Chapitre XII

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A pied, le village paraissait bien plus loin. C'était d'autant plus vrai que Hack nous a fait faire un détour pour avancer à travers champ. Le chemin le plus rapide n'offrait pas assez de visibilité autour de nous, et il craignait qu'on se fasse attaquer. Pour accéder à notre nouvelle route, il nous a fallu passer par une zone marécageuse où la visibilité était en fait bien plus réduite. On est tous restés bien groupés, fusils à l'épaule et prêts à partir en hurlant. Des branches basses nous obligeaient à nous baisser, et je craignais à chaque fois que je me redressais de me retrouver nez à nez avec une bête monstrueuse.Phoenix a demandé à Hack s'il était sûr de son coup. Il a répondu avec une de ses réponses trop précises pour être sincère.Un grognement nous est parvenu et l'on s'est tous arrêtés.Phoenix s'est rapprochée de Hack, qui montrait moins son angoisse.On aurait dit un sanglier, ou peut-être un énorme crapaud. Je n'avais aucune envie de savoir ce qui pouvait produire ce genre de son, alors je me suis remis en route en redoublant de vitesse. Les autres ont suivi mon exemple sans hésiter.

Dire que le village était resté le même serait un mensonge. Bien sûr,de prime abord, il régnait le même calme oppressant que lors de notre première visite. La première chose qui a attiré mon regard,pourtant, c'était la fenêtre où j'avais tué le prof quelques jours plus tôt. Avec tout ce qu'il s'était passé, j'avais l'impression que ça faisait une éternité. J'avais besoin de me raccrocher à ce simple événement pour me rappeler que tout ça était bien réel. C'est la Rouquine qui en a parlé avant moi.« Il n'est plus là. » Les autres ont suivi nos regards et ont compris. Il manquait un bras ballant. « Un zombie l'aura emporté. » Hack a haussé les épaules en proposant une réponse qui ne nous satisfaisait pas. Je me suis approché sous la fenêtre. Le trottoir était propre. Il était humide, évidemment,mais je m'attendais à des traces de sang. La neige avait tout effacé ? Le sang avait pourtant la réputation d'être tenace. J'ai fait signe à la Rouquine et elle m'a suivi à l'intérieur. Elle avait vu le corps, elle saurait si quelque chose clochait. Il n'y avait aucune trace de sang sur le plancher à l'intérieur. Si un zombie l'avait traîné à l'extérieur comme le suggérait Hack, il y aurait dû y avoir une traînée. Il n'avait pas neigé à l'intérieur ! La Rouquine m'a fait la courte échelle, puis je l'ai hissée, mais on savait tous les deux ce qu'on allait trouver, aussi fou que ça puisse paraître. Le corps n'était pas là où il aurait dû, avec son regard dément. Il n'y avait pas non plus de sang, de cervelle, oud'esquilles de boite crânienne. Le fou aussi était absent, alors que je me serais attendu à retrouver son cadavre desséché. Lui avait pu partir, mais le professeur ?

« Je l'ai bien tué, hein ?» Je n'étais plus sûr de rien. Si la blessure n'était pas fatale il aurait pu... Non, son crâne avait été pulvérisé, il s'était vidé de son sang. Est-ce qu'il était devenu un zombie ? Quand bien même, qui avait nettoyé derrière ? Dans quel but ? J'ai interrogé la Rouquine d'un regard suppliant, mais je voyais bien qu'elle était aussi perdue que moi. « On a pas pu tous halluciner. Il a bien fallu que quelqu'un tire sur Che, il ne s'est quand même pas fait ça tout seul !» Elle commençait à paniquer, et je détestais ça. Je l'ai prise dans mes bras et ai commencé à lui murmurer des paroles rassurantes. Mais dans ma tête, je me demandais depuis combien de temps la Zone nous affectait. En redescendant, j'ai surpris le regard inquiet de Hack. « Il n'y a rien. Pas de corps, aucune trace qu'il ait jamais existé. » Phoenix a sursauté en apprenant la nouvelle. « Mais... le carnet, vous l'avez bien trouvé sur lui, non ? La carte ? Et Che... » J'ai secoué la tête pour indiquer que je n'en savais rien.

« On doit rester concentrés. On résoudra peut-être ce mystère plus tard, mais pour l'instant il faut trouver un véhicule. Rouquine,mène-nous au garage. » Avoir un plan auquel s'accrocher nous a tous rassurés. Tout espoir n'était pas perdu, du moins pas encore. La Rouquine a mené la marche. Le garage se trouvait un peu à l'écart de la place. La façade était recouverte des plantes grimpantes dont on commençait à avoir l'habitude.

DESabusésOù les histoires vivent. Découvrez maintenant