• Chapitre 21•

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Sully me fait deux bises et s'écarte pour me laisser entrer. Je respire un bon coup et une odeur de clope, de beuh et de pizza s'engouffre dans mon nez. Je toussote et rentre complètement dans l'appartement. Une lumière douce et orangée règne dans la pièce qui semble être le salon. J'entends des voix en provenance de ma droite et je me dirige vers là. Je ne parviens pas à distinguer les paroles mais je reconnais quand même la voix de foda, luji et... Lorenzo ! Lorenzo ne me fait pas peur, c'est juste que je ne l'ai jamais vu auparavant et qu'il me semble bien plus inatteignable que columbine. J'ai un mouvement de recul mais je vais quand même dans la même direction. Je frappe doucement sur la porte ouverte , celle de la cuisine, là où presque tout le monde et réuni. Les voix se taisent et tout le monde se retourne vers moi, j'esquisse un faible sourire et balbutie :
- Salut, je suis Selma.
Les visages semblent comprendre et tout le monde se lève pour me faire la bise. Foda, Luji, Chaps (qui est toujours aussi gentil), Sacha, Rico et enfin Lorenzo. Ils m'entraînent tous dans le salon en bavardant entre eux de trucs qui m'échappe un peu. Chaps à une main sur mon épaule et foda dans le creux de mes reins. Ils me font asseoir sur le canapé noir, juste à l'endroit où les deux coussins du canapé se rejoignent. Les gars se calent comme ils le peuvent sur le sofa, certains sur l'accoudoir, d'autre sur le dossier, les pieds touchant presque le sol ou d'autres avec les chaussures sur le canapé. Si ma mère les voyait elle ferait au moins un malaise. Sully et Chaman discutent encore dans l'entrée, je ne peut donc pas me raccrocher à ce dernier. La télé est allumée en mode muet et un épisode de bojack horseman passe.
- Alors Selma, comment ça va ? me demande Chaps en souriant.
Les gars ont les yeux rivés vers moi, je suis un peu stressée mais j'essaie de ne pas le laisser paraître.
J'ouvre la bouche pour répondre mais un bruit de succion me fait taire. La grande porte vitrée qui mène au balcon s'ouvre et Yro en sort, crachant un grand nuage de fumée dans le ciel. Il referme la porte et s'avance dans le salon.
- Salut ! dit-il en me voyant.
J'esquisse un mouvement pour me lever et lui faire la bise mais il se penche vers moi entre foda qui est assis sur le dossier du canapé, ses jambes en contact direct avec mon bras et la tête de luji qui dépasse de beaucoup du pauvre petit sofa qui supporte le poids de 7 personnes.
- Tu vas bien ? me demande-t-il en allant s'asseoir sur un fauteuil à côté de nous.
Il a une voix vraiment douce, peut être même un peu gênée.
- Ouais ça va. dis-je en souriant timidement.
J'entends les voix de Chaman et Sully qui se rapprochent et très vite, Chaman viens s'asseoir par terre, le dos contre mes jambes tandis que Sully se cale sur l'accoudoir du fauteuil de yro.
- Bon, comment c'était le train ? demande Chaps à chaman et moi.
- Selma tu racontes ? me dit chaman en se tordant le cou pour me regarder.
- Euh ok. En gros on est rentrés dans le train et il y'avait un couple de vieux....
- Cons ! m'interrompt chaman. C'était des vieux cons.
- Exactement, des vieux cons de merde. Donc on s'assoit en face d'eux et...
Chaman me coupe la parole une fois de plus et s'exclame :
- Putain mais ces trous du cul de vieux de merde à la con méritent la mort bordel !
- Tu as explosé ton quotas de grossièretés Chaman. lui informe yro.
Nous rions tous et chaman reprends son histoire en imitant à la perfection la voix chevrotante de la vieille.
Je pensais pas Chaman comme ça, il n'est pas imposant, il fait juste des blagues. Il ne s'est pas levé, il ne gesticule pas dans tout les sens et ne cri pas, il est dans le juste milieu. Tout le monde rit quand Chaman finit son histoire et Sully me questionne :
- Comment va Julien ?
Je prends une seconde avant de ma rappeler comment il le connais et lui réponds :
- Bien je crois, ça fait longtemps que je ne lui ai pas parlé.
- C'est qui Julien ? demande yro.
Nous nous échangeons des regards pleins de sous entendus, et rions doucement.
Yro hausse un sourcil et repose sa question.
- C'est l'infirmier qui m'a soigné pendant mes 2 mois à l'hôpital. répondis je, le cadavre de mon rire sur mes lèvres étirées.
Yro lève les yeux au ciel et attrape une poignée de cacahuètes posées sur la table.
- Selma tu veux manger ? s'exclame Lorenzo qui n'a pas ouvert la bouche de la soirée.
- Ouais je veux bien. répondis-je, me rendant compte que j'ai très faim.
Il est 23h 34, nous nous installons dans la cuisine, autour d'une table rectangulaire en faux bois. Lorenzo s'acharne devant un plat de pâtes collées entre elles. Il met du beurre, le fait fondre mais ça ne change rien, yro s'y colle aussi et tout les deux mélangent tant bien que mal l'énorme masse de spaghettis agglutinées les unes aux autres.
Chaman lâche plusieurs soupirs devant les vaines tentatives des garçons. Moi, je ris doucement en profitant juste d'être ici, dans cette cuisine mal éclairée à la tapisserie horrible, en compagnie de neuf garçons totalement incompétents en matière de pâtes.
Au bout d'une bonne dizaine de minutes, les soupirs de chaman se transforment en paroles et il décrète que le plus simple serait d'aller acheter des tacos.
Nous hochons tous la tête, sûrement guidés par la faim. Nous attrapons nos manteaux et sortons de l'appartement.
Dehors il fait froid, bien plus que la nuit à antibes. Malgré ma doudoune bien rembourré qui me donne l'allure du bonhomme Michelin, j'ai le corps congelé. Je fais de mon mieux pour ne pas le montrer mais mon jeu d'acteur est assez peu convaincant. Chaps me sourit et me tend sa veste, en dessous, il n'a qu'un tee shirt manches courtes. J'écarquille les yeux en me demandant comme il fait pour ne pas mourir  sur place, j'essaie tant bien que mal de le persuader de garder son manteau aux teints brunâtres mais il me sort un argument en béton qui me convainc directement :
- Allez Selma !
Je souris et attrape son manteau. Nous passons au dessus d'un pont qui me fait penser au passage dans « le voyage de chihiro » où le personnage principal prend un train sous l'eau. J'arrive presque à imaginer les rails du train magique de l'univers de miyazaki.
Lorenzo allume une cigarette et fais passer le paquet aux garçons. Moi, je suis au milieu du petit groupe, entre chaman et chaps, Lorenzo est en tête, Sully ferme la marche. Nous arrivons devant un petit espace crasseux qui sent fort les frites et le gras. Rico pousse la porte et nous entrons tous. Il n'y a qu'une seule personne, un vieux monsieur qui a l'air perdu, un chapeau vissé sur son crâne dégarni. Il a la peau brune et ridée. Mon cœur se sert en le voyant, il a l'air tellement mal.
Sully me secoue l'épaule :
- Selma ? Tu veux prendre quoi ?
Je tourne mon regard vers l'es grand panneaux lumineux en haut du comptoir.
- Euh un kebab deux viandes tenders, kebab, sauce fromagère et fanta. dis-je machinalement.
L'homme derrière le comptoir hoche la tête et note quelques mots sur un vieux calpin. Les gars continuent de prendre leurs commandes, moi, je me frais un chemin et sors de cet endroit trop petit. L'air froid de début novembre me fouette le visage. J'ai toujours la veste de chaps sur les épaules, je glisse les bars dans lé manches et mets les mains dans les poches. J'y trouve un briquet orange et des papiers comme des tiquets de caisse. Je souris en pensant que je suis vraiment avec columbine, pour de vrai. Je me laisse glisser contre la vitre du kebab et m'assois sur le petite marche froide. La porte s'ouvre et quelqu'un s'approche de moi. Chaman s'assoie à côté de moi et enroule son bras autour de mon épaule. Nous restons comme ça jusqu'à ce que les gars arrive avec nos commandes.

selma de 12 à 28.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant