Chapitre 16

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L'amour est à réinventer.

                                                -Arthur Rimbaud


Je l'ai eue, le temps de regretter, mais pourtant, je ne l'ai pas fait. C'était sortit de ma bouche aussi naturellement qu'un "bonjour". Mon ventre se remua face à ça. Il se tourna vers moi, un sourire en coin. Ses yeux marrons reflétaient de la joie, tandis que son expression faciale était toujours aussi réservée.

-Enfin, je-
-T'inquiète, bébé, c'est rien.

Pas de je t'aime en retour ? J'eus envie de le noyer dans cet étang qui avait déjà faillit prendre sa vie. J'ai simplement haussé un sourcil alors qu'il continuait de contempler la vue à mes côtés.

-Regrettes-tu ce que tu viens de dire ?
-Non, répondis-je.
-Alors je t'aime aussi.

Même si un feu d'artifice explosait en moi, je ne souris pas, restant neutre. Une brise de vent vint souffler mes cheveux et rafraîchir mon visage. Justin s'approcha de moi, posa sa main sur ma joue puis me fixa quelques secondes. Je le regardais, ses yeux pétillants me faisant sourire.

-T'es tout ce dont j'avais besoin.

Il sourit, fit demi tour et commença à rebrousser chemin. Je le suivis simplement, me retournant une dernière fois vers cet havre de paix. Nous retournâmes dans le salon où nous retrouvâmes tout le monde. Nous nous assîmes entre deux mots et les écoutions. Ils parlaient d'éducation, je crois. Je suis trop jeune pour penser à ça.

-Il y a une légende qui dit que les Australiens parlent beaucoup de langues, alors vous parlez sûrement Espagnole ? Demanda Jen.
-Si, fis-je en riant.
-Realmente ? Vraiment ? Questionna Ben.
-Solo un poco. Seulement un peu. Répondis-je.
-An chio' ! Moi aussi ! Cria Kyle.

Je ris.

-Ça c'est de l'italien.
-Ho battuto nelle palle. Je m'en bat les couilles.

Je ris à nouveau, étant la seule à comprendre.

-Je me demandais, Lara, qu'avez-vous fait comme études ?
-J'ai arrêté après le lycée, répondis-je à la question de Bruce, je n'avais pas les moyens de continuer.
-Vraiment ? Demanda Mia.
-Ma mère ne travaillait pas donc nous n'avions pas de revenus, j'ai du me débrouiller pour avoir de l'argent.
-Où était ton père ? Questionna Kyle.
-Il est décédé, fis-je.

Bizarrement, c'était sortit de ma bouche naturellement. Leur mine changea tandis que j'allais relativement bien.

-Je suis déso- commença l'adolescent.
-Non, t'inquiète, c'est bon, répondis-je.
-Donc... qu'avez-vous fait pour vous en sortir ?
-J'ai travaillé pour des types étranges pendant deux ans, puis quand j'ai eu assez d'argent, je suis partie en France.
-Genre... t'étais dans un gang ?

La voix affolée mais admiratrice de Kyle me fit hausser un sourcil.

-Si on veut, oui, fis-je, mais ne fais jamais ça.
-Mais ça a l'air trop cool ! Cria-t-il.
-Ça l'est seulement dans les films.

Mon regard se tourna vers Justin. J'avais oublié qu'il ne savait pas cette partie de ma vie.

-Vous avez... tué des gens ? Demanda Hailey.
-Wow, non ! Répondis-je. Je me suis contentée de tenir une arme dans ma main pour faire comme si.
-Mais... comment vous avez fait pour sortir de tout ça ? Demanda Mia.
-Ils se sont faits embarquer pour prison à perpétuité.
-Et toi non ? Demanda Kyle.
-J'ai fais en sorte de disparaître sans laisser de traces, fis-je.

L'ado ouvrit la bouche, dubitatif.

-Kyle, ne te lance pas dans un truc comme ça, car tu te mets en danger tout autant que ta famille.
-Bien chef.

Il me fit le salut guerrier, un sourire aux lèvres. Justin se leva et quitta la pièce, me laissant perplexe.

-Et... commença Ben, qu'avez-vous fait dans ce "gang" ?
-J'ai vendu des produits illicites, cambriolé des petits magasins, brûlé des voitures, tagué des monuments... Je ferrais tout et n'importe quoi pour ma mère.

Bruce prit la parole:

-Tu sais que je suis ancien policier ?

Mon coeur s'arrêta. J'étais censée faire quoi ?

-Il était agent de sécurité... Corrigea Dane en roulant des yeux.

Je pris un nouveau souffle. Une bouche se glissa à mon oreille, me murmurant quelques mots: "tu devrais aller voir oncle J" me dit Kyle. Je haussais un sourcil, m'excusais à nouveau et quittais la pièce. Je me retrouvais sur le pallier, Justin assit sur un rocking chair, une cigarette entre les lèvres. Je m'adossais contre la rambarde en face de lui. Il ne prit même pas la peine de me lancer un regard et se contentait de fixer un point.

-Quoi ? Demandais-je.

Il prit une longue taffe et mit du temps avant de la recracher.

-Dis moi que si jamais tu pars, ce sera parce que les flics t'auront retrouvés.
-Je n'ai plus de problèmes avec ça, répondis-je.
-Mais ça sera plus facile à encaisser pour moi.

Ma bouche s'ouvrit simplement. J'étais sans mots pour la première fois depuis longtemps. Il me lança un regard de détresse, me suppliant de lui répondre. Je me contentais de fermer la bouche et de fuir son regard.

-Je ne partirai pas.
-T'essayes de te le prouver à toi même.

Il se leva et baissa les yeux sur moi. Il me prit dans ses bras, comme pour s'excuser, et embrassa le haut de mon crâne. Puis il embrassa mes lèvres doucement, laissant des picotements me chatouiller après ce contact. Il me regarda dans les yeux, caressant ma joue.

-Je te déteste, dit-il.

Je ris simplement tandis qu'il me sourit puis retourna à l'intérieur.

Ce type est magique.

-On s'en va, lança-t-il, c'est pas que j'ai une famille oppressante, mais quand même...

Je le suivis dans la cuisine où il fit ses au revoir. J'enlaçais la famille Bieber quand Bruce m'arrêta et me prit à part.

-Nous avons perdu une personne formidable pour en gagner une autre, me dit-il, merci de lui rendre tout ça plus facile.

Je souris, mal à l'aise. Ses paroles étaient douces, pensées, réfléchies, ressenties. Ses yeux émus me touchèrent en plein coeur. Je le pris dans mes bras, enlaçant son corps protecteur. Bruce était une personne formidable, je suis heureuse de le connaitre.

-Nous ferons plus ample connaissance la prochaine fois, continua-t-il.
-Avec plaisir, répondis-je.

Un dernier au revoir à tout le monde et nous voilà en voiture, prêt à partir. Mon regard resta longuement planté sur cette villa qui avait été un lieu de paix et de révélations. Quelques minutes passèrent où mon esprit divagua, je me surpris à sourire, émue par cette journée. Que j'étais faible...

-Merci Justin.

Il me sourit, dubitatif. Je haussais un sourcil.

-Ne pense pas à mon départ, parce que je n'y songe même pas.

Il pencha la tête sur le côté puis regarda la route à nouveau, distant. Il se perdit en lui même, cherchant ses mots. Je le laissais faire, regardant simplement ses expressions changer. Toute cette histoire allait mal se finir.

            Ellipse

Nous étions rentrés vers quatre heure de l'après midi, il est maintenant quatre heure du matin. Je ne l'ai pas vu du reste de la journée. Il est allé je ne sais où, mais j'imaginais qu'il était au bureau, ou chez Harrington. Je restais alors l'attendre, allongée dans son immense lit. Depuis quand attendais-je quelqu'un ?

Je roulais des yeux avant de me frapper de la paume de la main. Le sommeil ne viendrait pas tant qu'il ne sera pas à mes côtés, car sans lui, mes cauchemars reviennent. J'ai besoin de lui, et la dépendance est ce qui tue l'humain. Mais comme on dit: "trouve ce que tu aimes et laisse le te tuer".

Une porte claqua, des chaussures volèrent et un corps s'aplatit dans ce lit. Une odeur de cigare mélangé au whisky remplit la pièce, me faisant plisser le nez. Je tournais ma tête vers lui, son regard posé sur moi. La lumière de la lune filtrée par les stores éclairait son visage endormi.

-Ça va ? Demandais-je.
-Je n'sais pas trop.

Je me contentais d'écouter sa respiration régulière raisonner contre les murs.

-J'ai réfléchis, dit-il, et... nous deux, c'est une mauvaise idée.
-Je sais, répondis-je.

Le fait qu'il me dise ça confirma mes doutes.

-On devrait arrêter, fit-il.

Mon coeur se pinça. Je souris.

-Pas maintenant.

Il sourit et remonta à moi, capturant mes lèvres de ses dents.

-Non, continua-t-il, pas maintenant.

Il embrassa mes lèvres des siennes, engendrant des picotements dans le bas de mon ventre. Puis il s'allongea sur moi, ses cheveux chatouillant mon cou. Mes mains vinrent caresser son dos nu tandis que son souffle chaud s'écrasait contre ma peau.

Tout était calme. Le temps s'était arrêté pour nous laisser profiter de cette paix. Il n'y avait plus de bruit, de lumière, de problèmes. Tout était neutre et paisible. Je fis un rapide bilan de ces derniers mois et me rendais compte que je ne pouvais pas partir, que j'avais des choses à régler sur New York. Dans tous les cas, je ne partirai pas maintenant. Je n'ai pas envie de le quitter.

-Lara ?
-Hm ?
-J'ai vu Harrington dans la rue, dit-il.

Je fermais les yeux.

-Il n'est pas bien, je n'sais pas quoi faire avec lui.
-Je peux toujours aller le raisonner, répondis-je.
-Si c'est pour qu'il te butte, non merci.
-Bieber tient à ma vie ?
-Plus qu'à la mienne, rétorqua-t-il.

Je ris.

-Ta gueule, fis-je.

Il rit à son tour.

-Bonne nuit bébé, dit-il dans un soupir.
-Bonne nuit, monsieur Bieber.

Il s'endormit après avoir ricané. Moi, je ne trouvais pas le sommeil. J'avais un petit ami, une vraie famille, un travail, des amis, des sentiments. La vie est belle.

Merde.

             Ellipse

Je me réveillais, bousculée par une masse. Justin essayait tant bien que mal de s'extirper de sous moi sans me réveiller. Il tirait la langue, concentré. Je ris, le faisant relever le regard.

-Je t'ai réveillé ? Demanda-t-il.
-Oui.
-Tant pis, fit-il, lève ton jolie cul bébé, tu reprends l'habit de secrétaire.
-Super ! Répondis-je ironiquement.

Il rit en soulevant les couvertures d'un coup sec. Les poils de mes bras se dressèrent alors qu'il embrassa ma joue et quitta la pièce pour se rendre à la cuisine. Je partais prendre une rapide douche pour ensuite me vêtir d'une robe cintrée tombant jusqu'aux genoux avec de longues manches et un petit col roulé. Il pleuvait sur New York, alors je ne fis rien à mes cheveux et me maquillais très peu. J'attrapais mon sac et mon téléphone pour me rendre dans la cuisine. Il s'était mit au fourneaux, cuisinant des oeufs et du bacon.

-Je dois y aller, fis-je.

Il haussa un sourcil en se tournant vers moi.

-J'ai quelqu'un à voir, continuais-je.

Son regard changea quelque peu mais il continua:

-On se rejoins au bureau alors ?

Je hochais la tête, l'embrassais puis sortais de l'appartement. Je montais en voiture et traversais rapidement la ville pour me garer devant un immeuble que j'avais peu vu. Je montais dans l'ascenseur. Étage quinze, chambre huit. Je toquais plusieurs fois, attendant une réponse. La porte s'ouvrit quelques minutes plus tard sur un type méconnaissable.

-C'est pas vrai... fit-il dans sa barbe, qu'est-ce que tu fous ici ?
-Harrington, ravis de te voir.
-Dégage Briggs, ta gueule m'insupporte.

Il allait me claquer la porte au nez mais je la bloquais du pied.

-Donne moi cinq minutes.
-Pourquoi ? Pour que tu m'dises que t'as gagné ? Que tu vas le niquer ? Que j'vaux rien ? J'le sais, merci.
-Ce n'est pas l'envie qui manque, commençais-je, mais il s'inquiète pour toi.

La pression sur la porte se détendit. Il se posta entièrement devant moi, sa puanteur me piquant le nez. Il sentait l'alcool et la crasse. Sa barbe cachait sa bouche tandis que ses énormes cernes laissaient penser que ses dernières nuits avaient étées courtes.

-Il ne s'soucit de personne, répondit-il en riant.
-Il a changé.
-Ça j'ai vu.
-Si tu n'arrives pas à l'accepter tel qu'il est maintenant, ça ne s'arrangera pas.
-Tel qu'il est ? Répéta-t-il. Il est finit, tu l'sais aussi bien que moi.
-Au contraire, Harrington, il revit.

Ces quelques mots me firent sourire.

-Il était au bout, continuais-je, mais il a remonté la pante et essaye de refaire son monde après une perte considérable. Mais pour ça, il a besoin d'amour, d'un boulot, de sa famille et de ses amis, fis-je. Il tient à toi et il a besoin de toi. T'as le droit de me détester, mais pas de le laisser seul.

Il resta planté devant moi pendant quelques secondes avant de contracter la mâchoire et fermer la porte sans un mot. Au moins, j'aurai essayé.

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