Chapitre 15 - Le passé d'Edel

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Anthémis avait fini par rattraper la Pythonisse de justesse avant qu'elle ne trempe les pieds dans l'eau de la Diphane, le fleuve artificiel qui arpentait une bonne partie d'Hodei.

- Pourquoi ... ? murmura la femme.

La jeune fille tapota légèrement le dos de la Pythonisse, ne sachant pas trop comment réagir.

- Ne vous en faites pas, Berbéris m'a aussi dit que j'étais un monstre il y a encore quelques heures. J'ai l'impression qu'il n'aime pas grand monde sur cette terre ...

- Pourquoi ? répéta la femme comme une plainte. Pourquoi m'avoir conduite ici ? J'étais certaine qu'en sortant de mon logis, rien n'aurait changé à avant ...

Anthémis la considéra, ne comprenant pas bien ce que ces paroles signifiaient.

- Et voilà que tout recommence ! continua la Pythonisse. Je ne suis qu'un monstre, après tout. Ils ont raison. Laissez-moi ici, je ne vous causerai que des problèmes sinon. Je porte malheur.

- Quoi ? Vous n'allez quand même pas vous apitoyer sur votre sort à cause de ce que ce type vous a dit ?

La jeune fille savait ce que de simples mots pouvaient provoquer dans un esprit trop fragile, mais du point de vue extérieur qu'elle possédait de la situation que vivait la Pythonisse, elle ne supportait pas que cette dernière se laisse manipuler aussi facilement.

- Ce n'est pas lui, rétorqua la femme. Pas seulement lui. C'est tout le monde.

- Vous les détestez ? demanda calmement Anthémis.

- Pardon ?

- Ces gens qui vous traitent de monstre, vous les détestez ?

La Pythonisse sembla hésiter quelques secondes.

- Je ... je ne comprends pas vraiment le verbe « détester » ...

- Est-ce que vous ne pouvez pas les supporter ? Est-ce que, quand vous sentez leur présence, vous n'avez qu'une envie et c'est vous éloigner le plus possible d'eux ? Est-ce que vous auriez préféré ne jamais les connaître ? Est-ce que rien que leur voix vous agace ?

- Je suppose ... que oui ... Est-ce cela, détester quelqu'un ?

- Je ne sais pas, mais ça y ressemble.

La femme sembla songeuse.

- Si vous les détestez, montrez-leur qu'ils ne valent rien pour vous, que vous vous relèverez quoiqu'ils puissent vous dire. Ne vous apitoyez pas comme ça, soyez forte.

C'était bien la première fois qu'Anthémis conseillait quelqu'un ; habituellement, le sort des personnes l'entourant l'importait peu. Mais cette fois-ci, elle avait à peine eu à réfléchir à ce qu'elle dirait, parce que le petit discours qu'elle avait sorti à la Pythonisse était similaire à ce que lui avait Ambroisie, deux ans auparavant, lorsqu'elle était victime de harcèlement au collège.

- Facile à dire ..., émit la femme.

- Personnellement, je préfère être insultée par quelqu'un comme Berbéris plutôt qu'il me complimente. S'il se mettait à m'apprécier, je le prendrais comme une insulte, remarqua Anthémis.

Les lèvres de la femme laissèrent paraître un léger sourire.

- Vous n'avez pas tort, articula-t-elle. Je ne le connais pas, mais pour le peu qu'il m'ait dit, je peux être certaine qu'il n'est pas de bonne compagnie.

- C'est le moins qu'on puisse dire, soupira Anthémis. Et puis, il nous cache des choses, j'en suis sûre.

- Son odeur.

Reflétés T1 - LunariaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant