ACCORDE-MOI

9. LES FAUSSES CROYANCES

Nora

Trois jours se sont écoulés depuis que j'ai dérapé avec Alan sur mon lieu de travail. Trois jours que je me ronge les sangs à me poser mille et une questions à son sujet.

Je voulais de l'aventure certes, mais pas mettre en danger mon travail.  Pierre, mon patron ne semble pas se douter de ce qui se trame entre Alan et moi. Enfin, disons que c'est ma propre déduction car il ne m'en a pas parlé et n'a pas changé de comportement à mon égard.

Cependant, une interrogation subsiste encore, à savoir m'a-t-il confié ce projet de son plein gré ? Est-ce l'œuvre d'une bonne fée du nom Alan heuuu non, d'une fée maléfique heuu non, d'un sorcier plutôt. Humm un sorcier hyper sexy et tentant ! Bon je m'égare...

La réponse je l'ai trouvé auprès d'Yves, le fils de mon patron. Il ne s'agit pas seulement d'un simple collègue puisqu'au fil du temps, nous sommes devenus amis. Je sais qu'il entretient une relation sérieuse avec l'un de nos dessinateurs à l'insu de son paternel et cette situation s'avère de plus en plus pesante pour lui.

-  Yves ? As-tu deux minutes à me consacrer ?

-  Ahhh ça tombe bien que tu sois là ! J'attendais quelques éclaircissements de ta part, dit-il énigmatique.

Je m'assieds sur l'une des chaises libres en face de son bureau et pose mon café sur sa table.

-  Dis-moi, comment se fait-il que ton père m'ait confié ce mandat de la société Slek ? Ce que je veux dire par là c'est que ce n'est pas un dossier anodin. Pourquoi m'a-t-il choisie pour le réaliser?

-  Drôle de question ! Aurait-elle par hasard un lien avec les dirigeants de cette société ?

-  Oui. Je crois que tu as pu constater par toi-même qu'il y a une ambiguïté avec l'un d'eux.

-  Je vois d'où proviennent tous ces doutes alors, dit-il amusé. Lorsque ces entrepreneurs nous ont contacté pour nous soumettre le projet, mon père a immédiatement pensé à toi. Tu es d'après nous, la plus méticuleuse des ingénieurs de notre boîte. En contrepartie, les dirigeants de la Slek ont demandé à voir tes réalisations avant de nous donner leur aval. Est-ce que cette réponse te satisfait ?

-  Si tu m'assures que ça s'est produit de la sorte, je ne reviendrai plus là-dessus. Encore une chose, je voulais sincèrement te remercier de ne pas avoir partagé avec Pierre ce qui s'est passé lors de la présentation. Merci Yves, lui dis-je reconnaissante.

-  Ne t'inquiète pas pour cela ! Il n'en saura jamais rien, de même que pour le reste, je ne lui soufflerai pas un mot. Ça sera notre petit secret, un de plus, c'est tout. Pour ce qui est du président de cette entreprise, il est vraiment... il ne finit pas sa phrase mais fais un mouvement de la main extrêmement explicite...

-  Ohhhhhh mon dieu, tu n'imagines même pas à quel point dis-je, hilare.

Après de longues réflexions au sujet de ce post-it, je me suis finalement décidée à enregistrer son numéro dans mon répertoire au nom de *____________. Le billet avait d'abord fini à la poubelle, puis repris, puis roulé en boule, jeté à nouveau et enfin lissé avec soin car je m'en voulais de l'avoir chiffonné. Rolalalalala. Je me faisais de la peine à moi-même.

Depuis que je l'ai sauvegardé misère, je n'ose plus regarder mon portable. A chaque fois que je le vois, je suis tentée. « T'es encore là toi, arrête de me regarder, non je ne l'appellerai pas ! ». J'ai l'impression que mon propre téléphone me nargue pour que je le contacte.

J'ai même essayé de le cacher hors de ma vue pour me débarrasser de cette envie. Ça a duré dix minutes avant que je craque pour le reprendre. Olalala. Si je choisissais de lui écrire, ça serait pour lui dire quoi au juste ? Aucune idée originale ne me vient à l'esprit.