Inattendu

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Trois semaines avaient passé. Trois semaines maintenant que Prentiss essayait tant bien que mal de tenir tête à l'homme qui lui servait de patron. Elle avait réussi à se faire oublier, à ne pas faire trop de vague et à résoudre les affaires qu'on lui affectait en peu de temps afin de ne pas attiser plus de haine. Pourtant, cette dernière enquête de l'avait pas laissée de marbre. A passer des soirées à remplir des dossiers, rédiger des notes sur les affaires bouclées et à en oublier de dormir, elle était épuisée. Et même si elle luttait désespérément contre la fatigue, son corps tout entier lui faisait bien comprendre qu'il avait besoin de repos. Alors, pour cela, elle avait finalement décidé de prendre son week-end. Premièrement, elle était invitée à un mariage le dimanche toute la journée, et deuxièmement, elle avait besoin de s'éloigner du bureau l'espace de quelques jours, autrement elle ne serait que peu correcte avec son supérieur. 

Après avoir annoncé à son équipe qu'ils avaient leur week-end de libre, à partir de ce jeudi soir, elle quitta les bureaux d'Interpole pour rentrer chez elle et y retrouver Nora qui venait manger avec elle, comme chaque jeudi soir en semaine.


Elle était à table, en silence, regardant, par moment, la télévision en fond qui diffusait les informations nationales. Nora voyait bien que sa Petite était à bout de force, mais elle ne dit rien. Elle voulait simplement attendre le bon moment pour lui en parler ; et, bien qu'elle soit décidée à aborder le sujet, elle devait trouver les bons mots pour le faire. 

Finalement, elle n'eut pas le temps de trop se torturer l'esprit, car – et à sa grande surprise – Emily en vain d'elle-même à parler du travail. 

« Je n'en peux plus Nora. Je crois que j'arrive à bout. Je n'ai plus la force de me battre contre lui, contre ce salop qui passe son temps à me pourrir la vie dès que je passe cette fichue porte d'entrée ». Elle se recomposa quelques secondes avant de continuer. « Toute la journée, j'entends parler de ses remarques désobligeantes qu'il ne peut s'empêcher de tenir. Tous les jours, il me harcèle et exige des rapports, dont il n'est jamais satisfait, et que je dois donc reprendre même s'il est déjà 20h !

- Calme-toi Emily. Je sais bien au combien ça doit être difficile mais je te connais aussi et tu ne lâcheras rien. Prends simplement le temps de te reposer. Tu es bien la meilleure à ce que tu fais et il sera bien obliger de l'admettre tôt ou tard.

- Je ne sais pas Nora. Il est tellement buté et s'il ne change pas rapidement, je ne tiendrai pas ce rythme ». A ces mots, elle inspira un grand coup avant de lâcher bruyamment sa fourchette qui retomba et frappa contre le bord de son assiette. « J'ai accepté ce job en pensant que j'allais évoluer dans ce que je faisais, dans un métier qui me plait ! Et me voilà coincée entre quatre murs à ne pas pouvoir faire mon travail parce qu'il me met tous les bâtons possibles dans les roues ». 

Nora ne disait mot. Elle regardait simplement Prentiss déballer son sac d'un air compatissant. Oui, elle la laissait faire en passant sincèrement que se confier et se vider de toutes ces choses l'aiderait à décompresser. 

Puis elle aperçut que le regard de la jolie brune avait changé. Nora ne voyait plus de la colère dans ses yeux mais un voile de tristesse. Sa Emily qu'elle avait retrouvé entièrement épanouie à Quantico s'évanouissait de jours en jours, alors que son boulot était en train de la bouffer de l'intérieur. Mais, encore un énième fois, Nora était impuissante à tenter la moindre action puisqu'elle savait à quel point Emily restait obstinée. La cinquantenaire fut tirer de ses pensées par la brunette, qui continua ses confidences après s'être servie un verre d'eau. 

« J'étais sur une affaire depuis deux jours. Des enlèvements d'enfants. On savait pertinemment que le tueur se débarrasserait de l'enfant qu'il avait aujourd'hui car son mode opératoire indiquait qu'il gardait les enfants quatre jours entiers et pas un de plus. On avait des doutes sur un homme qui nous semblait être notre suspect. Mais quand je suis montée le voir dans son bureau pour avoir une autorisation d'action chez le présumé suspect, il n'a même pas essayé de contacter un juge ou autre. Il a simplement estimé que nous manquions de preuves et que ce que nous avions étaient de simples présomptions non fondées. Alors, oui, on manquait de preuves car nous avions du mal avec cette enquête, mais je ne pourrais jamais lui pardonner quand une heure plus tard, alors qu'on cherchait à approfondir nos pistes, mon téléphone a sonné pour m'annoncer qu'on avait retrouvé le corps de l'enfant. 6 ans. Il avait 6 ans Nora, il n'avait rien demandé à personne, il rentrait simplement de l'école quand il s'est fait enlever. Et si j'avais eu l'autorisation de mon chef, nous aurions pu empêcher ça, il serait toujours en vie. Cet enfant, j'aurais pu le ramener vivant à ces parents. Je me fous bien de ses motivations, de ses sautes d'humeur ou même du fait qu'il ne puisse pas me voir en peinture, mais jamais je ne passerai au-dessus de ce qu'il s'est produit aujourd'hui ». 

Face cachéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant