La terre était ronde

Chapitre 9 : Lili

« Mettez-vous par groupe de deux et choisissez votre ville pour l'exposé. »

Lili tiqua. C'était le moment parfait.

Maintenant qu'elle s'était engagée dans ce pari idiot avec Adèle, elle était sérieusement déterminée à relever le défi. Ne serait-ce que pour prouver à Adèle que oui, personne ne pouvait lui résister. C'était important, pour Lili. Elle avait un égo et une réputation à préserver. C'était à cela qu'elle se raccrochait, cela faisait partie de son identité.

Lili se recoiffa rapidement, bien que sa beauté naturelle faisait déjà des ravages, et se releva pour marcher en direction de Sam. Le roux fixait un point dehors, l'air pensif. Il a l'air un poil ennuyeux, quand même. Qu'est-ce qui m'a attirée chez lui en début d'année, déjà ?

Lorsque le rouquin tourna la tête vers elle, son cœur rata un battement et elle eut la réponse à sa question. Ses yeux. Deux billes émeraudes où semblaient se refléter les remous de l'océan tant elles étaient expressives. Elles ressortaient étrangement au milieu de ce visage pâle constellé d'adorables tâches de rousseur et de ces cheveux roux sauvages.

Dis donc, je deviens poète. Mais il est beau, quand même.

« Tu veux quelque chose ? demanda t-il d'une voix presque étouffée. »

Malgré le ridicule tremblement qui déformait sa voix, Lili reconnut un timbre rauque et sombre, légèrement éraillé. Cela lui plaisait bien.

« Ça te dit qu'on se mette ensemble ? demanda t-elle. »

Ses sourcils firent des circonflexes étonnés. C'était vrai que Lili lui avait d'abord témoigné beaucoup d'intérêt, avant de l'ignorer du jour au lendemain. C'était toujours comme ça avec ses ex ; elle se lassait vite. Sauf que Sam ne devait pas vraiment comprendre la situation.

« Euh... »

Il tourna la tête à gauche, à droite, comme s'il cherchait désespérément un moyen d'échapper à Lili. Bon, ça va être plus compliqué que prévu.

« Ok, finit-il par soupirer de mauvaise grâce.
- Super ! s'écria Lili d'un air triomphant. On doit faire quoi, déjà ? Choisir une ville française et présenter ses atouts et tous ces trucs ennuyeux ? »

Sam acquiesça timidement. Il était mignon, dans son genre. Lili aimait bien les personnes introverties. D'une part, ils la laissaient briller ; d'autre part, ils avaient cette aura calme étrangement apaisante. Cela faisait du bien.

« Je propose Paris, lança t-elle.
- Paris ? répéta Sam, crispé.
- Oui, tu sais, la capitale, plaisanta Lili. Nord de la France. Ville de l'amour, très touristique, tout ça. »

Sam semblait au bord de la panique. Lili l'observa en plissant les yeux. Que lui arrivait-il ? Il était à la limite de l'asphyxie. Si ça se trouve, Lili devrait lui faire du bouche-à-bouche. Au moins, ça aurait le mérite de nous faire passer la deuxième.

« T'aimes pas Paris ? demanda t-elle, intriguée.
- Oh, si, se força t-il à articuler. Ça me rappelle juste... des trucs. Je venais de là-bas, avant. »

Intéressant. Sam semblait avoir pas mal de secrets et un passé plutôt lourd que Lili rêvait de découvrir. Il avait vraiment un air de poète torturé, c'était changeant. Enfin, non pas que Lili le voyait comme une simple distraction - même si ce n'était pas totalement faux. Ce pari lui plaisait simplement de plus en plus.

« Pourquoi pas Paris ? insista t-elle, curieuse.
- Pas Paris, c'est tout. »

Et après, on dit que les filles sont chiantes. Super, la communication. Sam semblait voir défiler devant des images terribles et c'était tout juste s'il ne tremblait pas. Ce garçon piquait de plus en plus sa curiosité.