Je ne sens plus mon corps. Le jet vient de se poser sur une piste dédiée de l'aéroport international de Los Angeles. Et j'ai l'impression que nous n'avons pas arrêté de nous donner du plaisir. Dès que nous nous touchions, l'envie de recommencer devenait irrésistible.
Je suis KO, au même titre que doit l'être un boxeur après quinze rounds à défendre son titre.
Sauf que là, tout le monde a gagné !Nous n'avons pas parlé depuis tout à l'heure. J'ai pu faire un brin de toilette dans la salle de bains du jet. J'ai choisi dans mon sac un jean, un débardeur et j'ai chaussé mes chères Converse. Je suis rassurée par le fait que John ne m'ait pas proposé de sélectionner une tenue de rechange dans une armoire secrète. J'aurais trop eu l'impression que tout était calculé. De n'incarner qu'une fille de plus à se faire sauter dans son piège volant. D'un autre côté, je me doute un peu qu'il n'a pas attendu que j'arrive dans sa vie pour s'amuser. Et je n'ai rien à lui reprocher. C'est quand même moi qui l'ai conduit sur ce terrain. Il n'a fait que répondre à mes avances.
Quelque chose me dérange néanmoins depuis quelques minutes. J'ai comme l'impression qu'il regrette un peu ce que nous venons de vivre, je le sens comme... distant. Et j'ai peur également qu'il me prenne pour une de ces filles qui écartent les cuisses au premier clin d'œil. Ça n'est pas du tout moi, je ne fais jamais ça. De fil en aiguille, je commence moi-même à regretter d'être allée si vite en besogne.
– Tu sais, dis-je pour briser le silence, ça ne m'arrive pas d'habitude.
Ça ne m'arrive pas non plus d'avoir besoin de me justifier. Qu'est-ce qui me prend ?
Il acquiesce avec un sourire tout en m'invitant à emprunter la petite passerelle de débarquement. Je m'exécute, m'efforçant dans le même temps de masquer mon trouble de n'avoir pas obtenu de réponse claire de sa part. Je sais qu'il me croit. En revanche, il n'a pas jugé utile de me rassurer sur ce point.
Dois-je en déduire qu'il ne tient pas à s'étendre sur le sujet ?
Ou que pour lui c'est tout le contraire ?
Que posséder des jeunes femmes fait partie de son quotidien ?
Je m'en veux de me poser de telles questions. John ne me doit rien, il ne m'a pas forcée, on n'a pas signé le moindre contrat, nous étions deux personnes consentantes.
Il marche à mes côtés sur le tarmac et je songe encore et encore que tout est sans doute arrivé trop vite. Je ne regrette rien, c'était vraiment sublime, mais l'idée que nous allons peut-être en rester là me fait déjà souffrir. Au-delà de cette excitation physique, de cette fusion qui nous a réunis, j'ai compris que John n'était pas un homme comme les autres.
– À quoi tu penses ? me demande-t-il en posant une main sur mon épaule.
Je frissonne.
– À rien de spécial, suis-je obligée de mentir.
Au bref regard qu'il me lance, je comprends qu'il a deviné mes pensées. Mais il n'insiste pas.
Contrairement aux autres hommes qui m'auraient probablement déclaré « on pense toujours à quelque chose », John a choisi de sourire en silence.
Est-ce un sourire déçu ?
Est-ce un sourire moqueur ? Je ne saurais le dire au juste.
Dans le hall central de l'aéroport, il passe un coup de fil rapide et se tourne vers moi. Avec son jean et sa chemise noire ouverte sur son torse, il est tout simplement magnifique.
– Je m'envole dans une petite heure pour quelques jours. Je viens de demander à mon chauffeur de te reconduire chez toi. Il sera là dans un instant.
J'acquiesce en souriant, mais je me sens triste.
Ça sonne un peu comme un adieu, c'est froid. Je voudrais être capable de mettre les cartes sur la table à mon tour, comme il l'a fait lui-même avant le décollage en jet, de lui poser franchement les questions qui m'obsèdent, mais je me contente de dire :
– Très bien, John. Merci pour tout.
– C'est moi qui te remercie, répond-il en dansant d'un pied sur l'autre. Tu as été parfaite.
Je n'ose pas lui demander s'il fait allusion au shooting de Milan ou à notre nuit torride dans le jet. Son sourire est tellement beau que j'aimerais me jeter dans ses bras, mais cette étrange gêne entre nous m'en empêche.
– Je te souhaite un super shooting.
– Et moi un excellent voyage.
Mais où vas-tu d'ailleurs ?
Même cette question, je ne me sens pas en droit de la poser. C'est comme si nos corps avaient suffisamment parlé.
Un homme de haute stature en livrée s'approche de nous et s'adresse à John:
– Bonjour, monsieur White.
– Bonjour Frederick, je vous présente Alexandra Leduc que vous serez gentil de conduire jusqu'à chez elle. Alexandra , voici Frederick, le meilleur
chauffeur de la ville des Anges.Frederick se penche pour me saluer et me propose de le suivre.
J'attends que John me prenne une dernière fois dans ses bras ou m'embrasse ne serait-ce que sur le front, mais son portable sonne et il m'adresse "un sourire embêté :
– Pardonne-moi, Alexandra, je dois répondre à cet appel.
– Pas de problème, John.
Je prends sur moi pour sourire à mon tour, puis je tourne les talons.
Avant de passer le seuil pour rejoindre mon chauffeur qui patiente devant la portière ouverte d'une limousine, je regarde par-dessus mon épaule pour essayer d'apercevoir mon photographe.
Mais il a disparu.
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FIGHT FOR US
ChickLitL'Amour est-il vraiment plus fort que tout ? Alexandra Leduc est une jeune mannequin repérée par l'agence ELITE à qui tout sourit. Les marques les plus célèbres la veulent pour égérie, les hommes succombent à son charme insolent... elle a le monde à...