Je fumais sur l'escalier de la Caravane. Mariam étendait le linge de notre petite "villa". En fait on était trois caravane dans le bled. La mienne, celle de Mariam et Djarod, et celle des Yumiko. C'était des japonais. On parlait pas comme eux, parce qu'on comprenait rien. En définitive j'étais bien ici. On s'entraidait tous un peu. Mariam faisait le linge, la dame Yumiko la cuisine, et moi je rapportait des objets volés, de temps en temps, car j'étais la plus téméraire de nous tous. C'était amusant comme vie. Et puis je le rencontra. Lui. C'était un gars plus vieux. Beaucoup plus vieux. Il avait 23 ans je crois. Et moi 16. C'était drôle quand il me remarquait. Il avait fait callé son scooter le jour ou je l'ai vu. Il est tombé en panne. Qu'il avait l'air bête. Je m'ennuyais sans lui. Je me languissais de le revoir refaire des tour de scooter sur la plage. J'avais appris l'italien. Il le fallait bien, j'étais en Italie. Mais quand il apparaissait de derrière la falaise, j'oubliais mon italien. Tout. Il me faisait perdre la raison. Mais c'était amusant. Une fois il est venu plus proche. Il a commencé par dire bonjour. Et j'ai pas suivit. J'avais déjà oublié comment on faisait pour parler. C'est vrai ça, comment on prononce des mots? Une Yumiko connaissait le français, et l'italien aussi. Alors elle chuchota quelques mot.
"Dis lui ça. Il comprendra.
-Sûre?
-Sûre"
Je me rappelai des mots. C'était apaisant, l'aisance avec laquelle je pouvais enfin lui parler. Avec Alex on avait juste des délires cochons. Rien de sérieux.
Il fait chaud. Diego me rappelle l'été. Il a de très grandes mains et il pêche du poisson à main nu. Ses cheveux bruns qui tombent en cascade sur ses épaules sont souvent rassemblés en chignon, et ça lui va très bien, car il est frisé. Une fois, il m'a dit que j'étais jolie. J'avais le visage rouge de coup de soleil et en sueur, mais c'était mignon. Je fume toujours. Mariam et ici, et moi juste à coté d'elle, sur le toit de la caravane.
"Arrête de fumer."
Je retire ma clope, serrée entre mes lèvres, et jette mon regard de son côté.
"Pourquoi?
-C'est nocif. Tu vas attrapé la mort."
Mariam a toujours cru que la mort était une sorte de maladie, ou une infection de ce genre. C'est naïf, mais elle n'a pas étudié beaucoup de chose.
"Je m'en fou, j'aime fumer.
-Pourquoi?"
Quelle question? C'est mignon de s'inquiéter pour moi, mais moi, je fume, je bois et c'est comme ça depuis trop longtemps pour s'en soucier dès maintenant.
"C'est dommage.
-Désolée, Mariam."
Djarod faisait un barbecue. Je l'avais prévenu qu'il allait pleuvoir, mais bon il n'écoute rien celui là. C'était un homme têtu, et ici on disait que c'était ceux qui méritait les femmes. Et les femmes, elles, devaient être très obéissantes, et uniquement à leur mari. C'est pourquoi Mariam disait toujours oui à Djarod, surtout quand il voulait lui faire l'amour. Elle était discrète et ne manisfestait pas vraiment ses émotions, mais je savais qu'elle avait mal au cœur et au corps à force de faire semblant de se complaire dans cette relation. Une fois, elle a pleuré. Elle n'en pouvait plus. Je fumais encore, même si je savais à quel point ça lui déplaisait de voir ce tabas enroulé au bout de mes lèvres.
"So.
-Oui?
-Aide moi."
Elle n'avait aucun plaisir avec lui, aucun, et elle ne trouvait alors pas ça juste. Tout le monde dormait. C'est au milieu des lucioles, de la fumée et des sanglots qu'elle s'exprima.
"Djarod.
-Oui?
-Je le hais."
Elle parlait comme une enfant. Sa naïveté en témoignait clairement.
"Je ne veux plus être avec lui."
Elle avait du mal à l'aimer encore, avec ce plaisir qu'il lui obligeait à avoir, alors qu'elle n'en voulait pas. Elle commença à l'insulter, libéré de ses chaînes qui l'empêchaient dans parler.
"C'est un con, un pervers, un type exécrable. Jamais de bonne humeur, sauf quand il me prend, là il est heureux. Mais moi pas !"
C'est là que je compris la nature de leur relation. Je lui proposa un truc un peu farfelue.
"Écoute, Mariam.
-Oui?
-On va partir toutes les deux."
Elle équarquilla les yeux et afficha un léger sourire.
"Partir? Partir ?
-Oui, loin de Djarod, de tout ça, de toutes tes souffrances.
-C'est si excitant !"
J'alluma la radio régional. La météo nous informait qu'une vague allait s'abattre sur la côte, et que les inondations allaient être fréquentes demain matin. Son excitation s'évapora d'un seul coup, je savais à quel point ça la décevais de voir ce plan tout juste tissé se démêler d'un coup.
"On peux partir dès ce soir si tu le souhaite."
Ça me faisait mal de partir loin de Diego, des Yumiko, et du barbecue fumant au bord de la plage. Alors je voulu ramener un souvenir. Je sortit du caravane, et je sauta vers un arbre fruitier. Je fis une espèce de geste de basketteur et je chippai un fruit d'une branche. Il était tout jaune, c'était une sorte de citron, mais un peu plus gros, et plus orangé. Un hybride, peut être. Je le garda dans la glacière, et Mariam et moi le surnommâmes "Fruit de l'Italie", c'était un joli nom. Alors que j'allumais le moteur, elle posa sa main sur la mienne, et se saisi d'un sentiment atroce et soudain, comme si elle venait de réfléchir en un temps record.
"Non, je ne peux pas.
-Quoi?
-Je veux rester avec lui."
Sur le coup je la trouvais un peu folle de choisir ça. C'était quelque chose de terrible que de rester avec un mari toxique, alors je tentai de la raisonné.
"Tu es folle Mariam, il est mauvais pour toi, et tu le sais, non?
-Oui, mais, je l'aime. Vraiment Sonia.
-Si tu le dis.
-C'est un amour qu'on ne peut comprendre qu'après y avoir goûté. On y reste accro toute notre vie, et on en paie le prix. C'est tout."
Je la laissa faire sa décision. Je la serrai une dernière fois dans mes bras, et elle susurra un dernier mot.
"Pense à moi quand tu mangera ce fruit, je ne veux pas que tu oublie l'Italie.
-C'est promis."
Elle sorti de la voiture et rejoignit sa caravane, en me regardant une dernière fois, pendant que je m'éloignais de l'Italie, embarqué dans ma petite roulotte de fortune, qui, je le savais m'emmènerai bien loin.
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La dernière seconde - Inondation
NouvellesLe monde se retrouve brutalement renversé par une inondation soudaines dû à la fonte des glaciers. La plupart des continents se retrouvent ainsi sous les eaux. Une jeune fille, Sonia, va faire de ce carnet son journal d'expédition, pour y raconter c...