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Chemise Oxford et pantalon chino, c'est un mélange de chic et de décontraction. Je remarque également qu'il est pieds nus.

– Alexandra Leduc, nous n'attendions plus que vous ! déclare-t-il d'une voix grave. Venez donc nous rejoindre.

Je donne l'ordre à mes jambes d'obéir. Et le miracle se produit. Je me rapproche de John White. Car je l'ai bel et bien reconnu. C'est l'un des plus célèbres photographes de mode et réalisateurs de films publicitaires au monde. J'ai lu récemment un portrait dithyrambique que Vogue lui a consacré.

Dans le milieu, on le surnomme "« l'œil absolu » ! En plus d'être milliardaire grâce à l'héritage de son père, grand magnat de l'informatique, il peut compter sur son talent artistique qui lui rapporte des sommes colossales. Il se lève et je n'arrive pas à détacher mes yeux de sa silhouette aussi impressionnante que... sublime. Parce que oui, pour couronner le tout, ce type incarne la beauté du diable !

Je m'efforce de me concentrer pour ne pas confirmer la véracité de l'expression « beau à tomber par terre ». Mes jambes vacillent, mais je tiens bon. C'est vraiment la première fois que ça m'arrive, un truc pareil ! Une fois à sa hauteur, je suis obligée de lever les yeux. Il doit mesurer près de 1,90 mètre quand je culmine à 1,69 mètre ! Je suis en effet une exception dans le milieu ; d'aucuns prétendent que j'ai eu la chance de Kate Moss. D'autres qualités que ma taille m'ont autorisée à me faire une place dans cette profession d'ordinaire très réglementée.

La voix enveloppante de John m'extirpe brusquement de mes pensées.

– Je suis enchanté de vous rencontrer, chère Alexandra.

– Idem, monsieur White, réponds-je sur un ton que j'estime un peu niais.

– John, s'il vous plaît ! J'ai à peine 30 ans, je ne suis pas tout à fait un vieux monsieur.

J'acquiesce, toujours hypnotisée par son sourire et l'aisance qu'il dégage. Il se tourne vers les deux hommes et la femme qui discutent encore autour de la table.

– Alexandra, je vous présente Sofia, notre maquilleuse. Quant au jeune geek échevelé greffé sur son portable, c'est Maurizio, mon assistant pour les lumières, et voici Vincente le play-boy, il est chargé du matériel. Les amis, vous connaissez peut-être Alexandra Leduc.

Tous trois se lèvent et viennent gentiment me saluer. Je me donnerais des baffes tant je me sens dépourvue de moyens depuis que j'ai posé le pied dans ce studio. Il est temps de me reprendre si je ne veux pas perdre ma réputation de professionnelle.
J'adresse un sourire timide à John et je ne sais pas si je rêve, mais j'ai la sensation qu'il m'observe d'une manière particulière, avec un regard très... intense.

Stop le délire, ce type voit des top models à longueur de journée !

– La directrice artistique de Just 4 You m'a expliqué qu'elle vous pressentait pour devenir l'égérie de la marque.

– Et qu'en pensez-vous ? lâché-je du tac au tac.

Il recule d'un pas, sans me quitter des yeux. Il passe une main dans ses cheveux bruns, une petite mimique séduisante dessinant une fossette aux coins de ses lèvres ourlées :

– C'est un bon pronostic, murmure-t-il.

La réplique manque de poésie, mais l'expression qu'affiche John m'autorise à croire qu'il est sincère. Le hic, c'est que je n'ai jamais posé pour de la lingerie et je ne suis pas sûre d'être en mesure de me lâcher, d'être naturelle comme je l'ai toujours été jusqu'à présent.

Aujourd'hui, c'est un véritable baptême du feu. Et je n'en mène pas large.

– Tout va bien se passer, ajoute John comme s'il lisait dans mes pensées.

– Vous avez l'air bien sûr de vous, non ?

– C'est de naissance, plaisante-t-il tout en replaçant une mèche de cheveux derrière mon oreille.

Je me mords la lèvre inférieure et je me calme en me disant qu'il s'agit d'un simple geste professionnel. Derrière nous, l'équipe s'active. Vincente procède déjà à des vérifications sur le matériel pendant que Maurizio prépare les éclairages. Sofia m'adresse alors un petit signe amical de la main pour m'inviter à la rejoindre.

– Je crois qu'on a besoin de moi pour le maquillage.

John hoche la tête. Je contourne sa haute silhouette et emboîte le pas à la jolie Sofia qui doit avoir à peu près mon âge. Ses cheveux courts et noirs de jais encadrent un ravissant visage constellé de taches de rousseur. Nous nous dirigeons vers le dressing, une sorte de cube en toile installé dans l'un des coins du studio.

– Votre peau est parfaite, me confie-t-elle, je n'aurai pas beaucoup de travail.

– Merci du compliment, Sofia.

– C'est surtout sur votre corps que je procéderai à de légères touches de maquillage, juste pour éviter les reflets.

Cette simple phrase me rappelle que je vais bientôt devoir me déshabiller et je recommence à frémir. Cela a beau être un travail, je ne sais pas si je suis capable de me livrer ainsi au regard de tout un chacun.

~ Un peu avis ~

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