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Je décide de décrocher mes yeux des siens, apeurée. J'ai du mal à me rappeler pourquoi je suis ici. Comment j'y suis arrivée. Mes souvenirs sont embrouillés. J'ai dû être droguée pour être amenée jusqu'ici je pense.

J'essaie de réfléchir. Je sais que je suis ici à cause de mon père. Mais je ne comprends pas comment ils m'ont retrouvée. Cela doit faire presque dix ans que mon père me cherche. Je déteste être sa fille, à tel point qu'à mes quinze ans je me suis enfuie pour vivre seule une vie plus normale.

Tous les jours je teins mes ailes en une couleur plus banale, du vert pomme. Tous les jours je revêts des vêtements tout ce qu'il y a de plus passe partout, bien loin de mes envies d'originalité. Tous les jours, j'enfile le manteau de Nulda, je revêt cette identité fantôme et je m'enfonce dans le monde que j'ai choisi.

Même mes plus proches amis ne savent rien de la supercherie de Nulda. Alors comment ces satanés Histë ont-ils pu retrouver Hélisa ? Et quel prix mon père sera prêt à payer pour me revoir vivante et en bonne santé ? Quelles répercutions cela aura t'il sur le monde que j'ai appris à aimer ?

Je dois me délivrer. Je n'ai pas le choix. Mais pour ça, j'ai besoin de comprendre au moins à quel moment ils m'ont amenée ici. Le soleil parait haut dans le ciel, on doit être aux alentours de midi. Je dois savoir depuis combien de temps je suis ici.

Lundi soir j'avais une fête chez Calavénë. J'avais saupoudré le vert de mes ailes de paillettes pour l'occasion. Je tire sur la pointe de l'une d'elle. Toute coloration s'est effacée, plus une seule trace de Nulda. Une bouffée de tristesse et de panique me sert la poitrine. Cela fait presque dix ans que je ne me suis départie de Nulda.

La fête y était incroyable. Je m'y étais saoulée dans l'alcool, la danse, les regards. Je me rappelle vaguement d'un type que je connaissais à peine mais dont le regard obsidienne m'avait fascinée. De manière générale, je suis fascinée par les beaux regards. Ce qui explique mon attrait pour les yeux de mon camarade de cellule, Eos.

Je me rappelle à peine, embrumée par l'alcool, l'avoir laissé m'emmener auprès de deux autres jeunes hommes qui lui ressemblaient beaucoup. Le troisième semblait un peu plus timide que les deux premiers. Le second s'est approché de moi, a posé sa main sur mes lèvres, j'ai avalé quelque chose et après... Je ne sais pas.

Glacée d'effroi mais soulagée de m'être rappelée les circonstances de mon enlèvement, je me rends soudain compte que si je sais qu'il s'est au minimum passé une demi journée depuis que je suis prisonnière ici, je ne peux absolument pas savoir seule combien de fois le soleil a eu le temps de se coucher et de se lever entre temps.

Je jette un coup d'œil à Eos. Il fixe un plateau à mes pieds que je n'avais pas vu. Il semble bien faible. Je regarde le contenu du plateau. Une cruche d'eau, un verre, une pomme minscule, un morceau de pain et un autre de fromage.

Je le regarde encore. Ses joues sont émaciées et il semble vraiment affammé. Moi, encore sous l'emprise de la drogue, je n'ai que très peu faim. J'hésite. Dois-je lui donner ce morceau de fromage dont je n'ai pas vraiment besoin pour l'instant ou tout garder en prévision des épreuves que je risque d'avoir à supporter ?

Choix :

¤ Lui donner le morceau de fromage (aller à ¤4¤)

¤ Tout manger (aller à ¤5¤)

How to be free ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant