Chapitre 5

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Gon se leva de son bureau. Il n'y avait rien à faire, il n'arrivait pas à se concentrer sur son cours de Maths. Les nombres dansaient sous ses yeux, et il avait beau lire et relire les propriétés énoncées, leur sens lui échappait. Il alla regarder par la fenêtre. Le soleil venait juste de disparaître à l'horizon, et les premières étoiles scintillaient déjà. Gon aimait bien regarder le ciel. Il ne croyait pas en Dieu, mais aimait l'idée que ses parents connaissaient là-haut le bonheur et la paix éternelle. Regarder le ciel le rendait toujours vaguement mélancolique. C'était une sensation qu'il affectionnait, et il avait passé beaucoup de temps le soir, allongé dans l'herbe en regardant le ciel, lorsqu'il était encore à l'île de la Baleine. Maintenant qu'il habitait en ville, il devait se contenter de regarder par la fenêtre, de sa chambre. Encore quelque chose qu'il avait dû abandonner, en venant ici.

Trois coups timides frappés à sa porte le tirèrent de sa rêverie. Il se retourna, et s'écria, d'une voix enjouée :

« Entrez ! »

La porte s'entrouvrit doucement, laissant apercevoir dans l'entrebâillement de la porte la fine silhouette de Mito. Celle-ci s'avança silencieusement, souriant gentiment à Gon, mais celui-ci nota la tristesse dans ses yeux. Il s'assit sur son lit, invitant ainsi Mito à faire de même. Ils gardèrent le silence un moment, puis.

« Gon.

- Mito-san ?

- Gon, dis-moi. Es-tu heureux ici ? Est-ce que tu vas mieux ? »

Gon soupira. Sa « crise de pleurs » de l'avant-veille avait culpabilisé Mito.

« Je t'assure, Mito-san, je vais beaucoup mieux. Je vais me plaire ici, il me faut juste un peu de temps pour m'adapter à ma nouvelle vie ! Et puis. tu sais, ma déprime n'était pas seulement due au déménagement.

- Oh. Je m'en doutais un peu. »

La figure de Mito s'éclaira d'un sourire. Gon la regarda, heureux d'avoir pu enlever toute tristesse de son visage, mais sans comprendre ce qui avait pu faire naître son sourire.

« Gon, tu as rencontré quelqu'un, n'est-ce-pas ? »

Gon se figea. Que disait-elle ? Lui, Gon, aurait. rencontré quelqu'un ? Mito avait toujours connu toutes ses émotions sans qu'il ait besoin d'en parler. Mais là. lui, Gon, serait. amoureux ? Dans son esprit régnait la confusion. Le seul visage qui s'imposait à lui, depuis qu'il était à Padokia, était celui de Kirua. Et il n'était pas amoureux de Kirua. Il se rendit compte alors qu'il n'avait pas pris le temps de s'arrêter sur ses sentiments, depuis le déménagement, et que, en ce moment même, ceux-ci lui paraissaient très flous. Il n'arrivait pas à définir ce qu'il ressentait. C'était un sentiment étrange, qu'il n'avait jamais éprouvé auparavant. Avant, il avait toujours su mettre un nom sur ce qu'il ressentait. Mais là. Devant son silence, Mito répondit :

« Écoute, tu m'en parleras lorsque tu le désireras, d'accord ? Et tu me présenteras cette personne. »

Elle lui ébouriffa tendrement les cheveux, sortit de la chambre, et referma silencieusement la porte derrière elle.

Gon s'étendit sur son lit, les bras en croix et les yeux grands ouverts. Ce qu'il éprouvait pour Kirua. qu'était-ce ? De l'amitié ? De l'amitié très forte, différente de celles que Gon avait connues jusqu'alors ? Ou bien. était-ce de l'amour ? Gon ferma les yeux. Son envie si forte d'être l'ami de Kirua. la douleur au creux de son ventre lorsque celui-ci l'avait rejeté. sa joie démesurée d'avoir pu parler avec lui presque normalement. son omniprésence dans son surtout. son c?ur qui s'était mis à battre sans raison lorsque Kirua s'était penché sur lui. Il rouvrit les yeux. La certitude s'imposa à lui, éclatante, évidente. Ce n'était pas de l'amitié. Il aimait Kirua. Il était amoureux. Il sourit. Cette chère Mito, elle savait avant lui ce qu'il ressentait. Il resta ainsi, le regard dans le vide, jusqu'à ce que la fatigue l'emporte dans le sommeil.

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