CHAPITRE 2

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Nous sommes à présent derrière un muret, juste à quelques mètres de la médiathèque.

  - Alors ?

  - La voie est libre, me répond Anaëlle.

Je lève la tête au-dessus du muret et, effectivement, il n'y a pas l'ombre d'un surveillant.

  - Vite, on y va !

  - Mais je te préviens, pas plus de cinq minutes ! Je n'ose même pas imaginer ce qui arriverait si on se faisait prendre ! Et en plus il faut qu'on soit rentrées dans la salle des inscriptions avant que ce ne soit terminé, sinon c'est fichu.

  - T'es vraiment une peureuse, Anaëlle, me moquai-je.

  - Non, c'est juste toi qui fonce tête baissée, sans réfléchir aux conséquences.

Bon, j'avoue, elle a raison. Mais je ne l'avouerais pour rien au monde.

  - Allez, c'est le moment, allons-y ! dis-je en voulant me redresser, mais Anaëlle plaque une main sur ma bouche et tire mon bras pour me forcer à me rebaisser de son autre main.

  - Chut !

J'entends des bruits de pas juste à côté. Je n'ose même plus respirer. De toute façon, même si je le voulais, je ne le pourrais pas, car la main d'Anaëlle est toujours plaquée sur ma bouche.

Les pas se sont éloignés, mais Anaëlle veut attendre encore un peu avant de tenter quoi que ce soit. Je ne proteste pas, car, juste avant, si elle n'avait pas été là, je me serais faite prendre comme une imbécile. C'est un peu comme ça que l'on fonctionne : elle tempère mon "impulsivité", comme elle aime qualifier mon caractère, et je fais en sorte qu'elle s'affirme et qu'elle soit moins timide. On se complète quoi. En plus, on a les mêmes goûts, et surtout une passion commune pour... Percy Jackson. Je souris rien qu'en pensant à nos délires. On va même jusqu'à imaginer que nous sommes des demi-dieux, mais même si au fond j'aimerais y croire, je sais que ce ne sont que des histoires complètement fausses.

  - Je crois que cette fois-ci c'est bon, annonce Anaëlle.

  - Allons-y !

Nous courons furtivement vers la médiathèque car nous sommes à découvert, j'ouvre rapidement la porte et nous nous faufilons à l'intérieur. Ouf.

  - Allez, dépêchons-nous ! lançai-je à Anaëlle. Plus vite on sera parties et mieux ce sera ! Je le sens plus trop...
Elle hoche la tête et se précipite vers un ordi pour l'allumer. Allez, plus vite...

L'ordi s'allume enfin. Fébrile, j'ouvre la boîte du DVD et dois m'y reprendre à deux fois pour le mettre dans le lecteur.

Soudain, des coups retentissent à la porte.

  - Sortez de là tout de suite !

Et merde...

Anaëlle me foudroie du regard, en mode "c'est-ta-faute-je-t'avais-prévenue" et je lève les bras en l'air pour lui signifier que je me rends.

Pendant ce temps, le DVD s'est lancé tranquillement et je clique sur le test.

  - Camille, on n'a plus le temps !

  - On n'a pas fait tout ça pour rien ! je m'exclame.

Première question : tu regardes un  documentaire sur les animaux marins. Je clique sur le smiley "je m'ennuie".

  - SORTEZ MAINTENANT !

Les coups sont de plus en plus forts. Il va finir par casser la vitre...

Je me lève pour fermer le volet de la porte. J'aperçois le frappeur : c'est Paul, le nouveau surveillant que tout le monde adore. Sans aucun scrupule, je laisse tomber le volet sur son nez, et je l'entends crier de douleur. Oh mon dieu, je viens de fermer un store sur le nez d'un surveillant alors qu'on s'est échappées en douce des TAP, je vais me faire défoncer.

Anaëlle applaudit dans mon dos.

  - Bravo ! Tu viens d'aggraver notre cas, je ne pensais même pas que c'était possible.

Je hausse les épaules.

  - De toute façon, je ne l'ai jamais aimé, ce Paul.

Vite !

Deuxième question : tu viens de recevoir le dernier smartphone doté des dernières technologies. J'opte pour le smiley "trop content".

  - Camille, sortons d'ici avant qu'il ne soit trop tard !

Je réponds encore à trois autres questions débiles (ton voisin a été frappé par la foudre), puis le résultat charge.

Je me retourne vers Anaëlle. Elle est en train de souffler, la tête entre les mains et le nez plissé. Je l'entends marmonner :

  - Pourquoi ai-je accepté, pourquoi ai-je accepté...

Paul a dû se relever, parce que je l'entends taper rageusement la porte à coup de pied.

  - SORTEZ !

Je secoue Anaëlle.

  - Allons-nous en, tant pis pour le quiz !

  - C'est maintenant que tu te décides ?
Je soupire.

  - Ça va, je pensais qu'on aurait le temps de partir.

Je regarde autour de moi. Il n'y a pas d'autres issues hormis celle qui est en train d'être fracassée par ce cher Paul, réputé pour sa patience et sa gentillesse.

  - On passe par où ?

  - Je sais pas, c'est la fin ! panique Anaëlle.

  - Calme-toi. Il y a bien une solution.

Avec les coups que l'autre taré donne, la porte risque de voler en éclats dans quelques instant. Je cherche désespérément, mais rien ne me vient.

  - Là !

Anaëlle tire la manche de mon sweat-shirt pour m'indiquer la présence d'une trappe dans le coin de la pièce. C'est impossible, j'ai cherché partout, et il y a même pas une minute j'ai regardé précisément l'endroit où elle est et il n'y avait rien !

  - Comment est-ce que...

La porte explose et Paul se tient dans l'ex-encadrement avec une lueur assassine dans ses yeux noirs.

  - Vous voilà, espèces de sales...

Il ne m'en faut pas plus pour sauter dans la trappe à la suite d'Anaëlle.

Je roule dans la poussière avant de me relever. Je suis tombée sur mon bras et il est maintenant tout endolori. Aïe.

Bien fait pour toi, souffle ma conscience. Rah mais tais-toi !

Je frotte mes vêtements et tousse. J'ai le visage entaillé par un débri de la porte, et le dos courbaturé.

  - Camille ? Ça va ?

Je m'assois et ferme les yeux, abassourdie.

Anaëlle me secoue gentiment l'épaule.
  - Cam-Cam ?

Je suis sous le choc. Je sais, c'est bizarre, mais ce que je viens de voir m'a chamboulée complètement, et je ne saurais pas dire pourquoi. Car juste avant de sauter, j'ai vu le résultat du test. Mon père est Hermès.

Escape, one time [PERCY JACKSON] (Pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant