À la nuit tombée

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Le silence s'était posé dans la maison. Tout semblait calme.

La fête avait été grandiose. Tous les moyens avaient été au rendez-vous. Quelques amis de la famille dormaient même à la maison ce soir. Céleste gardait une saveur douce-amère à l'idée qu'elle-même ne serait sans doute jamais mise à l'honneur ainsi. « Orumbaï... ». Céleste faisait résonner cette douce pensée dans sa bouche... Il lui semblait que ce mot était d'une douce musique et qu'elle l'emplissait de bien-être.

Dans un craquement de lit, Céleste posa ses pieds au sol. La nuit était blonde. Le parquet était presque tiède. Céleste n'arrivait de toute façon pas à dormir. Et elle avait envie de la voir. Encore une fois. Encore ce soir. Céleste ouvrit la petite fenêtre de sa chambre. Avec un luxe de calme et de précautions, elle fit tourner sur ses vieux gonds les volets de bois vert sapin. Elle n'était pas là. Mais Céleste savait où la trouver.

Elle descendit les escaliers de bois, qui craquèrent, comme toujours. Et si ses parents l'entendait, quelle explication pourrait-elle bien donner ? Céleste, pour se donner bonne conscience, pensa qu'elle allait simplement boire de l'eau dans la cuisine.

Elle enfila un manteau dans l'entrée, puis repartit vers la cuisine. De ses pieds nus, elle enfila des sabots de jardin qui traînaient devant la porte de derrière. Elle donna doucement un tour de clef et sortit.

Il faisait froid. Il faisait même très froid ! Il y avait de la neige un peu partout, en taches éparses.

Elle entendait le vent chanter dans quelques dernières feuilles sèches, on ne sait où. De gros nuages noirs glissaient sur un ciel brumeux de verre noir. Tout à coup, elle la vit.

La lune était là, dans sa clarté laiteuse... si pâle, qu'elle semblait fantômatique. Céleste vit surtout son regard. Elle vit ses yeux, les traits silencieux de cette gardienne de la nuit. Sa bienveillance irradiait sur elle, en lui souriant, Céleste le savait. Elle aurait tant voulu la caresser ! Céleste tendit la main vers sa surface, comme pour lui dessiner de l'index un autre visage.

Elle crut entendre un bruit. Mais ce ne devait sans doute pas provenir des alentours. Elle était seule, elle le savait. Non, c'était bien la lune qui lui parlait !

Elle chuintait dans la pénombre, une mélopée tranquille... Céleste, en fermant les yeux, l'entendit résonner en elle...

Je suis de mes filles brutale indifférente

Aux pleurs sourds de nos jours aux crimes de nos nuits

Pourtant fillette, fillette au cœur si lourd

Prend garde au mal qui bruit !

Soudain Céleste sentit une présence derrière elle. « Mes parents, ce sont eux ! » se surprit-elle à penser. Elle se retourna et ce qu'elle vit la glaça d'effroi. Ce n'était pas eux. Mais alors pas du tout. Lune sembla pousser un chant de désespoir.

Et l'esprit de Céleste sombra aussitôt dans la nuit.

Céleste dormait d'un air paisible, comme si la nuit lui donnait des conseils :

« Rien ne peut plus t'arriver désormais. Tout va bien se passer. Papa et Maman, Oncle Fiduce... Sergi et Lucien... Ils ne sont pas loin... » Céleste sembla soudain écouter ces conseils d'une oreille plus agacée. Et pourtant, elle se réveilla en sursaut. Son cœur battait la chamade, elle se sentait moite d'angoisse. Instantanément elle refit le tour de ce qui lui arrivait. Et d'un coup, elle sut.

À moins d'un miracle, ses parents ne la retrouveraient jamais.

Céleste d'OpalescenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant