•Chapitre 22•

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Nous sommes enfin arrivés à l'appartement, les sacs plastiques des tacos et kebabs nous scient les doigts et nous nous dépêchons de les poser sur la table de la cuisine. Nous ôtons nos manteaux que nous posons en vrac sur les dossiers des chaises en bois de la cuisine et ouvrons les boites en polystyrène jaune. Chacun prend son repas et va s'installer dans le salon. Je suis les garçons et m'assois sur le canapé entre Lorenzo et chaman. Certains sont assis sur des fauteuils, d'autres sur les chaises en bois et Sully est même sur la table basse. Nous mangeons rapidement, parlant peu, profitant juste de la chaleur brûlante de la viande et du pain. En moins de 10 minutes, les boîtes jaunes sont vides et les estomacs pleins. Yro réuni les déchets et les mets dans les sac plastique. Foda s'allume une cigarette et Lorenzo sort une petite boîte violette contenant  quelque chose de vert. Je prends une seconde avant de saisir qu'il s'agit de beuh, c'est la première fois que j'en vois en vrai. Il se roule un join en se concentrant, plissant les yeux et sortant un peu sa langue. Il ressemble à un enfant, je trouve le contraste amusant entre Lorenzo qui a une concentration enfantine et le fait qu'il ai cette contraction pour se rouler un joint.
Tout le monde fume, surtout des cigarettes mais certain s'autorisent des pilons. Moi, je les observe discuter tranquillement, ils ont tous l'air tellement...normaux.
- Au fait je dormirai où ? je demande, la question me traversant soudain l'esprit.
- Dans la chambre de chaman. répond Rico.
-Et chaman tu dors où ?
Il hausse les épaules et dit :
- Je sais pas, je verrai.
Je souris doucement, ils m'amusent tous.

Rapidement, tout le monde va se coucher, il est vers 1h50. Il ne reste que moi et Lorenzo, posés sur le canapé, lui fumant une cigarette et moi me taisant.
- Tu es gênée d'être ici Selma ? me demande-t-il d'une voix douce, presque rassurante.
Il est à 1 mètre de moi, les yeux rivés sur mon visage.
- C'est pas tellement d'être ici qui me gêne, c'est plus... je sais pas, ce qui m'a emmené ici, tu vois ?
- Ta tentative de suicide ?
J'hoche la tête et regarde autre part.
- Tu sais Selma, reprend lorenzo, on s'en fout vraiment de pourquoi tu es là.
Je le regarde sans comprendre, je comprends ses paroles mais pas pourquoi il me dit ça.
Il enchaîne :
- Ce que je veux dire c'est que même si ce qui t'as emmené ici est une tentative de suicide, on va pas pour autant te regarder de travers. On s'en fout, tant que tu es dans un endroit qui te plais, c'est cool. Et avec des gens qui te plaisent. Que chaman t'ai aidé était la moindre des choses, n'importe qui aurait fait ça. Ne te sens pas redevable envers nous, sois juste... Toi.
Je reste un long moment sans voix. Je ne sais pas trop quoi dire alors je lui souris juste. Il me le rend et me tend sa fin de cigarette.
- Tu veux la finir ? me demande-t-il.
J'hausse les épaules et prends le bout de cigarette que je mets entre mes lèvres. J'inspire, avale, recrache. Il reste trois taffes que je finis en quelques secondes.
J'ai déjà fumé, mais j'ai vite arrêté pour la simple et bonne raison que je n'avais personne avec qui fumer.
J'éteins le mégot dans une assiette qui sert de cendrier et me réinstalle dans le canapé.
- Pourquoi chaman ? dit Lorenzo, comme un cheveux sur la soupe.
- De quoi pourquoi Chaman ?
- Pourquoi tu as choisi d'en parler à chaman ? De tout ça. éclairci-t-il en faisant un geste vague vers mon poignet.
- Ah... Bon, tu vas entendre un reportage d'une groupie en détresse.
Il rit du nez et me regarde avec insistance pour me dire de commencer mon histoire.
- Bon, déjà c'était ma grande période columbine, donc gros love sur vous. Et j'étais vraiment pas bien, je savais que si j'en parlais pas ça... se finirai mal on va dire. Bref, donc ce jour là j'avais envie...ou besoin, je sais pas, de parler. Mais j'avais pas d'amis et j'en ai pas la masse non plus aujourd'hui d'ailleurs mais bon ça me va comme ça. Donc besoin de parler sauf que personne avec qui parler donc problème. Dans ma tête y a eu une équation et la bam ! Chaman. Je pourrais pas t'expliquer l'équation en question parce que je la connais pas moi non plus. Mais je savais que vous -quand je dis « vous » je pense à columbine- vous donc, comprendriez. Je le savais grace a vos paroles et en particulier celles de chaman qui paraissant plus mélancoliques tu vois ? Je sais pas si tu comprends ma logique.
Lorenzo hoche la tête et demande :
- Pourquoi pas moi ?
- Trop inateignable.repondis-je directement.
Il hausse un sourcil genre « sérieux ? » et souris. Il se rallume une cigarette et m'en propose une. J'hésite un peu mais je dis quand même oui. Après tout, ça n'est qu'une seule clope.
Nous restons à fumer un petit moment, puis Lorenzo dit :
- T'as cool. Enfin quand tu parles et tout ça c'est cool. T'es moins gênée que tout à l'heure et plus... ben... toi même.
Je souris ne sachant que répondre et finis ma cigarette. Lorenzo m'annonce qu'il va se coucher, il me montre la salle de bain et la chambre de chaman puis retourne vers le canapé où il va dormir avec rico. Je n'avais pas compris que pendant tout ce temps, rico était dans la cuisine entrain de faire je ne sais quoi.
Je le remercie, il me fait la bise en me souhaitant bonne nuit et je lui dit pareil. Je me dirige vers la salle de bain en attrapant mon sac qui traînait dans le couloir et verrouille la porte. Je sors ma trousse de toilette, prends ma brosse à dents et me brosse les dents, n'ayant pas forcément envie de garder le goût de la cigarette dans la bouche pendant toute la nuit. Je me nettoie rapidement le visage et enfile mon pyjama : un jogging gris et un gros sweat noir. Je sors de la salle de bain et me dirige vers la porte en bois foncée, celle de chaman. Je pousse et entre dans la pièce. Une faible lueur d'un lampadaire éclaire la pièce d'une lumière orangée, formant de grosses ombres menaçantes un peu partout dans la chambre. Je me glisse doucement entre la porte et le mur et avance à taton pour trouver le lit.
-Allume la lumière si tu veux. me dit la voix endormie et étouffée de chaman.
Je cherche l'interrupteur et là l'ampoule s'embrase. Je remarque que chaman et sur un matelas aux pieds du lit deux places. Il a la tête dans un oreiller bleu très clair, la bouche cachée par la couverture de la même couleur.
- Tu dors pas dans le lit ? je lui demande, un peu gênée.
- Nan je vais dormir ici. me répond-il d'une voix beaucoup trop fatiguée pour que j'ose lui parler de nouveau.
J'éteins la lumière et vais dans le lit, me glissant dans les draps souples.
- Vois parliez de quoi avec Lorenzo ? me demande Chaman.
- De rien d'important, il me demandais pourquoi c'est à toi que je t'en ai parlé de tout ça.
Je l'entends rire et dire :
- C'est parce que je suis le plus beau.
Je ris moi aussi et me retourne dans les draps, fermant les yeux sur l'oreiller de chaman, le nez dans ses draps.

selma de 12 à 28.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant