11.

589 25 22
                                    

Je regrette aussitôt d'avoir envoyé ce SMS.

Ça veut dire que je n'ai pas cédé, mais pour en arriver à quoi au juste ?

À m'interdire toute possibilité de revoir John ! Car, à n'en point douter, tout homme normalement constitué n'insisterait pas. D'autant plus que John est sans cesse entouré de jolies femmes certainement prêtes à répondre présentes au premier coup de sifflet.

[La voleuse de lumière est une petite menteuse ☺]

John n'a pas l'air décidé à baisser les bras. Je soupire, je ne sais plus quoi faire. Je repose mon portable, décidée à résister, mais un nouveau texto apparaît sur l'écran :

[Je ne te demanderai pas de te déshabiller, promis !]

Justement, c'est bien le problème !

Je ne peux pas répondre une chose pareille. Il me prendrait pour une obsédée.

[Je ne compte pas le faire, à part ça, je vais m'arranger pour annuler mon rendez-vous...]

Je regarde ma réponse. Je n'y crois pas. Et le pire c'est que je l'ai envoyée à la vitesse de l'éclair.

On m'a siphonné les neurones ou quoi ?

L'espace de quelques secondes, j'essaie de m'efforcer de croire que c'est une erreur, une fausse manip. Mais en vain. Je viens tout simplement d'accourir en pensée comme un petit chien. J'ai beau m'en vouloir, je suis forcée de constater que je suis... excitée.
Et encore plus quand je lis sa réponse où il m'écrit :

« Rendez-vous dans une heure, avant la fin du monde... »

À l'aide, j'ai besoin d'un exorciste !

J'enfile un jean, chausse des sandales. Pas question de lui sortir le grand jeu. En revanche, je passe quand même par la salle de bains pour me maquiller et me coiffer.

***

John est là, en jean et chemise Lacoste noire, chaussé de mocassins italiens. Assis sur le capot de sa Porsche, il me fait penser à une couverture de magazine. Je fonds quand un sourire se dessine sur ses lèvres. J'ai carrément tout oublié de mes résolutions, je suis une femme sous influence. Je remarque les filles qui passent sur le trottoir et le regardent comme si c'était une star de cinéma.

Il pourrait l'être sans problème...

John ouvre la portière et m'invite à m'asseoir sur le siège passager. Je respire d'emblée un mélange de cuir et de son parfum. Il fait le tour de la voiture, s'installe au volant et prononce simplement ces quelques mots :

– Tu es très en beauté.

J'acquiesce en me mordant la lèvre inférieure, mais je me retiens de lui renvoyer le compliment. À mon tour de le faire languir. Nous démarrons et roulons pendant un bon quart d'heure. Dans le silence juste bercé par le ronronnement du moteur, nous n'échangeons pas une parole.

J'ai décidé de ne pas craquer, s'il a quelque chose à dire, c'est à lui de parler. J'aimerais savoir où il était ces derniers jours, ce qu'il faisait ou s'il pensait à moi. Mais je ne veux pas lui faire ce plaisir, il y a quand même des limites.

– Oui, murmure-t-il soudain alors que je n'ai pas prononcé le moindre mot.

– Oui quoi ?

– J'ai pensé à toi, Alexandra.

– Tu es médium ? m'étonné-je en observant son profil.

Il sourit légèrement.

– C'est simplement que je me posais la même question que toi.

– Tu veux dire que...

– Je me demandais si tu avais pensé à moi pendant ces quelques jours.

– Oui, un peu.

– Un peu ?

– De temps en temps.

Un petit sourire crispé déforme ses traits, mais il ne répond pas. Sait-il que je mens ? Est-il déçu que je ne pose pas ma tête sur son épaule pour lui signifier à quel point je suis heureuse de le retrouver ? S'amuse-t-il de ce que mon nez ne s'allonge pas ?

Je n'ai pas le loisir d'y réfléchir plus avant. John vient d'immobiliser la Porsche le long du trottoir, à proximité d'une zone de bâtiments ultramodernes. Il coupe le contact, attrape un foulard de soie posé sur l'un des sièges arrière et se penche vers moi. Son parfum m'envahit. Ça me manquait...

– Tu permets ? demande-t-il sans pour autant attendre ma réponse.

C'est sûrement une habitude chez lui de proposer avant de disposer dans la foulée comme si c'était une évidence. Toujours est-il que je ne tarde pas à me retrouver les yeux bandés par le foulard. Je songe à protester, à lui prouver mon caractère indépendant... mais la curiosité l'emporte.

Où m'emmène-t-il ?

Il m'aide à sortir de la voiture, saisit délicatement ma main et m'entraîne à sa suite.

– À quoi tu joues, John ?

– Sois patiente, répond-il.

J'entends une porte grincer, puis nous traversons ce qui me semble être un couloir. Une autre porte s'ouvre dans un bruit feutré, puis John s'arrête et me libère de l'entrave de soie. J'écarquille les yeux, m'accoutume à la lumière blanche de ces lieux. Tout est immaculé, les murs, le carrelage, le plafond.

Des machines qui ressemblent à de gros ordinateurs sont disposées sur de longs pupitres où officient deux techniciens. Derrière eux, j'aperçois des sortes de portiques.

– On se croirait dans un décor de science-fiction, lâché-je. J'espère que tu n'as pas décidé de me cryogéniser.

John laisse échapper un petit rire, avant de reprendre ma main pour me conduire vers les pupitres. L'un des techniciens dont le badge indique qu'il se prénomme Eddy fait pivoter un moniteur sous mes yeux. J'y découvre des photos de paysages, classées par numéros.

– Choisis, Alexandra, propose John avec douceur.

– Comment ça, choisir ?

– Ton saut, le décor de ton saut, l'endroit où tu aimerais atterrir.

Il approche son index de l'écran tactile et fait défiler des images.

– Nous sommes dans une salle de simulation, précise-t-il. À la différence d'une soufflerie où tu éprouves simplement la sensation de flotter dans l'air, ces portiques permettent de vivre de A à Z un saut en parachute. Tu peux expérimenter les moindres étapes de la chute libre, traverser les nuages ou l'azur, voler de nuit ou de jour et décider de la zone de ton atterrissage.

– C'est un truc de fou ! m'exclamé-je en pointant mon doigt sur une image. Celle-ci.

FIGHT FOR USOù les histoires vivent. Découvrez maintenant