Chapitre XXII

10 3 0
                                    


"Je t'aime."

- Tristan.
- Monsieur.
- Je t'ai déjà dis de m'appeler Dimitri bon sang.

Le rebelle lui fait un petit sourire puis s'installe dans son bureau. Lorsque le médecin est assis en face de lui, il lui annonce une pointe de fierté dans la voix.

- Tu ne devineras jamais.
- Quoi ? Vous avez envoyé une lettre au président ?
- Non, mieux.
- Il vous a répondu.
- Tu n'y es pas du tout.
- Et bien allez-y. Crachez le morceau non ?
- Aujourd'hui, dans exactement un quart d'heure.
- Quoi ? Une autre émission de radio ? A moins qu'on ne passe à la télé cette fois.
- Veux-tu arrêter de me couper s'il-te-plaît sinon c'est moi qui y vais.
- D'accord d'accord. Qu'est-ce qu'il y a ?
- Miana est libre.

Il y a une minute de flottement pendant laquelle Tristan cherche une quelconque caméra cachée, n'y croyant plus. Comprenant qu'il a réellement réussi, il s'exclame.

- Sérieusement ? Comment avez-vous fait ?
- J'ai menacé d'attaquer le centre de détention en justice pour méthodes douteuses s'ils ne libéraient pas Miana dans l'heure.
- Oh bordel. Je n'arrive pas à y croire. Purée, vous êtes un génie.
- C'est ça et toi le génie de la vulgarité. Aller, vas vite la rejoindre.

Le rebelle se lève vivement. Manquant de se casser la figure il court tout en appelant Thibault.

- Tristan ? Ton rendez-vous avec Dimitri s'est bien passé ?
- Rendez-vous au skatepark dans vingt minutes. Amène les autres.

Sans laisser à son ami le temps de répliquer, il raccroche et continue sa course à travers les couloirs, se fichant bien des protestations du personnel. Il sort dehors et traverse le périphérique avant d'enfin arriver devant le centre. Elle est là, un sourire de pur bonheur accroché aux lèvres, les yeux pétillants de joie. Elle arbore la même tenue qu'il y a environs deux mois. Une tee-shit marinière, une salopette short dont elle n'a enfiler qu'une bretelle sur deux et des baskets basses blanches. Ses cheveux ont encore poussés, laissant enfin apparaître leurs premières boucles.
Tristan, un grand sourire aux lèvres, ouvre les bras. Miana court et saute, se pendant à sa nuque en l'embrassant fougueusement. Elle avait décidé de dire tout à Tristan. Mais pas maintenant. Elle le sert de toutes ses forces. Elle n'avait jamais aussi bien mangé hier. Elle voulait pouvoir marcher toute seule. Elle avait dansée. Au début en tombant, manquant de force. Puis ensuite mieux, jusqu'à parfaitement réussir et même finir la chorégraphie qu'elle avait dessinée sur les murs de sa cellule.
Maintenant elle est là, dans les bras de son bien-aimé. Ils sortent main dans la main. Puis Miana découvre les premiers mouvements du phénomène portant son nom. Les affiches, les tags. Et enfin le portrait d'elle sur la grande place. Tristan lui explique tout au fur et à mesure. La voix encore cassée, Miana s'exclame qu'ils sont fous d'avoir fait tout ça. Riant, Tristan lui répond.

- Pas autant que toi.

Elle lui tire la langue riant avec lui.
C'est Clara qui aperçoit Miana en première. Elle hurle en se précipitant sur son amie la serrant dans ses bras comme jamais. Puis vient le tour d'Erinne. Un tcheck pour Morgane, un sourire pour Laure et de longues accolades avec les garçons. Puis les gens présents se rapprochent. Ils ont tous reconnus Miana. Tout le monde veut savoir comment cela se fait qu'elle soit libre. Finalement, Miana décide de faire une grande fête au manoir. Elle tient à remercier tous ceux qui l'ont aidée à sortir de sa prison.
La nouvelle est très vite publiée sur les réseaux sociaux. La jeune fille est un peu gênée. Elle n'est pas habituée à recevoir tant d'attention.
Enfin, Miastan et leurs amis décident de repartir au domaine. Lorsqu ils arrivent, quelqu'un d'inattendu les attend.

- Tiens, voilà notre fille.

Edward, le visage réellement heureux, pousse Camilla en fauteuil roulant au bord des marches de marbre. Le visage de la jeune fille perd toutes ses couleurs. Le vieil homme continu.

- Cela peut paraître fou mais ils ont jugé que ta mère était en parfaite santé et ils l'ont laissée partir.
- Bonjour ma chérie. Ça fait si longtemps.

Miana a un mouvement de recul. Ses amis ne comprennent pas. Tristan s'avance menaçant vers Edward.

- Vous lui faites peur. Reculez espèce de...
- Tristan ! Je t'ai connu plus respectueux.
- Bonjour madame. Votre mari n'est pas celui que vous croyez, sachez-le.
- Qu'est-ce qui te fais dire cela ?
- Les marques sur le corps de Miana.

Camilla soupire légèrement. Miana, elle, se rappelle de tout maintenant. Et notamment des talents de comédienne de sa mère. Inès en avait hérité, pour son plus grand malheur. La femme murmure avec un sourire qui pourrait paraître bienveillant mais qui, pour Miana, est surtout cruel.

- Ma Miana. Viens, je ne t'en veux pas.

La jeune fille se recule encore plus, la peur se lisant dans ses yeux. Clara demande.

- Nana ? Ça va ?

La gorge serrée, elle fixe ses amis, pleine de détresse. Cette femme la terrifie. D'ailleurs, le regard de celle-ci se durcit. Elle dit menaçante.

- Miana ça suffit. Je suis ta mère. Tu sais bien que je ne te ferais pas de mal. Je peux comprendre que tu sois encore fragile mais tout de même.
- Madame, avec tout le respect que je vous dois, nous voyons tous que Miana n'a vraiment pas l'air bien. Peut-être serait-il préférable de revenir demain. J'ai cru savoir qu'elle ne dormait pas beaucoup là-bas.
- Thibault, toujours aussi gentleman. Tu as raison. Nous reviendrons demain n'est-ce pas chéri ?
- Oui bien sûr. Oh et, je n'ai jamais levé la main sur mes filles.

Le couple remonte dans la voiture, Camilla lançant un regard méprisant à sa fille alors que les autres ont le dos tourné. Lorsque le véhicule a disparu, Miana s'effondre.

- Mimie, tu dois nous le dire maintenant. Edward n'a pas le droit de te mettre dans cet état.
- Ce n'est pas mon père.

Elle lâche cela d'une voix inaudible. Les autres ne l'entendent pas. Erinne continue.

- Oui. On doit aller au commissariat porter plainte. Ça ne peut plus durer.
- Ce n'est pas lui putain.

Tout le monde sursaute. Ce n'est pas tous les jours que Miana dit de telles grossièretés. Tristan la regarde et bégaye.

- P-pardon ?
- Ce n'est pas mon père. C'est elle. Voilà depuis que je suis sortie que j'essaie de te le dire.
- Ta mère ? Ta propre mère ?

Ils la fixent tous. Ils pensent depuis tellement de temps qu'elle s'entend bien avec Camilla. Mais ils ont cru cela sous prétexte qu'elles se ressemblent et aiment toutes les deux la danse.
Alors, à ce moment là, personne n'aura vu Tristan aussi sérieux.

- Bon. On va aller au commissariat. Il faut que cela s'arrête Miana. On va aller porter plainte. Elle va payer.
- Non. S'il-vous-plaît non. Je n'y arriverais pas. C'est ma mère. Elle m'a donnée la vie vous comprenez ? Je vous en supplie.

Elle pleure. Elle ne veut pas. Cela serait trop dure. Arthur lui prend les mains.

- Miana, Miana ! Calme-toi. Tu veux vraiment qu'elle reste dans la nature ? Elle pourrait te refaire

du mal. C'est ça que tu veux ? Qu'elle te terrifie jusqu'au bout ? Miana tu ne te rends pas compte mais c'est grave ce qu'elle a fait. C'est très grave. Regarde dans quel état elle te met, ce que tu as fait à cause des violences qu'elle t'infligeait. Si tu veux, on n'est pas obligé de tous y aller. Je pense que les autres comprendraient si tu veux qu'une seule personne t'accompagne.
- Non. Venez tous.

C'est ainsi qu'ils se retrouvent tous devant le commissariat. Tristan est derrière Miana, la tenant part la taille. Il murmure doucement.

- Tout va bien se passer.

Il embrasse sa compagne sur le front. La jeune fille murmure.

- Tristan.
- Oui ?
- Tu seras toujours là pour moi ?
- Toujours.
- Alors il faut que tu saches que, elle reprend sa respiration. Je t'aime.

Tristan ne montre rien. Pourtant, il a envie de sauter partout. Après deux ans d'attente, plus ou moins volontaire, elle lui a dit. Enfin.

- Moi aussi je t'aime.

Puis ils avancent tous ensemble, soutenant Miana. Ils savent que ce qu'elle s'apprête à faire est l'une des choses les plus difficiles au monde. Mais il le faut, pour son bien.

Folle à LierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant