Chapitre 2

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Cela faisait la dixième fois que Marie-Anne demandait l'heure à sa voisine de table qui commençait à être fatiguée. Cela faisait déjà une semaine depuis qu'elle le faisait à la fin de la journée. Ceci était dû à son impatience de sortir dans la rue après les cours pour guetter le garçon de la dernière qui occupait petit à petit son esprit. Elle espérait le revoir mais n'eut jamais aucun signe de lui. Il ne passait pas devant son école. Certaine fois, elle se disait que son passage n'était qu'un hasard, il n'était pas un habitué de cette rue; ou encore, à cause de l'incident il ne voulait plus passer par là ou pire, le fils du maire s'en était pris à lui.

La cloche sonna enfin à midi. Cependant, le professeur continua à parler alors que les jeunes élèves de Sainte-Thérèse voulaient rentrer au plus vite pour profiter de leur Week-end. Il communiqua à la petite classe, qui protestait, une dernière chose avant de quitter définitivement la salle. N'attendant que cela, elle attrapa son sac à dos - arrangé des minutes plus tôt - et sortit la première à la suite du vieil homme.

À peine arrivée dehors, elle aperçut son chauffeur. Depuis la dernière fois, il était toujours présent une heure plus tôt. Comme d'habitude, elle vérifia les environs mais ne le vit pas. Elle soupira et serra la lanière de son sac, nerveuse.

- Bonsoir mademoiselle, bonne journée ? la salua son chauffeur en lui ouvrant la portière.

- Comme toujours, merci Richard, sourit-elle, essayant de cacher son énième déception.

Elle allait rentrer dans la voiture mais ne le fit. Elle crut pendant une nanoseconde que son cerveau se jouait d'elle. Elle plissa les yeux plusieurs fois. Il était bien et bel là, sur le trottoir d'en face se dirigeant vers le marchand de fresco que des élèves de plusieurs écoles environnaient, comme à chaque fin de semaine. Elle sourit grandement comme si c'était son jour de chance.

- Je reviens, attends-moi, envoya-t-elle en son sac à dos sur la banquette arrière.

- Où allez-vous mademoiselle ?

Elle ne lui répondit pas et traversa la rue sans prêter attention aux véhicules qui circulaient, pour se rendre de l'autre côté. On aurait cru qu'elle allait à la rencontre d'une personne qu'elle connaissait depuis des lustres.

- Mademoiselle ! Mademoiselle que faites-vous ? cria Richard après elle.

Elle n'avait qu'un objectif. Parler avec ce garçon qu'elle souhaitait revoir depuis des jours. Elle fouilla dans sa poche et sortit un billet de 250 gourdes. Elle s'avança près du marchand, se fit une place dans le petit groupe et lui demanda un fresco en parlant assez fort pour attirer l'attention du garçon. Elle réussit et il fut même surpris de la voir. Comme on l'avait déjà servi, il paya puis s'en alla. En repassant ici, il aurait dû s'attendre à apercevoir cette fille bizarre. Elle fréquentait l'école d'en face.

Marie-Anne, remarquant qu'il s'éloignait, se mit à agiter son billet devant le vendeur. Voyant la somme d'argent qu'elle avait, il la servit rapidement malgré les autres clients qui étaient là depuis bien avant. Cela ne manqua de provoquer une pluie de mécontentements. Elle lui tendit l'argent mais ce dernier n'avait pas de monnaie à lui rendre ; le garçon s'éloignait et elle préféra la laisser, ce qui fit la joie du marchand qui la remercia.

- Merci, lui cria Marie-Anne.

Il fit une moue ennuyée, se retourna sans grande volonté et ses yeux tombèrent directement sur le fresco. Elle le tenait mal et ne se rendait même pas compte que le sirop tombait sur le sol et sur sa main.

- Mieux vaut que tu le boives sinon le sirop va salir ton uniforme, lui conseilla-t-il.

Elle le regarda et se pressa de prendre une gorgée en rigolant. Qu'est-ce qu'il y avait de si drôle dans sa phrase ?

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