Chapitre III

19 3 0
                                    

"Alors, profitant de ma faiblesse, la folie s'immisça dans mon âme, ma tête, mon esprit."

C'est un jeune homme aux cheveux de blé qui retrouve Miana. Il la regarde tout d'abord apeuré, mais l'adolescente répète en boucle.

- Je ne suis pas folle. Je ne suis pas folle.

Le jardinier la regarde, plaqué contre un arbre. Quand enfin il ose entrer dans son champ de vision, la jeune fille arrête aussitôt son ostinato incessant.

- Bonjour jolie primevère !
- Eh ! Mathys ! Tu as pu te libérer finalement ?
- Comme tu vois !

Je saluai mon ami puis nous commençâmes à nous occuper du jardin en bavardant. Il fallait bien que quelqu'un le fasse lorsqu'à la fin de l'année, les sixièmes abandonnaient le professeur de biologie. Soudain, un couinement se fit entendre. Je me précipitai vers la cabane en bois -l'endroit d'où provenait le bruit-. Un berger allemand noir avait la patte coincée dans... Un piège à renard ? Je me précipitai vers la pauvre bête.

- Eli ! Mais qu'est-ce que tu fiches ici bon sang ?

J'essayai d'écarter le piège sans succès. Je savais que j'auraissuivre un peu plus les cours de musculation au lieu de soulever des altères seulement lorsque le professeur tournait la tête dans ma direction. Heureusement, Mathys arriva.

- Qu'est-ce qu'il se passe ?
- Eli à la patte coincée là-dedans ! D'ailleurs pourquoi c'est là ?
- C'est le chien de...
- Oui.

Miana n'arrivait pas à se souvenir de son maître. Mais pourquoi ?

Le visage de Mathys s'était rembrunit. Cependant, il écarta les dents de fer pendant que je sortais délicatement Eli. Puis, mon jardinier préféré parti chercher de quoi soigner la pauvre bête pendant que je la rassurais de quelques caresses et mots doux. Le jeune homme revint avec des bandages, de l'alcool à 90° et même une sorte de bâton qui pourrait servir à faire une attelle. Je le remerciai et commençai les soins.
Tout d'abord j'imbibai mes mains du puissant désinfectant. Je grimaçai de douleur quand celui-ci toucha mes doigts abîmés à force de ronger mes ongles et mes peaux. Puis je fis couler des gouttes le long de mes doigts qui s'écrasèrent sur la blessure. Les gémissements du berger allemand me fendirent le cœur. Je versai un peu d'alcool sur le tissus et entourai la patte d'Eli.

- On n'aura pas besoin d'une attelle cette fois mais merci d'y avoir pensé.
- Ah oui c'est vrai ! C'est pour une patte de cassée ou foulée.
- Oui c'est ça !

À l'aide de Mathys, nous installâmes Eli dans la serre en attendant que son maître se souvienne qu'il venait souvent ici. Cela ne manqua pas. Quelques minutes plus tard, une voix maintenant familière retentit.

- Eli ! Où es-tu ?

« Comme s'il allait te répondre » pensai-je.

Le souvenir de Miana se coupe net. La jeune fille se redressa brusquement.

- Mathys ?
- M-Miana ? Ne m'approche plus !
- Je... Je ne suis pas folle hein ? Hein Mathys ?

Le jeune homme explose. Comment peut-elle oser le regarder ? Comment peut-elle se prétendre parfaitement saine d'esprit après ce qu'elle a fait ?

- Si Miana ! Tu es un monstre ! Une vrai cinglée ! Tu es folle à lier !

La respiration de la jeune fille se bloque. Mathys. Il n'est pas comme ça dans son souvenir. Il était beaucoup plus gentil. Celui-ci fulmine en son for intérieur. Il se précipite vers la serre la gorge serrée.

J'étais folle de rage. Il m'avait fait ça ! Il avait osé jouer avec moi ! Comme une vulgaire marionnette en toile ! Je la sentais. La folie. Je la sentais monter en moi. Non ! Je devais me battre ! Ce n'est pas un abruti comme lui qui allait m'embrumer dans des idées haineuses et psychotiques. Hélas, encore une fois, j'entendis les gémissements maintenant routiniers d'Eli qui c'était de nouveau fait mal. Le souvenir de son maître refit surface. Il était impossible pour moi de la combattre une seconde de plus. Elle était trop forte, trop insistante. Alors, profitant de ma faiblesse, la folie s'immisça dans mon âme, ma tête, mon esprit.
Quand je le vis, les deux pattes arrières prisent dans ce fichu piège, je n'étais plus moi-même. Je ne voyais plus que de la rage. Je le haïssais. Non, pas Eli. Et pourtant c'est lui qui fut frappé en premier par ma défaillance. Je ne le voulais pas. Pourtant j'ai resserré encore les dents de fer qui s'enfonçaient un peu plus dans la chair de la pauvre bête qui poussa un hurlement.

- On va voir si ton maître aime aussi te berner !!

Quand Mathys arriva, alerté par les cris, c'est mes yeux habités par un éclat bestial qu'il vit en premier. Et il comprit. Il savait qu'il ne ferait pas le poids seul face à une folle enragée. Alors que je continuai de torturer le pauvre chien, Mathys revint, livide. Une silhouette se matérialisa à ses côtés. Eli était tombé déjà depuis quelques minutes. La douleur avait été si forte qu'il avait préféré tomber dans les vapes le temps qu'on vienne le sortir de cet enfer. Une fois que j'eus retrouvé mes esprits, j'eus envie moi aussi de faire de même mais, cela ne se passe jamais comme dans nos plans. C'est bien connu.

Miana lâcha un cri d'horreur. Qu'avait-elle fait ? Comment Eli allait-il ?
La malade pénètre dans la serre déduisant que Mathys avait rejoint quelque chose en lien avec le crime qu'elle avait commis. Elle n'est pas déçus du spectacle.
Le jardinier est recroquevillé contre un immense chien noir. Celui-ci paraîtrait menaçant s'il n'y avait pas deux roues qui remplaçaient ses deux pattes arrières.
Quand Miana s'approche de lui, doucement, comme elle l'avait toujours fait avant, Eli grogne et montre les dents. Il semble prêt à bondir sur elle malgré son handicap. Le bruit de moto se refait entendre mais la jeune fille ne le perçoit pas. Elle est tétanisé. Comment a-t-elle pu.

- C-c-c'est moi qui lui ai fait ça ?

- Ne l'approche pas ! Tu ne crois pas que tu as déjà fait assez de mal Miana ? Retourne dans ta cellule ! Depuis que tu es partie tout a changé ! Ce n'est plus le monde que tu as connu !

Mais qu'est-ce qu'ils veulent dire à la fin ? On dirait que c'est de sa faute si tout a changé ! A-t-elle fait des horreurs pires que celles-là ? Jonathan et Eli ne seraient donc pas les seules victimes de sa maladie ? Elle sent une présence derrière elle. La blonde se retourne doucement, terrifiée par ce qu'il pourrait lui arriver encore. Le jeune homme aux cheveux auburn se tient devant elle, les yeux flamboyants. Ils brillent d'une lueur menaçante qui ferait défaillir jusqu'à l'homme le plus recherché d'Interpol. Elle recule avant de se rattraper sachant que le berger allemand est derrière. Elle est coincée. La seule chose que la jeune fille arrive à articuler surprend les deux lycéens.

- Qu'est-ce que j'ai fait de mal ?

Folle à LierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant