J'avais eu du mal à déguiser mon stress quand j'avais annoncé à mes parents que je me rendais au cinéma, où ma classe au complet avait réservé la séance pour visionner « Le Crime de l'Orient Express ». Après une multitude de « mon poussin chéri s'est enfin fait des amis ! » ou autres exclamations joyeuses en tout genre, j'avais fini par craquer et j'avais rendu visite à Alex, dans son bureau, où j'avais dégusté un chocolat chaud absolument merveilleux tout en disputant une partie de Scrabble contre moi-même.
Au moment où je jouais le mot « sabbat », mon téléphone sonna et Alex s'interrompit dans ses élucébrations au sujet de l'éventuel labrador que sa compagne voulait acheter.
« Allô ?
— ... Aaron ? C'est Louis.
— On s'appelle par nos prénoms maintenant ?
— Écoute, Amélie veut qu'on vienne en vélo jusqu'au cinéma et on passe devant chez toi. Elle propose que tu te joignes à nous.
— Pas de problème. Je serai là dans cinq minutes.
— Super... Et Aaron ? ajouta-t-il à voix basse.
— Oui ?
— Amélie sait pour les leçons particulières. Elle m'a tiré les vers du nez hier soir. Je suis désolé.
— ... Pas grave.
— Sûr ?
— Bah du moment que le reste de la classe n'est pas au courant...
— Oui. Attend, Amélie veut te parler. »J'entendis quelques bruits indistincts et la voix d'Amélie Heilbrown me parvint soudainement, aussi chaleureuse qu'enjouée.
« Aaron ? C'est Amélie. Je voulais te dire, ne t'inquiète pas pour les autres, je sais garder des secrets.
— Juda aussi savait garder des secrets.
— Tu fais une comparaison biblique là, ou c'est moi ? pouffa-t-elle.
— Heu... Oui. Je veux dire ouais. Tu ne dérailles pas. »Un rire s'envola du combiné, presque aérien.
« T'es trop drôle ! Bon à tout à l'heure. Et je te promets que je ne trahirai pas ma parole. »
Tant mieux sinon je te fais bouffer tes cheveux.
Elle raccrocha dans un dernier rire et je croisai le regard amusé d'Alex.
« Faudra que tu lui demandes, à Louis, dit-il.
— Que je lui demande quoi ?
— Comment draguer une fille.
— Les filles ne m'intéressent pas.
— Tu n'as jamais essayé ! Et elle a l'air sympa cette Amélie.
— Peut-être mais en cours de français la dernière fois, Louis avait sa main posée sur sa cuisse.
— Et alors ?
— D'après WikiHow, c'est clairement un signe de séduction. Donc je ne crois pas que ce serait une bonne idée de voler la future copine en devenir de mon seul allié contre cette vaste et houleuse société ! »Alex éclata de rire avant de me rendre mon manteau. Je l'enfilai, le saluai, et sautai sur mon vélo pour retrouver les deux amis-ou-peut-être-plus qui m'attendaient devant chez moi. J'arrivai essoufflé à leur hauteur et me penchai par-dessus mon guidon pour faire la bise à Amélie comme me l'avait conseillé Louis. Il fixait ma maison avec intérêt, sans se rendre compte qu'il avait une mèche de ses cheveux blonds qui retombait devant ses yeux. Ses tâches de rousseur étaient encore plus visibles qu'à l'accoutumée à cause de l'effort physique qu'il avait fait.
« Tu vas bien, Aaron ? s'enquit gentiment Amélie.
— Heu... Oui et toi ?
— Super ! Elle a l'air chouette ta maison.
— Oui. On va au ciné ? Magalie Maillard a dit que c'était à pile, il ne faudrait pas qu'on soit en retard.
— C'est bien la seule bonne idée de cette crétine, affirma Amélie en riant. J'en reviens pas qu'elle ait été élue déléguée ! »Je ne répondis rien et le reste du trajet fut ponctué de rires de la brunette et de plaisanteries de Louis. Je fus étonné de voir qu'ils m'incluaient dans leurs histoires et j'arrivai au cinéma le cœur plus léger.
Nous rejoignîmes les autres devant la salle. Ils étaient rassemblés en plusieurs petits groupes, entre amis. Notre déléguée, la fameuse Magalie, faisait des allers-retours entre chaque groupe pour distribuer les tickets accompagnée de Jude Renzo qui était paniquée parce qu'elle avait perdu son billet.
« Il est sous ta chaussure, glissai-je à la jolie rousse qui regardait en l'air.
— Oh merci beaucoup !
— Pas de quoi.
— Tu as pris du popcorn ? me demanda-t-elle avec un grand sourire.
— Tu as intérêt à en prendre ! s'écria Léonard Breton en s'imisçant dans notre duo après m'avoir tapoté l'épaule d'un geste amical. Ils sont délicieux.
— Viens, on va en chercher, me proposa Jude en nous tirant Léonard et moi par la manche.
— On va faire attention à ce qu'elle ne perde pas son paquet de popcorn », me lança le garçon dans un rire.Je souris, regardai Louis et Amélie qui rejoignaient Nicolas Combes en riant aux éclats et me décidai à suivre mes deux camarades. En attendant qu'on nous serve, j'appris que Jude et Léonard étaient amis de longue date et que leurs parents se connaissaient depuis l'école primaire. Léonard s'avéra être un charmant compagnon, très bavard mais accueillant. Jude était une grande rêveuse qui perdait ses affaires sans arrêt mais qui gardait toujours un resplendissant sourire aux lèvres. C'était pratique car je n'avais pas à contrôler tout ce que je disais en leur compagnie : ils riaient sans arrêt. Je m'installai à côté d'eux dans les fauteuils cramoisis de la salle de cinéma et Louis vint me rejoindre pour saluer les deux autres. Il s'assit finalement à ma droite tandis qu'Amélie rejoignait d'autres filles de la classe et que Nicolas Combes se mettait au fond avec Liam Launay pour lancer des popcorns sur les élèves aux alentours.
« Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait une bonne ambiance comme ça, me dit Louis.
— Faut croire que Magalie avait raison, déclara Jude. Ça va resserrer les liens entre nous. Et mince... Je crois que j'ai oublié ma carte de bus... »Les lumières s'éteignirent et les discussions cessèrent. Le film pouvait enfin commencer.
*.*.*
Je n'en revenais pas. Je ne pensais pas qu'un film puisse avoir autant d'effet.
Devant le bâtiment, la classe entière était regroupée. Les groupes habituels s'étaient dispersés et chacun discutait dans un joyeux brouhaha. Un peu à l'écart, j'observais Louis Rutherford qui riait avec ses amis. Ou plutôt, qui riait de ses amis. À côté de lui, Nicolas Combes se disputait avec Amélie Heilbrown, l'air survolté. La brunette semblait lui renvoyer ses piques avec une verve non feinte. Un peu plus loin, Jude Renzo et Léonard Breton recherchaient le foulard de la jeune fille tandis que Magalie Maillard saluait les élèves qui partaient.
« Aaron ! m'appela Amélie en accourant vers moi. Ça te dit d'aller chez Louis ?
— Ce soir ?
— Oui.
— Il faut que je rentre, merci. Mais c'est gentil de ta part. »Elle m'adressa un sourire rayonnant avant de déclarer d'une voix amusée :
« Tant pis, on se voit demain ! »
Louis Rutherford m'adressa un clin d'œil.
À demain, chers camarades...
*.*.*
Louis Rutherford :
Tu vois que tu ne t'en sors pas si mal !Aaron Eckhart :
On se voit demain soir ?Louis Rutherford :
Ouais. Bonne nuit ;)

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RAYONNANT [BoyxBoy]
Novela JuvenilAaron Eckhart n'est pas vraiment un garçon comme les autres. Toujours décalé, il semble planer dans un monde qui ne lui ressemble pas. Alors, l'année de ses dix-sept ans, après un rendez-vous chez son psy de pacotille, Aaron décide de prendre les ch...