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Incapable de me délivrer seule, je m'oblige à laisser ma fierté de côté et me tourne vers Eos qui me regarde froidement. J'entends les deux hommes se rapprocher. Le temps presse, mais les mots restent bloqués dans ma gorge. C'est dur pour moi, chez qui l'honneur est une notion très forte.

- Eos... J'ai besoin de ton aide je t'en supplie.

Il me contemple un instant, surpris et furieux. Puis il détourne les yeux et le visage vers la lumière. Un rayon de soleil fait vibrer les lettres tremblantes sur sa joue. Ses sourcils tremblent de frustration. Je m'en veux de ne pas lui avoir fait part de mes projets de fuite avant.

- Vas te faire voir, siffle t'il.

Choquée, je ravale à grand peine un commentaire acerbe. Mon coeur fait une embardée. Comment le convaincre ? Si je n'y arrive pas, nous allons mourir tous les deux ici ! J'ai peur... Que va t'il m'arriver ?

- Je t'en supplie Eos...

- Tu te répète. Et moi aussi : vas te faire voir. Si tu voulais mon aide, il fallait me la demander dès le début ! Maintenant, tu as voulu te débrouiller seule, très bien alors débrouille toi seule ! Je ne suis pas si stupide que tu semble le croire.

Amère, je sens le goût de la culpabilité, acide, se répendre dans ma bouche. Je regrette lui avoir offert à boire désormais, j'aurais aimé chasser cette saveur si désagréable.

- Mais si je sors, je pourrai chercher de l'aide !

- Bien sûr... Et moi je suis le roi du monde ! Tu n'as pensé qu'à toi, comment croire tes beaux mensonges ?!

- Le temps presse Eos, ils arrivent !

- La faute à qui ? Ils ne viennent jamais me rendre visite si fréquemment d'habitude ! Pourquoi tu crois que je crève de faim et de soif ! Tu es vraiment incroyablement égoïste !

Vexée et blessée, je ne réponds rien. La peur s'insinue dans mes veines, brûlante. J'entends le bruit de la poignée. Je tire sur mes chaines, désespérée. Rien à faire. Le bas de la porte racle le sol. Je vois deux paires de rangers usées.

Le premier homme, je le connais. Je suis presque sûre que c'est lui qui m'a enlevée. Sa chevelure de jais, retenue par un élastique lâche, et ses yeux d'obsidienne me rappellent quelque chose. Son teint pâle lui dans la lumière de l'après midi.

Le second est plus musclé. En fait, c'est une armoire à glace. Il tient ses deux bras aussi gros que mes jambes croisés sur sa poitrine musculeuse, et sa largeur d'épaule fait presque deux fois la mienne. Il brille, dans ses yeux noirs enfoncés dans leurs orbites, une lueur aussi sombre qu'inquiétante.

J'entends Eos bafouiller quelques mots. Une prière ? Soudain, je regrette très fort de ne pas avoir de divinité à prier. Ce geste m'aurait peut-être redonné de l'espoir. J'en manque cruellement.

- Salut petite, me dit le premier.

Mes sourcils tremblent de peur et de fureur. C'est à cause de lui si Eos est dans cet état. Et si je suis ici, c'est sa faute aussi. J'ai beau redouter ce qu'il pourrait me faire, je ne peux m'empêcher de trembler de rage en pensant à tous les problèmes dont il est la cause.

Prudente, je ne réponds rien. Je m'efforce de garder mes lèvres étroitement serrées. Le second s'approche de moi. Il pose deux doigts sur ma joue et les descends lentement. Une caresse, vraiment ?

- Elle est si mignonne... On est obligé de lui faire ça ?

Mon regard dérive et mon coeur loupe un battement à la vue du chalumeau que tient le premier. J'adresse une prière silencieuse à n'importe quelle divinité en capacité de changer quelque chose à ma situation.

Qu'est ce qu'il va m'arriver ?

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