Chapitre 11 : Rencontre providentielle

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Mé-Boh remercia la déesse Liv - bienfaitrice des voyageurs - de les avoir ramenés à bon port. Son sourire dessinait une fente divisant son visage en deux. Malgré son malaise, Kendalh fut ravie de revoir la Nébuleuse et son impressionnant réseau routier interstellaire.

Elle pensa à toutes les merveilles qu'elle rapportait et comment elle en était arrivée là. Meilleure élève de sa promotion, elle avait pu suivre les cours du célèbre Scenti Gustavio Marsou, généticien le plus talentueux de sa génération. Peu avant qu'elle rejoigne le vaisseau satellitaire, celui qui était devenu son mentor lui avait proposé un poste de premier choix comme assistante. Elle avait accepté et le grand jour approchait.

— Te rends-tu bientôt sur Goa ?

— Le week-end prochain, répondit Mé-Boh, à l'occasion de l'anniversaire de ma grand-mère.

En franchissant l'atmosphère d'Héra, le vaisseau se mit subitement à chanceler.

— Est-ce normal ? s'enquit l'anifah d'une voix aiguë.

Tout ce qui assemblait l'appareil fut pris de tremblements.

— Je ne crois pas, siffla Kendalh entre ses dents.

Une sirène d'alarme résonna, semblable à un long cri strident. Son unique œil exorbité par la peur, Mé-Boh hurla de concert. Cramponnée à son siège, Kendalh sentit son cœur faire un bond fracassant dans sa poitrine. Avec l'impression qu'un pachyderme s'était assis sur elle, elle enfonça ses ongles dans les accoudoirs. Une odeur de brûlé se propagea. Kendalh craignit qu'ils explosent en plein vol ce qui sans être douloureux ne laissait aucune chance de survie.

Et tous ses fossiles qui finiraient en poussière !

Mé-Boh qui n'avait jamais connu l'amour et elle qui ne le revivrait plus !

Plongé dans d'épais nuages, le vaisseau tombait à pic. Cette purée blanchâtre serait-elle la dernière chose qu'ils verraient avant de mourir ? Kendalh chercha l'oxygène qui lui manquait et implora le ciel que ça ne se termine pas ainsi. Les techniciens n'avaient-ils pas prévu assez de carburant ? S'agissait-il d'une défaillance due à leur incompétence ? Ou encore une attaque de pirates de l'air ? Un météore ?

Dans tous les cas, ils perdaient de l'altitude à une vitesse effarante. Du tumulte, Kendalh perçut les pleurs de Mé-Boh et des échanges entre membres de l'équipage semblables à des aboiements furieux. La panique était générale. Kendalh allait périr avant même d'avoir pu cloner une girafe.

La frayeur qu'elle avait éprouvée lorsque Rouck avait fait un malaise n'était rien en comparaison de la peur qui obscurcissait son esprit. Des souvenirs et des rêves s'embrouillaient dans sa tête. Son cœur résonnait dans son crâne. Ses muscles étaient tendus et le reste de son corps aussi flasque qu'un blanc d'œuf.

La visibilité était réduite, mais une chose était certaine : ils approchaient du sol et n'avaient toujours pas décéléré. Depuis le hublot, on discernait des montagnes aux arêtes pointues. Mé-Boh s'agrippa à sa main et elle l'entendit bafouiller dans un sanglot :

— Adieu, Scenti Kendalh.

Ses larmes et sa morve formaient un amas visqueux sur son menton.

Kendalh lui sourit. Pourquoi s'enfermer dans les regrets ? La vie l'avait tant gâtée.

— Adieu, mon ami, dit-elle en acceptant son sort.

Tout à coup, leur trajectoire parut changer. Un crissement métallique leur scia les tympans. Plus que quelques mètres et ils s'écraseraient.

La Nébuleuse d'HéraOù les histoires vivent. Découvrez maintenant