Chapitre 36 : Matth

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Les astres avaient décidé de se liguer contre lui et de lui faire passer la pire soirée de sa vie, Matth en était sûr.

Il s'était rendu à la soirée de Lili dans un état certes énervé, mais il s'était promis de ne pas déraper et de ne pas toucher aux substances douteuses, malgré les encouragements de ses amis. Mais là, ce qu'il venait de voir... Il avait besoin d'un bon verre pour l'oublier.

Cet idiot de Raphaël avait posté une photo de lui et Olenka sur Instagram, qui datait d'hier. Une photo simple, où ils éclataient de rire alors qu'ils travaillaient au MacDonald's. Matth était hors de lui, et il ne cherchait même pas à savoir si sa réaction était justifiée.

Voir Olenka sembler si heureuse avec un autre le rendait malade. Il ne voulait pas qu'un autre rende heureuse Olenka, il voulait être le seul capable d'illuminer ses yeux verts et faire apparaître sa petite fossette sur la joue droite. Est-ce qu'il était malade, d'être aussi possessif ? La vérité, c'était qu'il avait été habitué à toujours prendre soin des autres, parfois au détriment de lui-même. Cela avait nourri en lui de fortes insécurités et une difficulté à nouer des relations saines. Il donnait toujours trop aux autres, car il était persuadé que c'était son rôle. Alors, quand on ne lui donnait pas autant en retour, il devenait fou.

Et s'il n'était pas fait pour Olenka, en réalité ? Il s'était tellement attaché à sa blonde, en un temps si restreint, qu'il se demandait s'il n'avait pas foncé tête baissée dans un guet-apens. Il n'avait pas réfléchi et avait vécu « au jour le jour », sans tenter de mettre un frein à ses sentiments qui grandissaient chaque jour un peu plus. Et aujourd'hui, il se retrouvait incapable de les gérer et de se gérer. Or, toute la vie de Matth tournait autour de son self-control : il avait vite appris à faire fi de ses sentiments pour protéger sa famille. Il ne pouvait pas se permettre le moindre écart. J'ai merdé...

Alors qu'il avait besoin de prendre l'air, Matth s'enfonça davantage dans la maison de Lili, à la suite de cette dernière, à la recherche d'alcool. Il n'avait bu qu'une fois en soirée et s'était juré de ne pas recommencer, vu que les conneries qu'il avait faites après. Mais là... Cette photo le mettait en rogne, encore plus que la discussion qu'il avait entendue entre Olenka et ses parents, et il était incapable de résister à l'appel d'une promesse à l'oubli et à l'ivresse. Lili disait « oublier » en buvant, et Matth en avait cruellement besoin.

« Alors, mec, tu as réussi à te détacher de ta blonde ? lui demanda soudain Léo, complètement saoûl.
- Ouais, marmonna Matth, agacé. »

Il ne l'avait pas quittée pour qu'on lui parle d'elle. À présent, il voulait juge oublier la rage qui battait dans ses veines. En réalité, il était surtout en colère contre lui-même.

« Super ! L'étalon du lycée est à nouveau disponible.
- Non, le contredit aussitôt Matth. Je suis toujours avec elle.
- Oh, arrête, mec. On sait tous comment tu es, tu ne tarderas pas à aller voir ailleurs.
- Qu'est-ce que tu racontes, putain ? gronda Matth en le poussant violemment. Casse-toi, t'es bourré. »

Contre toute attente, Léo passa son bras autour de l'épaule du grand brun et le dirigea vers le canapé en prenant plusieurs bières. D'habitude, les gens fuyaient Matth dès qu'il commençait à s'énerver, mais Léo avait tellement confiance en lui que Matth ne l'inquiétait même pas. Matth devrait peut-être lui remettre les idées en place.

« Bon, mec, dis-moi tout, reprit Léo. Pourquoi tu as quitté Princesse Olenka ?
- Pourquoi tu l'appelles comme ça ? ne put s'empêcher de demander Matth, contrarié - tous les mecs de ce bahut sont en chien sur elle, ma parole !
- Bah, c'est un peu la princesse parfaite, Olenka...
- Quoi ? Mec, on voit que tu ne la connais pas, putain. Matth vida rapidement sa première bière en repensant à sa blonde, submergé par une fureur mêlée d'amour et de peine. Les gens collent l'étiquette « parfaite » au-dessus du crâne d'Olenka parce qu'ils ne la connaissent pas vraiment. Et si Olenka ne fait rien pour y remédier parce qu'elle fout de ce que les autres pensent, ça ne veut pas dire que c'est vrai ! Olenka ne joue pas à la miss parfaite ou quoi. Elle ne cherche pas à se donner un genre, ça, c'est ce que disent les gens quand ils la voient, parce qu'elle apparaît toujours belle et joyeuse. Mais c'est complètement stupide ! Olenka... Elle est extraordinaire. Et ça me les brise de voir tout le monde la qualifier banalement dans la case « parfaite » alors qu'elle vaut tellement mieux que ça. Elle n'est pas parfaite, c'est ça qui est beau. Ce sont ses défauts qui la rendent si charmante, ses piques incessantes et son caractère irritable le dimanche matin...
- Calme-toi, tu vas t'étouffer, l'interrompit Léo, pas vraiment intéressé par sa tirade mais plutôt impressionné. Eh bien, il semblerait qu'elle te plaise vraiment. C'est bizarre, quand même. Comment tu as su que c'était elle, la bonne ? »

La terre était rondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant