Chapitre 7

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Sa voiture était la seule à rouler sur la simple voie. Aucune voiture n'avait de raison de s'aventurer en pleine période scolaire sur celle-ci.

Cette étroite route bosselée débouchait soit à l'entrée de l'un des lycées les plus réputés du Royaume-Uni soit au monde extérieur, tout dépendait dans quel sens les automobilistes ou plutôt les conducteurs de bus empruntaient cette dernière. Elle menait à la campagne ou à la ville. A la nature ou à la civilisation. Au néant ou au monde entier. Au danger ou à la sécurité.

En effet, le lycée où il avait passé un peu plus d'un mois se trouvait à deux heures du premier village. Aucune présence humaine, aucun réseau téléphonique ou internet n'était présent à des kilomètres à la ronde. Ils ; les élèves, les enseignants et les autres adultes y résidant ; étaient protégés par un dôme visible...

Cela faisait donc deux heures qu'il avait repris sa voiture, lourdement chargé par ses affaires. Deux heures qu'il ne voyait que forêts, champs, prés, moutons ou vaches.

Il avait rendu les clés de sa chambre d'étudiant quelques heures auparavant au proviseur du lycée. Ils s'étaient déjà rencontrés en dehors de l'établissement mais se connaissaient peu. Ils ne s'étaient donc adressés que quelques mots.

Il fallut encore quelques temps pour que lui et sa voiture ne quittent définitivement ce paysage mortel de campagnes et de hameaux puis atteignent une petite ville.

Il s'arrêta sur le parking d'un fast-food et sortit de sa voiture, un billet de dix livres accompagné de quelques pièces de monnaie dans une main et ses gants blancs en latex entourant un talkie-walkie, au nom d'Aidan Sangster, bas de gamme dans l'autre. Il fit tomber ce dernier, le piétina avec ses baskets puis le jeta avec les gants dans un fossé à quelques mètres de là. Ensuite, il entra dans l'enceinte de restauration rapide, grignota quelque chose puis ressortit en se dirigeant vers une vieille cabine téléphonique. Il y inséra une pièce et porta le combiné à son oreille. Il entendit trois fois la sonnerie universelle avant qu'une voix lui étant familière décrocha :

Allô ?

-Hej kollega¹ !

-Je pensais t'avoir déjà dit que je ne comprenais rien à ta foutue langue d'origine, répondit ironiquement l'homme au bout du fil.

-Et moi, que tu serais content de m'entendre, se prit-il au jeu.

-Je le suis ! Tout le monde pensait que tu n'arriverais pas à boucler ça avant la fin de la première période scolaire mais...

-« Tout le monde » mais vous n'êtes que douze !

-Quoi qu'il en soit, je te félicite ! Tout s'est bien passé ?

-Ingen problem² !

-(l'homme s'esclaffa). Tais-toi un peu et rentre à Londres. Tu nous raconteras tout là-bas, on n'est jamais trop prudent de qui pourrait nous entendre. »

Le Londonien coupa la communication.

Il remit le téléphone en place et sortit de la cabine miteuse. Il retourna dans sa voiture, démarra le moteur et quitta le parking du restaurant.

Sa voiture fila sur la route nationale rapetissa en raison de la distance grandissante, devint un minuscule point puis disparut en laissant un nuage de fumée toxique derrière elle...

¹ « Salut collègue ! » en suédois.

² « Aucunproblème » en suédois.

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