Sur la terre comme aux cieux.

3.

Hussein ne se sentait pas dans son assiette. Certes, aujourd'hui il allait mourir en martyr. Il allait s'enticher d'un gilet de C4 à même le corps, activer le détonateur et se faire exploser, éparpillant son enveloppe charnelle sur une centaine de mètres alentours. C'était peut-être pour ça qu'il se sentait bizarre après tout, quoi de plus normal. Il savait qu'il avait rêvé cette nuit mais n'arrivait pas à se souvenir de quoi. Omar avait eu un mal fou à le réveiller. Il avait fini par le secouer en répétant sans cesse son prénom et depuis, il se trouvait dans cet état. Il lui tardait maintenant d'y être et de déclencher la bombe, que sa vie sur cette terre puisse enfin s'arrêter et que son paradis et ses vierges l'accueillent enfin. Il entendait Amir fredonner dans la pièce à côté en finissant de préparer sa bombe pendant que lui essayait de se détendre dans son bain purificateur.

- Mais qu'est ce qu'elle a aujourd'hui Sarah ? Ça n'a pas l'air d'aller.

Nathan regardait la petite fille en train de boire son sirop à la paille. Elle avait l'air ailleurs, absente, bref, absolument pas le petit ange blond enjoué qui d'habitude criait, courait dans tous les sens. Rachel tourna la tête et regarda sa fille.

- Elle est bizarre depuis ce matin. J'ai pensé un moment qu'elle me couvait quelque chose mais non, rien, pas de température. Je te dirai -elle se retourna vers Nathan- que moi aussi, je n'ai pas trop la pêche aujourd'hui. C'est certainement idiot ce que je vais dire mais... C'est comme si tout avait été écrit par avance...

Il prit un air grave en la regardant et lui coupa la parole en finissant sa phrase.

- Comme si tu avais l'impression d'avoir déjà vécu cette journée, c'est ça hein ?

Elle se redressa de son tabouret et le fixa d'un air étonné et soulagé en même temps.

- Ça te fait ça toi aussi ?

Il se contenta simplement de grogner, affirmant la question de Rachel.

- Ben mince alors ! C'est peut-être un virus ou quelque chose comme ça ?

Elle le détailla comme s'il allait lui donner la réponse à sa question. Au lieu de cela, il lui lança d'autres questions.

- Ou bien à cause du temps, de la position de planètes, de la nourriture trop riche, des retombées radioactives ou que sais-je encore ?

Se sentant ridicule, elle baissa la tête et tira sur sa robe comme le ferait une petite fille. Il tendit le bras et posa délicatement sa main sur l'épaule de la jeune femme qui à ce moment, releva la tête.

- Je n'en sais strictement rien Rachel. C'est peut-être juste dans l'air du temps ou comme les hallucinations collectives, c'est peut-être une impression collective ?

À cette hypothèse, elle répondit par une moue.

- Mouai ! De toutes façons, ça m'embête de la voir comme ça ma princesse.

Il désigna Sarah d'un hochement de tête.

Amir frappa brièvement à la porte de la salle de bain ce qui fit sursauter Hussein. Il avait laissé vagabonder son esprit en fixant les gouttes du robinet s'écoulaient lentement et avait complètement perdu la notion du temps.

- Hussein, il faudrait que tu te prépares, il est bientôt l'heure !

Se redressant dans son bain, il se frotta le visage de ses mains maintenant toutes flétries.

- J'arrive Amir, j'arrive !

Il sortit de son bain, attrapa la serviette posée sur un tabouret et commença à se sécher minutieusement. Il n'enfila que le bas de sa tunique gardant le torse nu prêt à recevoir le gilet explosif. Se regardant dans le miroir, il vit de fines gouttelettes perler sur son front et n'aurait pas su dire si elles étaient de sueur ou bien échappaient de ses cheveux encore humides. Nerveusement en se redressant, il passa ses mains dans les cheveux vers l'arrière, essuyant au passage ces gouttelettes disgracieuses et sortit de la salle de bain. Amir lui sourit.