Chapitre 6 : Riazabah Zalem

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Magnus passa la nuit et la matinée caché, à étudier le va-et-vient des homogènes dans la maison rouge. Ces derniers entraient seuls, en couple ou en bande, restaient quelques heures avant de repartir en carnavette. Magnus ne leur demanda pas s'ils avaient vu sa jumelle. Ces individus ne lui inspiraient aucune confiance. Alors, il attendait, incapable de prendre une décision. Son estomac avait cessé de se tordre en réclamant son dû en nourriture, mais la soif le tenaillait. La bouche sèche, il manquait de salive et déglutir lui était pénible. Deux jours sans dormir produisaient aussi ses premiers effets en rendant ses idées confuses. Ajoutez à cela un cadre dans lequel il était sans repère et il fut certain qu'il était plus facile de survivre dans la jungle de Beauwood que dans cette mégapole sans âme.

Alors qu'il allait tenter une nouvelle expédition de repérage, une voix féminine le sortit de sa torpeur. Lointaine, elle le sommait de venir la rejoindre.

— Voilà que j'hallucine ! maugréa Magnus, planqué au milieu d'un tas d'ordures ménagères.

Rien de comestible, excepté si on aimait les vis et la limaille. L'angle d'une laveuse lui sciait les côtes. Malgré ses gesticulations pour trouver une position confortable, un objet enfonçait constamment un coin de son anatomie.

La voix résonna encore une fois, plus appuyée que précédemment. Magnus se força à l'ignorer. La folie ne l'emporterait pas.

La voix insista. Et s'il se trompait ? Magnus passa en revue une à une les bâtisses qui l'entouraient. Et quelle ne fut pas sa stupeur d'apercevoir une silhouette gracile camouflée dans l'embrasure d'une fenêtre située au second étage ! Surpris d'être observé, il vérifia que c'était bien lui qu'on interpellait. Personne dans les parages. Rien de chair et d'os tout au moins. Magnus calcula les risques. Il resta bloqué à fixer la maison sans agir. Si cette femme était réelle, elle était forcément homogène. Auquel cas, comment lui faire confiance ? Et si elle savait ce qui se tramait dans le lieu où était enfermée sa sœur ? L'enjeu était de taille et il ne souhaitait pas que son cadavre pourrisse au milieu des déchets de robots.

Magnus s'assura que personne ne rôdait avant de se diriger vers l'immeuble d'où on l'avait appelé. Il marcha doucement sur la pointe des pieds. Le bâtiment était on ne peut plus banal, laissé à l'abandon comme les habitations aux alentours. La porte d'entrée était entrebâillée. D'un geste précautionneux, Magnus la poussa. Il arriva dans un sas, passa une seconde porte vitrée. Le verrou forcé pendait. Personne ! Il ne se risqua pas à emprunter les ascenseurs et prit les escaliers. Son cœur tambourinait dans sa poitrine. Il s'agrippait à la rampe plus qu'il ne s'y tenait. Ses mains moites glissaient. Au premier étage, Magnus fit une pause et écouta. Pas un bruit. Il reprit son ascension, marche après marche, avançant prudemment. Aux aguets, son regard errait partout. Il ne savait pas du tout à quoi s'attendre.

Au deuxième étage, une porte était entrouverte. Il y passa la tête et vit une jeune femme et deux hommes dans une pièce exiguë. Ils portaient des vêtements kaki et amples en rien comparables avec les combinaisons étriquées des homogènes.

— Qui es-tu ? l'interrogea prestement la jeune femme.

Son ton était si autoritaire qu'il répondit sans tarder.

— Magnus Dangélo de... de Jhopri sur Huma.

Elle l'observait, dissimulée dans l'obscurité. Il y avait quelque chose d'androgyne dans son allure. Elle se rapprocha de lui. Sa peau ébène faisait ressortir ses yeux bleus et sa bouche charnue un peu moqueuse. Ses cheveux crépus aux reflets roux encadraient un visage rond, des anneaux dorés en décoraient les pointes. Elle était à peine plus âgée que lui et son regard trahissait son assurance.

La Nébuleuse d'HéraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant