Partie 1 : Perdue

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     Mon dernier souvenir est un cri, un effroyable cri... Le mien peut-être....

     Je suis allongée, face contre terre. Je ne parviens pas à ouvrir les yeux, le soleil est trop intense et me force à les refermer. Le soleil ? Face contre terre ? Qu'avait-il bien pu m'arriver ? Mon dernier souvenir, avant ce cri atroce était de conduire ma vielle Peugeot 206 grise. Je roulais pour échapper à quelque chose... Peu importe ! En remuant les doigts, je comprendsp que je ne suis pas face contre terre mais contre le sable... Je me concentre, il n'y a pas de plage proche de là ou j'étais censé me trouver... Une aire de jeu peut-être ? Ne pouvant me servir de mes yeux, je me sers de mes autres sens. Mon odora m'indique une odeur de sel, de vase aussi peut-être. Je concentre à présent mon attention sur mon ouïe et il est en parfait accord avec mon odora et mon touché, aucun doute possible, je suis sur une plage. Le bruit des vagues, le chant des mouettes, le sable, l'odeur... Tout me l'indique. Comment est-ce possible ? Aux dernières nouvelles, il n'y a pas de plage aux alentours de Paris...

     Il faut que je bouge, lorsque je remue les lèvres, une douleur lancinante me force à ne plus bouger. Mon visage est endolori. Je prends appui sur mes mains afin de me relever mais la douleur m'étourdi, je me laisse retomber sur les fesses, me contentant d'une position assise. Je me frotte les mains l'une à l'autre pour en retirer le sable et les portes à mon visage, je l'effleure à peine, pourtant ce simple contact m'arrache un gémissement de souffrance. En frottant mes doigts les uns aux autres je constate qu'ils sont recouverts d'un liquide sombre, visqueux et granuleux, du sang mêlé au sable ? J'ai l'impression d'avoir le côté droit du visage en mille morceaux, d'être profondément touché dans la chaire et cette idée me fait paniquer.

     Une vague d'eau vient soudain me fouetter le visage. Je suis d'abords soulagée d'être débarrassée d'une bonne partie du sable que j'avais sur moi, mais ce soulagement est bien éphémère, j'ai l'impression qu'une vague d'acide vient de percer chacun des pores de ma peau, le sel de l'eau vient s'immiscer dans les plaies et cette douleur est insupportable. Je ne peux retenir un hurlement, mon visage n'apprécie pas le mouvement, ma bouche, ma joue, mon œil, tout semble être en pleine explosion. Ce supplice me fait ouvrir les yeux d'un coup, ou plutôt l'œil gauche car le droit refuse de m'obéir. Je me fiche d'être ébloui, je souffre et personne ne vient à mon secoure. N'y a-t-il donc personne pour me venir en aide ? Je ne distingue rien, le soleil s'acharne contre moi ! D'où lui vient cette féroce animosité ? Ai-je contrarié le dieu de la nature ? A force de cligner de l'œil, je m'acclimate doucement repoussant les assauts de ce soleil diabolique. Je découvre alors une mer qui semble elle aussi animée par le démon et me repousse sur le sable, je recule, me traînant en arrière en poussant sur mes jambes, tirant sur mes bras. Cet effort surhumain me vide de tout ce qu'il me reste d'énergie, sans m'en rendre compte, je sombre dans un profond sommeil.

     A mon réveille, je n'ai aucun mal à ouvrir l'œil gauche, le droit refuse toujours de coopérer. La nuit est là. Elle semble être tombée comme par magie. Des animaux hurlent à la lune, ce qui ne me rassure pas. Ma petite sieste improvisée m'a remise d'aplomb, ou du moins m'a permis de récupérer un peu de force. Je me retourne et m'étonne de trouver une forêt derrière moi. Très dense, sombre et peu accueillante. La nuit m'offre pourtant une lune pleine, ronde et rayonnante. Le dieu de la nature à peut-être fini par avoir pitié de moi... J'ai toujours aimé la nuit, lorsque j'étais enfant, c'était un moment de partage avec ma mère, nous nous allongions dans le jardin en été pour regarder les étoiles. C'est alors que je me rends compte que je ne trouve aucune des constellations que je connais. Assurément, je ne peux pas être en France, encore moins à Paris... Un dilemme s'offre donc à moi, dois-je rester sur la plage et attendre le jour, ou dois-je m'aventurer cette forêt qui j'en suis certaine, me réserve mille pièges et mystères...

Entre deux mondes...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant