Chapitre 8

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Le lendemain matin, la femme de ménage s'occupe de Chris puis l'emmène au Salon ; Stanley était là et lisait un journal ; il savait que l'enfant était là depuis hier mais il ne lui accorde même pas un regard. Le petit Chris s'approche de lui et va même le toucher ; là, Stanley fut obligé de relever sa tête plongée dans la lecture de son journal. Dès qu'il vit Chris, son regard s'illumine. Il lui sourit et lui tend les bras. - Viens mon petit, comme tu es beau ! Seul moi comprenait ce qui se passait ! C'est le sang qui parlait ; Oh ! Les liens de sang sont terribles. Certains n'y croient pas et pourtant c'est bien réel. Il y a comme une sorte d'attirance entre eux. Mais Stanley lui-même ne pouvait pas comprendre ce qui lui arrivait. Il prit Chris dans ses bras et commença à jouer avec lui. Je les observais sans mot dire. Depuis l'arrivée de Chris dans notre maison, Stanley a changé ; cela se voit qu'il porte ce petit dans son cœur. Moi-même je prenais soin de Chris comme s'il était mon propre fils. Je ne nourrissais aucune rancœur envers lui. Mes filles l'adorent ; c'est le petit frère de la maison, le coq de la basse-cour. C'est dans cette atmosphère que Chris vivait. Stanley s'est véritablement attaché à lui. Par contre, nos relations Stanley et moi, allaient de mal en pire ; je n'étais pas tranquille ; je me disais qu'il a peut-être une autre « Sonia » en ville et qui sait s'il n'a pas d'autres enfants. Je me refusais pratiquement à lui tout le temps ; en fait, le dégoût a remplacé l'amour. Mais dans tous les cas, comme je l'avais dit, je ne voulais pas aller au divorce pour ne pas déstabiliser l'équilibre de mes enfants. Nous sommes alors dans ce climat quand Stanley de lui-même me parle un soir, trois mois après l'arrivée de Chris : - Ecoute Raissa, la relation entre nous devient invivable ; je ne sais même plus si j'ai une épouse chez moi ; je pense que le mieux serait de se quitter ; - Crois-moi Stanley, si je suis encore là, c'est à cause des enfants ; pour leur équilibre, je pense qu'il vaut mieux qu'on évite cette solution. - On va leur expliquer ; moi je n'ai plus du tout envie de vivre de cette façon ; - Que proposes-tu alors? - Si tout redevient comme avant, je peux reconsidérer ma décision ; - Malheureusement Stanley, tout ne peut plus être comme avant ; tu m'as déjà trahi et je n'arrive pas à oublier. - De quoi parles-tu, Raissa ? Oups ! J'ai parlé trop vite ! Alors que personne ne doit savoir et surtout pas Stanley. Il faut que je fasse attention à ma langue.Alors, je gribouille en guise de réponse. - Oui, tu m'as trahi ; j'apprends en ville que tu as une maîtresse. - Donne -moi les preuves alors. - Je n'en ai pas malheureusement pas. - Alors, si tu n'en as pas, pourquoi le crois-tu ? Si seulement je pouvais lui dire ! Si seulement il pouvait savoir que la preuve palpable, c'est Chris ! Si seulement il pouvait savoir que je sais de quoi je parle ! Malheureusement, pour l'instant, je ne peux rien dire. Il faut dire que j'étais consciente qu'un divorce n'arrangerait pas nos enfants. Et plus que tout autre chose, je tenais à leur équilibre psychologique. Les enfants de parents divorcés sont plus perturbés et plus agressifs que les autres. En effet on remarque qu' ils présentent plus de troubles caractériels. Mes enfants sont trop attachés à leur père. Pour eux, je suis capable d'accepter l'inacceptable. Néanmoins, je demande à Stanley de me donner encore un mois pour y penser. Je ne savais plus comment faire pour que Stanley ne divorce pas ; voilà qu'il dit que la seule condition est que tout redevienne comme avant ; seulement moi je ne le supporte plus. Je résolus d'en parler à mon amie Safiétou pour avoir son avis. Safiétou est ma collègue la plus proche et avec le temps, nous sommes devenues de grandes amies. Safiétou est mariée et a quatre enfants. Elle est pondérée et pourrait peut-être me conseiller. Je me rends chez elle un de mes jours de repos. - Salut Safi ; - Tu n'as pas l'air très gai Raissa. - Je suis dans un dilemme ; - Que se passe t-il. - Avec Stanley, ça ne va plus du tout. - Ah oui ? Mais tu ne m'en as jamais parlé. Que se passe t-il exactement ? - J'ai découvert qu'il m'a trompé ; - Tu l'a surpris en flagrant délit ? - En quelque sorte ? - Et quelle explication t'a-t-il donné ? - Aucune, puisque je ne lui en ai pas parlé ; mais depuis, ce temps, sa trahison m'a pertubé et je ne l'aime plus comme avant ; - Pourquoi ne lui en as-tu pas parlé ? - Je ne préfère pas, pour l'instant. A cause de mes enfants, je ne voulais pas divorcer, juste pour les préserver d'un déséquilibre moral éventuel. - Dans ce cas, où est le dilemne ? - Stanley ne supportant plus mon comportement veut divorcer. Mais si je consens à ce que tout redevienne comme avant, il veut bien abandonner cette idée ; le problème est que moi je ne le supporte plus et tout ne peut plus être comme avant. Je n'ai pas voulu raconter la vraie histoire à Safiétou. Elle est mon amie, mais je ne veux prendre aucun risque. Tout secret partagé n'est plus vraiment un secret ; il faut s'attendre à tout moment à ce que cela se sache. Je ne veux pas me retrouver en prison parce que j'ai fait confiance à une amie. Nous disons nos secrets à nos amies mais elles ont des amies aussi. Et c'est ainsi que de bouche à oreille, le secret se répand. Et puis, si je n'arrive pas à garder moi-même mon secret, comment attendre des autres qu'ils le fassent ? Safiétou soupire un instant puis me répond : - Honnêtement Raissa, si c'est seulement pour l'infidélité de Stanley que tu ne l'aimes plus, je doute fort que tu l'aies jamais aimé ; ne sais-tu pas que les hommes sont des prédateurs ? J'ose croire que l'homme parfait existe mais je ne l'ai pas encore rencontré. On ne brise pas un mariage à cause d'une infidélité. C'est juste le signe que quelque chose d'autre ne va pas. As-tu cherché à savoir ce qui l'avait poussé à faire cela ? Tu aurais dû lui en parler. Les hommes deviennent plus tendres lorsqu'on leur a pardonné une infidélité de passage. Sache que si tu ne l'aimes plus à cause de l'infidélité, la fidélité est la qualité la plus rare que tu trouveras chez un autre homme ; leur penchant pour la nouveauté et l'aventure facile est prononcé ; c'est décevant mais c'est la réalité. - Tu veux dire par là qu'il n'y a pas d'hommes fidèles ? - Il en existe mais par les temps qui courent, c'est rare de les trouver ; on en rencontre parmi les hommes qui croient en Dieu et qui veulent faire sa volonté ; et même là encore, ils ne sont pas fidèles par amour pour leur femme, mais pour plaire à Dieu. Alors, autant que tu prépares ton cœur sinon tu feras un infarctus ! - Ce qui m'a le plus blessé, c'est qu'il fait comme si de rien n'était et comme s'il était très sage. - C'est juste un professionnel ; tu voulais qu'il te le dise ? Moi je trouve qu'il ne veut pas te briser le cœur ; il veut apparaître comme un époux parfait pour toi et son entourage. - J'ai ressenti ce coup comme une haute trahison. - Et moi alors ? Qu'est-ce que je vais dire ? Mon mari est polygame ; cela veut dire que son infidélité est même officielle ; pourtant, je suis là. Ce que je veux que tu comprennes est qu'une femme ne quitte son mari que pour des raisons sérieuses. - Encouragerais-tu la polygamie ? - Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire ; Si vraiment tu l'as aimé, tu devrais oublier cet épisode et donner de la vie à ton ménage. A mon avis, il faut que tu lui en parles. - Et s'il s'avère qu'avec le temps, tu découvres un côté obscur de ton mari, que ferais-tu Safi ? - Cela dépend de ce dont il s'agit ; ce qui est sûr, nous avons chacun un côté obscur et il suffit d'un rien pour nous le faire découvrir. Alors pourquoi condamner l'autre dans ce cas alors que dans la même situation, on aurait fait pire que lui ? - Merci Safiétou, je verrai ce que je peux faire pour améliorer le climat entre Stanley et moi. Honnêtement, la discussion avec Safiétou ne m'a pas été utile ; elle souhaite que je dise à Stanley ce qui ne va pas ; malheureusement, je ne peux dire la vérité à Stanley puisqu' il y a eu mort dans cette histoire et je serai la première suspecte. En plus, j'ai déjà commencé à mentir en disant que le bébé est mort. Mais je ne peux blâmer Safi car je ne lui ai pas exposé le problème comme il fallait. En revenant de ma visite chez Safiétou, je me souviens que j'ai promis à Dame Ayabavi de revenir la voir. Je programme cette visite pour se dérouler un jour de repos. Le jour prévu, je me rends au village chez elle : - Tu en as mis du temps, Raissa ; maintenant que Chris n'est plus ici, tu as cessé de venir ; - Ce n'est pas cela, maman Ayabavi ; il faut dire que j'ai oublié ; - Comment vont tes filles ainsi que mon garçon ? - Tout le monde se porte bien ; voilà, je suis là comme promis. - Tu as bien fait ; en fait, je voulais m'entretenir avec toi ; - Je vous écoute maman Ayabavi. - Raissa, tu sais, j'ai de l'âge et de l'expérience. A mon âge, je n'ai plus rien à perdre ; sache que ce qu'un jeune ne pourra jamais voir debout, un vieillard peut le voir assis. Si mon cœur me parle, c'est que je dois t'aider. Me comprends-tu ? - Oui maman Ayabavi mais où voulez-vous en venir ? - Je veux que tu me racontes la vraie histoire de Chris ; surtout, ne me cache rien. Je suis très étonnée de la requête de Dame Ayabavi. Je garde le silence un instant avant de lui répondre : - Mais maman Ayabavi, je vous ai déjà dit que j'ai accouché sa mère qui est décédée. - C'est l'argument que tu m'as servi ; mais Raissa, je te le demande à nouveau ; que s'est-il réellement passé ? Généralement dans ce genre de cas, l'enfant est confié à un orphelinat ou aux religieux. Mais toi, tu es si gentille, si magnanime que tu as voulu le prendre ! C'est trop beau ; qu'est-ce qui te tracasse vis-à-vis de cet enfant ? De quoi te sens-tu coupable ? Dame Ayabavi a vu juste ; mais je ne voulais partager mon secret avec quiconque, du moins pour l'instant. Mon interlocutrice reprend : - Tu sais, Raissa, la jeunesse est le temps d'étudier la sagesse ; mais la vieillesse est le temps de la pratiquer. Je sais de quoi je parle. Ouvre ton cœur et libère toi. Je ne dis rien, je la regarde puis je baisse les yeux en fixant le sol. Elle met la main sous mon menton pour soulever mon regard vers elle et me dit : - Raissa, je sens que tu es dans une impasse et tu as besoin d'aide. Je pouvais le lire dans ton regard à chaque fois que tu venais voir le petit. Mais je ne voulais pas t'embarrasser en te posant des questions. Je peux aisément deviner que ton âme cache un secret ; ne t'en fais pas ; dis-moi tout ; je garderai ton secret bien au chaud dans mon cœur ; et tu auras l'avantage de recevoir des conseils qui te seront très utiles.

Un si lourd secret...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant