Le destin d'Amina

Chapitre 12

<<Ganaw yaw gueumo loudoule khaliss bou yomal khiyamé fékhél mou dialé la.>>

                Youssou Ndour

Malick bien calé dans la voiture qu'il conduisait, une JEEP dernier cri!! Un enfant de leur voisinage avait accouru pour lui ouvrir le portail. Lentement il introduisit le véhicule dans la maison et l'arrêta au milieu de la cour. Le bruit du moteur était si discret qu'il se confondait au murmure du vent.
La démarche vive, les épaules hautes, le nouveau millionnaire ajusta son "" trois pièce "",tout blanc qui balayait la cour, un petit "" copati""( chéchia) rouge posé sur le crâne, des babouches rouges assortis à son copati  et sortit du véhicule le pas autoritaire.
Accoudée à la fenêtre , Amina fronça les sourcils en voyant un spectacle aussi inattendu. Son mari est le connaissait assez bien n'en ratait jamais une . Elle quitta son observatoire pour aller à sa rencontre.
_ A qui est cette voiture? Lui lance-t-elle.
_A nous , répondit Amina d'un air gai comme si cette nouvelle allait de soi.
_comment <<à nous?>>
_Nous l'avons achetée.
La femme la regada avec stupeur.

_Attends, attends , c'est ce que tu veux faire avec l'argent ça, Malick ? Tu ne peux pas faire ça, tu...

Elle n'osa pas finir la phrase. De ses yeux presque humides , elle se contenta de lui jeter des œillères enflammées

_Malick, articula t-elle, je n'ai pas subi toutes ces souffrances pour que tu fasses de l'argent  ce que tu veux.

_Tu te trompes, ma chère, répondit le mari en' affectant un air sérieux, je fais ce qui est bon pour la famille. Et tu ne veux pas me le reconnaître.

Amina était désespérée. Elle ne savait plus quoi penser de l'attitude de son' mari si inconscient. Comment comprendre qu'avec tous les problèmes auxquels le foyer était confronté, il puisse aller acheter une ferraille juste que parce que ça fait chic de se balader en voiture. Comment comprendre qu'après qu'il l'ait poussé à commettre l'adultère, il puisse disposer de l'argent comme si c'était sa propriété ? Ah , malheureux mangeur d'oeuf qui ne se soucie nullement de la douleur de la poule quand elle pond!

Mais Malick se moquait de ce que sa femme pouvait penser de lui. C'était lui ,le maître de maison. Lui , et personne d'autre , qui pouvait décider de ce qu'il fallait faire des 30millions de francs.
( mbindeff bouy dounde ci kaw souff meu nou ko téré lèk khaliss same)
D'ailleurs ,il avait l'esprit ailleurs.
Ailleurs , peut-être chez ses nombreuses pétasses.
Ou dans ses prétendues affaires. Car , il s'était fait confectionner une carte de visite sur laquelle était mentionné son métier d'homme d'affaires, représentant de marques aussi inconnues et farfelues. En ajout ,il avait mentionné <<concessionnaire de voitures d'occasion, directeur adjoint du parc auto Magic SARL>>. Sur la même carte , des numéros de téléphone s'alignaient à l'infini.

Brusquement, il plongea la main dans la poche et en sortit un trousseau de clés. Furieusement, il les agita en tous sens comme pour dire qu'il en avait assez des réflexions de sa femme.

_Cette est la chose la plus grande qu'on ait pu avoir ,fit-il. Tu devrait me remercier d'avoir eu cette idée.

_T'en remercier ? Rétorqua Amina , parce qu'investir dans la ferraille , c'est une idée géniale ?

_Tu n'es qu'un rabat joie, toi, conclut-il. Tu es incapable d'apprécier les bonnes choses. ( Khamo lou bakh!)
Il se retourna , dégagea aussitôt un pan de son grand boubou et se dirigea vers la sortie.
Amina ne pouvait plus bouger, ni ajouter un mot. Debout au milieu de la pièce, la respiration coupée, elle le vit s'éloigner. Il fit chanter de loin la voiture en le système électronique, ouvrit  la portière et s'installa à bord.
Le moteur émit à peine un ronronnement avant de démarrer. Le véhicule s'élança sans attendre. Il se perdit dans la circulation.