voyez le délire. En gros, NAMASTÉ sale pute!!!
Tout se mélange: la nostalgie, le bonheur, la haine, les cries, les pleurs, les rires, l'amour. Car oui bordel! Je l'aimais, ce p'tit bout de femme. Seulement voilà. L'amour enferme, Cloisonne, emmure, cimente, éloigne. Eloigne des amis, des soirées, de la famille. Je me disais que Tous ces pauvres gens ne connaissaient  sûrement rien à la puissance des sentiments inconditionnels. Quel con j'étais de penser ça...Puis, une fois la réclusion devenue irréversible, l'amour détruit. Dynamite les murs, les fondations, ne laissant que les gravats du regret. Un chantier qui ne se finira pour ainsi dire, jamais. . Je me souviens de cette douce accalmie lorsque elle me serrait dans ses bras, la tête entre ses mains, le parfum de son cou, sa chute de Rein, ses seins, sa fine bouche qui me lançait des mots doux comme les pires atrocités, la fièvre de nos organes qui fusionnaient, la symbiose de nos chairs et de nos esprits rêveurs. On c'était fabriquer un mensonge dans lequel je touchais le bonheur du bout des doigts. C'était nous contre le monde, contre la galaxie, contre l'Univers, et bien plus encore.
J'avais traversé les vents violents dont la force allés crescendo pour arriver à ce que les climatologues appellent "le mur du cyclone". Après cette rencontre et les orages affrontés je me trouvais enfin dans son "œil", là où la tempête retombe. Où les vents se taisent. Où les nuages disparaissent. J'avais arrêter la dure, je ne buvais plus jusqu'à la déraison, et bien évidemment je ne baisais plus qu'avec elle. Elle suffisait à contenter mon appétit gargantuesque. Je pensais manifestement à tort que je suffisais au sien. Quand elle m'annonçât "je te quitte.", de surcroît pour ce cliché ambulant, je repris "le mur" de plein fouet sans sas de décompression. Voilà où j'en suis aujourd'hui, je végète sur mon canapé en cuir dans le même caleçon, la même crasse, la même carcasse, les mêmes gestes depuis des jours. Tout deviens de plus en plus fade. Le café, la musique, les rêves, les cauchemars. Même la bière, le vin, le whisky, le rhum ont presque perdus de leurs superbes. sans sa présence je ne suis qu'une coquille vide. Une bouteille à la mer qui tangue, divague aux grées des vagues. Se laissant porter par les courants.

NOUVELLES D'UN CONDAMNÉ À VIVRE.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant