Chapitre 8

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La jeune fille ne se sentait pas bien, la chose dure sur laquelle elle était allongée et la lumière qui lui agressait les yeux jouant beaucoup sur son état. Mais pas que… Elle avait l'impression d'être passée sous un rouleau compresseur et son crâne lui faisait un mal de chien…

Avec un gémissement de douleur, la demoiselle tenta d'ouvrir les yeux mais dut les refermer très rapidement face aux assauts des rayons du soleil qui commençait lentement à redescendre sur l'horizon, annonçant la fin de la journée. En grognant, elle passa une main dans ses cheveux pour se frotter la tête en essayant vainement d'en retirer ces picotements atroces qu'elle ressentait.

Depuis quand les avait-elle aussi courts ?

Elle ne se souvenait plus…

Finalement, puisque la jeune fille ne voulait pas bouger de là où elle se trouvait, allongée sur un sol terreux en avait-elle conclut en touchant celui-ci avec ses mains, elle attendit patiemment que le soleil soit assez bas pour cesser de lui brûler les rétines. Après tout, elle n'avait rien d'autre à faire, ou en tout cas, rien ne lui venant à l'esprit… Elle se sentait juste d'une extrême légèreté sans arriver à comprendre pourquoi.

Quand l'astre solaire ne fut plus sur ses yeux, la jeune fille les ouvrit enfin pour fixer silencieusement le ciel bleu qui s'étendait à l'infini au dessus d'elle, dénué de nuage. La journée avait dû être particulièrement agréable ce jour là si l'on était habillé d'un manteau, mais elle n'en avait aucun souvenir et elle ne portait rien sur elle, laissant au vent frais la possibilité de la refroidir à volonté.

Mais elle ne voulait pas bouger… L'envie s'était envolée en même temps que ses pensées… Son esprit était totalement vide…

Lentement, la jeune fille tourna la tête et regarda d'un air détaché les arbres autour d'elle et elle plissa légèrement les yeux afin de mieux voir entre ceux-ci, une place centrale de verdure.

Où était-elle ?

La demoiselle n'en avait aucune idée…

Comment s'était-elle retrouvée ici ?

Rien ne lui revenait…

Pour quelles obscures raisons se retrouvait-elle allongée sur le sol comme si elle s'était évanouie ?

Sa mémoire lui faisait défaut...

Elle tourna une nouvelle fois son regard vers cette immensité bleue. La jeune fille tenta à plusieurs reprises de soutirer de sa mémoire toutes les réponses à ses questions, réponses qu'elle savait posséder…

Enfin… Qu'elle savait avoir possédées un jour…

Seuls un noir total et une légère migraine lui répondirent et en lâchant un soupire, elle s'arrêta… La jeune fille avait l'impression que ça ne lui servait à rien d'essayer… Sa mémoire était vide, comme celle d'un enfant qui commencerait seulement à mémoriser ce qu'il voyait autour de lui. Et puis, elle avait cet étrange sentiment d'avoir possédé des souvenirs contraignants... Ceux concernant ses parents, sa maison et une bonne partie de tout le reste, en faisaient partis. Mais aussi ce sentiment d'en avoir oublié certains qu'elle chérissait ainsi que celui d'avoir accomplit quelque chose, il y a de cela une poignée de minutes sûrement. Mais rien ne lui revenait.

Seulement… Ça ne l'effrayait pas tant que cela… Même si c'était peut-être pour cette raison qu'elle se sentait aussi légère qu'une plume.

Cependant, quelques questions qui lui firent froncer les sourcils, se pointèrent dans son esprit.

Tout d'abord… Qui était-elle ?

En fouillant une nouvelle fois dans ses souvenirs, un unique prénom daigna lui revenir… Alice… juste Alice…

Ensuite, quel âge avait-elle ?

A ce compte là, rien ne ressortit de sa mémoire vidée tel une commode dont on aurait ouvert tous les tiroirs afin d'en extraire tous les vêtements qu'elle contenait. De ce fait, la jeune fille passa à la dernière interrogation.

Qu'allait-elle faire maintenant ?

C'était une très bonne question… Elle ne savait pas où aller et ne connaissait plus personne, alors elle trouva que c'était juste vachement plus simple de rester ici sans bouger à essayer de percer le mystère de son amnésie. Mais comment penser convenablement quand on avait l'impression étrange de se trouver dans un rêve ?

Alice suivit un oiseau solitaire des yeux tandis qu'il passait au dessus d'elle. Bien qu'extrêmement loin dans les airs, la jeune fille fut tentée de lever son bras droit dans sa direction puis ramena sa main à sa hauteur pour regarder d'un air curieux le cercle noir qui y était dessiné. Puis en levant la seconde, elle put remarquer le même genre de cercle inscrit sur sa peau. La jeune fille les fixa un instant sans comprendre avant de les claquer l'une contre l'autre dans une impulsion, croyant que cela allait lui permettre au moins de savoir ce qu'elle faisait ici. Mais comme rien ne se produisit, elle baissa ses bras qui rejoignirent le sol, dans un énième soupire.

Soudainement, l'air autour d'elle se remplit d'une tension insoutenable tandis que de nombreux éclairs rouges sortaient de terre pour s'élever vers le ciel. Alice regardait ce spectacle d'un air perplexe, sans peur ni crainte au fond de ses yeux bleus.

Puis elle sentit son esprit dériver et elle s'évanouit une nouvelle fois.
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Une douleur lancinante lui traversant l'estomac et remontant jusqu'à sa poitrine la ramena à la réalité brutalement, la faisant haleter et gémir en bougeant faiblement la tête de gauche à droite. Ses oreilles bourdonnaient alors que des murmures et de l'agitation s'étaient créés autour d'elle sans qu'elle n'y prête tant d'attention. Tout ce qu'elle voulait c'était que cette torture cesse… Que ce qui semblait lui déchirer la peau de son abdomen s'arrête enfin.

-« Appelez moi immédiatement du renfort ! Et veuillez m'envoyer l'imbécile qui l'a envoyée ici, j'aurai quelques mots à lui dire ! » Entendit la jeune fille crier à côté d'elle.

Une multitude de voix répondit en retour à cet homme avant qu'il n'y ait un remue-ménage alors qu'il semblait y avoir de nombreuses personnes qui venaient de se mettre à courir dans un long couloir, produisant de nombreux échos qui mirent les tympans de la demoiselle à rude épreuve. Cependant, loin de s'apercevoir de sa peau qui blêmissait à vue d'œil, cette même voix grave et autoritaire retentit à nouveau.

-« Et vous, traitez moi au plus vite cette blessure avant qu'elle ne se vide de son sang ! »

Quelque chose fut immédiatement appliqué sur son ventre ce qui enclencha une brûlure insoutenable et une douleur atroce à la jeune fille, qui, sous le coup, tourna de l'œil.
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Ouvrant un œil lentement, puis, papillonnant des yeux, Alice s'éveilla doucement et émergea de son sommeil forcé. Tournant le regard afin d'examiner la pièce où elle se trouvait désormais, la jeune fille fut septique en s'apercevant de la blancheur immaculée de celle-ci ainsi que de l'odeur insupportable d'antiseptique qui embaumait l'air. Une petite fenêtre à sa droite donnait sur un arbre donc le feuillage bougeait légèrement sous les mouvements de la bise. Alice se trouvait dans un hôpital, elle en était certaine. Après tout, le lit, aussi coloré que la chambre, n'était pas très confortable et la perfusion qu'il y avait à côté d'elle était indéniablement accrochée à son bras gauche par une aiguille enfoncée au niveau du creux de son coude, lui procurant, semblerait-il, une petite dose de morphine puisqu'elle se sentait particulièrement bien par rapport à la dernière fois où la jeune fille était éveillée.

Cependant… Alice ne savait toujours pas ce qu'elle faisait ici, et après avoir essayé en vain de bouger afin de sortir du lit, une pointe de douleur l'en empêcha. En pinçant les lèvres, la brune aux cheveux courts releva le drap blanc qui la couvrait ainsi qu'avec peine, un morceau de sa chemise d'hôpital bleue. Confuse, elle passa distraitement ses doigts pâles sur les bandages qui lui barraient le ventre, de nombreuses questions tournant dans sa tête.

Bon sang… Que lui était-il arrivée ?!

La porte de la pièce s'ouvrit alors soudainement. Alice leva le regard pour voir l'infirmière qui y rentrait et posait ses yeux sur elle. Celle-ci abordait un masque d'indifférence total par rapport à son réveil et ne lui adressa aucun mot alors qu'elle s'approchait de sa couchette afin de se pencher sur sa blessure.

La femme avait de longs cheveux noirs attachés en chignon strict et portait des lunettes sur le nez. Presque sans délicatesse, elle retira le bandage de la patiente qui dut se mordre les joues pour éviter aux jurons qu'elle savait proche de sortir de sa bouche, de s'échapper d'entre ses lèvres. En baissant les yeux sur ce qui la faisait un souffrir, la brune ne put empêcher d'aborder un air de parfaite surprise. Une ligne rougeâtre recousue et saignant légèrement était clairement visible juste à quelques centimètres de son nombril.

Alors que l'infirmière silencieuse, qui avait plombé l'ambiance pour des raisons qui échappaient à la jeune fille, commençait à nettoyer la plaie, faisant grimacer Alice, celle-ci ne put s'empêcher de murmurer d'un air perdu.

-« Je m'excuse de devoir interrompre votre travail… Pourriez-vous me dire ce que je fais ici et comment me suis-je faite cette blessure ? »

La femme aux cheveux noirs suspendit son geste, une pince tenant un coton imbibé d'alcool dans la main, ce qui fit frissonner la demoiselle. Sa voix, claire, nette et tranchante s'éleva en réponse.

-« Vous ne vous en souvenez pas ? »

-« Je ne me souviens de rien… »

L'infirmière resta silencieuse en la fixant étrangement des yeux, comme si elle cherchait à convaincre la jeune fille par la simple force de son regard de lui dire toute la vérité. Alice ne savait vraiment pas pourquoi elle réagissait ainsi, ni pourquoi elle ne semblait pas l'apprécier, ni la croire.

Indécise, la demoiselle baissa le regard sur ses mains, cette fois-ci vierges d'inscriptions. Elle les fixa pendant plusieurs minutes en se disant que ce corps était le sien sans vraiment l'être. Après tout, si elle se référait à ses derniers souvenirs, que la jeune fille préférait garder pour elle, entre les lumières rouges puis son arrivée à l'hôpital, il devait y avoir un fossé immense, si ce n'était aucun lien logique. C'était presque comme si elle avait changé de monde…

-« Dites-moi… Pourriez-vous me rappeler mon prénom, s'il vous plait ? » Questionna Alice sans relever son regard de ses mains qu'elle faisait bouger en pliant et dépliant les doigts.

Elle ne savait pas ce qui avait bien pu lui faire changer de comportement, mais bizarrement, l'infirmière parut beaucoup plus bienveillante qu'il y avait de cela quelques instants et lui offrait un sourire chaleureux que la demoiselle ne comprit pas.

-« Vous vous appelez Alice, Alice Mondstein. Vous savez, c'est surprenant que vous soyez devenue amnésique ! »

Le ton joyeux de la femme surprit un peu la jeune fille qui la regardait d'un air perplexe. Elle rayonnait presque tandis que ses gestes sur la blessures de la brune reprenaient de façon bien plus doux. Alice ne tarda pas à comprendre que la personne, dont elle venait probablement de prendre la place, n'était décidément pas appréciée par cette infirmière, bien qu'elle ne sache encore pourquoi.

La jeune fille ne put s'empêcher de demander, curieuse d'en savoir un peu plus sur cette autre Alice qu'elle était sûrement.

-« Désolée de vous le demander ainsi, mais quand quelqu'un est amnésique, ne devriez-vous pas être attristée ? »

Quand elle vit la bouche de l'infirmière s'ouvrir en grand et ses yeux s'écarquiller de stupeur ainsi que d'une légère crainte, Alice s'empressa de rajouter en secouant fébrilement ses mains devant elle avec une moue accablée.

-« Pardon ! C'est juste que vous semblez particulièrement contente maintenant alors j'ai pensé que… »

-« Ne vous inquiétez pas ! Vous avez l'air de bien récupérer et d'être en très bonne forme, c'est tout ce qui compte et c'est ce qui me rend aussi joyeuse ! » En retrouvant son air heureux qui ne trompa pas la demoiselle.

Elle en était certaine maintenant, « l'autre Alice », si elle se référait à son début de théorie, avait dû être quelqu'un qui n'était vraiment pas appréciée pour que cette infirmière se réjouisse de son amnésie. Mais pourquoi ? Alice ne voulut cependant pas creuser plus loin… Elle se sentait encore trop fatiguée par la blessure et par la morphine qui circulait dans son sang pour se pencher sur ces interrogations.

-« Vous ne vous souvenez vraiment de rien ? » Interrogea doucement la femme en posant délicatement ses mains sur les épaules de sa patiente qui avait le regard dans le vide, après avoir fini de rebander la blessure.

Alice leva ses yeux.

-« Que m'est-il arrivée ? »

L'infirmière dut sentir une sorte de détresse dans la voix de la jeune fille puisqu'elle prit une grand inspiration avant de répondre.

-« Vous vous êtes faite tirée dessus par votre frère et vous étiez dans un très mauvais état en arrivant à l'hôpital. »

-« J'ai un frère ?! » S'étonna la brune en sursautant.

Bien qu'elle n'en ait aucun souvenir, Alice était pourtant certaine qu'elle n'en avait aucun. Un tiraillement dans son ventre, que la jeune fille se surprit à croire, lui assurait qu'elle avait raison sur ce point là, ce qui lui confirmait encore plus qu'elle ne semblait pas venir d'ici…

Ce qui ne la dérangeait pas le moins du monde !

-« Oui, mais vous pouvez être rassurée du fait qu'il a été attrapé et mis en prison par la milice ! Il ne vous fera plus aucun mal ! »

Face à ces révélations depuis son véritable réveil, la brune resta silencieuse, ne prêtant attention à la femme que quand celle-ci revint vers elle et déposa juste à côté de son lit, un plateau repas sur lequel reposait une assiette et une bouteille de lait frais.

-« Mangez un peu et reposez vous maintenant ! » Proposa la femme aux cheveux noirs en tendant le plat qui débordait presque de pâtes et de poulet émincé.

Toujours sans un mot, la jeune blessée dévora son assiette, surprise de s'apercevoir qu'elle mourait de faim, avant de se sentir à nouveau lourde et s'endormir comme une pierre ensuite.
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Après trois jours dans cet hôpital à se remettre lentement de sa blessure, Alice, qui s'était demandée au moins une bonne dizaine de fois pour quelle raison certains membres du corps médical venaient lui rendre des visites pour simplement s'assurer de son état alors qu'elle ne semblait pas du tout mourante, réussit à écouter furtivement une discussion entre deux infirmiers derrière la porte de sa chambre. D'après ceux-ci, dont un qui était présent ce jour là, la jeune fille était particulièrement mal en point à son arrivée à l'hospice et son cœur aurait lâché sur le chemin avant d'être prise en charge pour une blessure qu'ils avaient due commencer à traiter en urgence. Les médecins, qui l'avait alors annoncée comme décédée, après avoir tenté à de nombreuses reprises de la réanimer, l'avaient envoyée en direction de la morgue.

Ils étaient certains qu'Alice était morte à ce moment là… Son cœur ne battait plus depuis une vingtaine de minutes et impossible de le relancer… Et puis, entre l'espace de soin et la morgue, il fallait au moins dix minutes de trajets et à aucun moment la jeune fille n'avait manifesté un quelconque réveil. Si ce n'était celui auquel ils avaient assisté avant de passer les portes de l'aile dédiée aux morts. Alice était désormais connue dans tout l'hôpital comme étant une miraculée qui aurait repris vie mais dont la mémoire faisait défaut.

La brune se sentait vraiment mieux après ces jours de repos et avait été ravie quand l'infirmière, qu'elle avait vu à son réveil et qui s'occupait désormais d'elle pour sa blessure, lui avait appris que celle-ci guérissait lentement, mais sûrement. Elle portait toujours des bandages, mais elle voyait de légères améliorations quand la cicatrice pas tout à fait refermée était apparente.

Tandis qu'Alice finissait son déjeuner, cette même infirmière rentra dans la chambre afin de lui annoncer qu'elle avait de la visite. Surprise de cela, la jeune fille regarda simplement un homme aux cheveux bruns coupés courts et portant un uniforme bleu rentrer à son tour dans la pièce. A ces habits, la demoiselle le soupçonnait d'être dans la milice, ce qui se confirma quand l'homme se mit rapidement au garde à vous face à elle. La moue qu'il tentait de cacher à celle-ci lui signala facilement que l'annonce de son amnésie n'avait pas dépassé les portes de l'hôpital… En effet, Alice voyait parfaitement que le soldat de semblait pas l'apprécier et qu'il était venu jusqu'ici à contrecœur. Cependant, il lui parla sur un ton diplomate qui ne laissait transparaitre aucun de ses sentiments envers elle.

-« Mademoiselle Mondstein, j'ai été réquisitionné afin de récupérer votre déposition contre la tentative de meurtre de votre frère. Je suis le soldat Nathan Reïht. »

La jeune fille fronça les sourcils. Elle savait bien qu'elle avait un frère maintenant, lui-même qui lui avait causé cette blessure qui continuait à légèrement la faire souffrir de temps à autres. Mais elle ne pensait pas que la milice en viendrait à venir la voir afin de prendre sa vision des faits. Or… Alice n'était aucunement en mesure de la leur fournir. Elle se rendit alors compte que ce qu'il lui était arrivé n'était pas normal, loin de la l'idée de penser à son soi-disant frère, mais plutôt, à sa situation particulière. Et puis, elle avait besoin d'éclaircissements, et seules quelques personnes seraient aptes à les lui donner. Cependant, elle ne pouvait pas compter sur tout le monde ici, la brune n'était pas aussi naïve. De ce fait, il lui faudrait prendre contacte avec une personne en mesure d'écouter ce qu'elle avait à dire, bien que ce soit potentiellement farfelue, mais surtout que ce soit une personne digne de confiance histoire que son histoire ne soit pas dévoilée sous tous les toits. Le tiraillements dans son ventre semblait lui confirmer que c'était bien plus réfléchit de faire ainsi. Alors, la demoiselle demanda subitement, après s'être tue pendant quelques minutes, les yeux dans le vide.

-« Pardonnez-moi de devoir vous interrompre, mais sauriez-vous s'il existe dans vos rangs une personne haut gradée en qui on peu avoir confiance ? J'aimerai lui parler si c'est possible… »

Alice dut se retenir de poser des questions concernant l'air surpris puis irrité du soldat tandis que celui-ci poussait un long soupire, comme mécontent de la tournure de la discussion. Sa mine agacée inquiéta légèrement la jeune fille.

-« Si c'est encore au sujet de cette demoiselle qui accompagnait votre frère la dernière fois que vous l'aviez vu, il faudra vous rendre au poste personnellement. Je ne suis pas venu pour cela et j'aimerai que vous soyez coopérative. »

Comme cette information, que le militaire venait de lui offrir, concernait « l'autre Alice », enfin, selon sa théorie, la brune prit un soin particulier à la ranger dans son esprit afin de s'en souvenir au besoin. Elle préférait se pencher plus tard sur la vie particulièrement troublante que celle-ci avait put avoir afin de se focaliser pleinement sur son locuteur.

Alice s'inclina du mieux qu'elle le put, toujours à demie allongée dans son lit d'hôpital avant de s'excuser sous les yeux confus du militaire. La jeune fille ne grimaça même pas quand elle sentit une pointe douloureuse, provenant de sa blessure, monter lentement jusqu'à sa poitrine.

-« Je m'excuse… Mais je ne peux malheureusement rien vous dire… Je suis devenue amnésique et je n'en ai plus aucun souvenir… »

-« Comment ça ? » S'exclama Nathan Reïht après avoir imité le poisson en ouvrant et fermant la bouche sous les mots qu'il venait d'entendre.

Alice réfléchissait à la meilleure réponse qu'elle aurait put lui fournir, mais rien ne ressortait de son esprit tant elle était troublée par l'aura intimidante et colérique qui semblait presque se détacher du jeune homme. Il n'était pas content qu'elle ne puisse répondre, certes, mais était-ce une raison pour s'emporter comme cela ? Qu'est-ce qu'elle avait fait pour qu'on ne l'aime pas à ce point ?

Heureusement pour la brune, l'infirmière qui regardait silencieusement leur échange depuis quelques minutes, décida de réagir et se plaça entre la malade et le militaire.

-« Soldat Reïht, ma patiente dit vrai, nous nous sommes rapidement aperçus qu'Alice avait perdu une grande partie de sa mémoire. Pour le moment, rien ne lui est revenu encore. »

Ce qui fut surprenant, c'était que la femme parlait sur un ton calme mais qui ordonnait presque au soldat de ne pas forcer à aller plus loin.

Comprenant parfaitement le message transmit, Nathan Reïht se gratta la tête nerveusement en réfléchissant silencieusement quelques secondes. Puis, les épaules basses, vaincu, il murmura seulement en se retournant.

-« Bon, et ben je vais vous laissez alors… »

L'infirmière semblait particulièrement fière de son effet puisqu'elle se tenait légèrement plus droite que d'habitude. Elle regardait d'un œil assuré le départ du visiteur, bien que sa patiente ne l'entendre pas de cette oreille.

-« Attendez ! » S'écria Alice en commençant à se lever dans l'optique de le retenir quelques instants de plus.

La femme ronchonna à l'attention de la malade qu'elle devait retenir sur le lit afin qu'elle ne saute pas littéralement en dehors. La brune essayait de repousser son emprise puis se calma quand elle fut rassurée de voir le militaire s'arrêter et se tourner une dernière fois vers elle.

-« Je sais que je vais me répéter ! » S'empressa de dire la jeune fille. « Mais il y aurait-il quelqu'un avec lequel je pourrai parler de certaines choses sans risquer à ce que se soit ébruité ? »

Décontenancé, l'homme eut un autre moment de réflexion légèrement plus court, avant d'avouer de but en blanc.

-« Il y aurait bien le Colonel Mustang. »

-« Pourriez-vous me mettre rapidement en relation avec ce Colonel Mustang alors ? Ne vous inquiétez pas de mon état, j'ai des jambes et je pourrai parfaitement m'en servir pour aller à sa rencontre. »

Alice semblait particulièrement ravie d'avoir reçu un nom. Mais son bonheur fut presque de courte durée quand son infirmière s'étouffa à sa gauche.

-« Et vos blessures !? Vous devez vous reposer ! » Sermonna celle-ci en mettant ses mains sur ses hanches, définitivement contre l'idée que la jeune fille ne quitte l'hôpital aussi vite.

Mais décidée comme elle l'était, rien ne pourrait l'empêcher de faire ce qu'elle désirait. Sur un ton sans appel, Alice assura alors à la femme aux cheveux strictement attachés en chignon, guère affectée par son interdiction informulée.

-« Pas d'inquiétude ! Mais le plus tôt serait le mieux, promis, je ne forcerai pas. »

-« Bien, est-ce tout ? »

-« Je ne vous retiendrai pas plus longtemps et je m'excuse de ne pas avoir put vous être utile… »

Encore surpris de ce qu'il venait de se passer, le soldat Nathan Reïht ne s'aperçut même pas qu'il lui offrit son salut militaire avant de quitter la pièce. Lui qui s'était juré de ne pas montrer trop de respect envers cette jeune fille qui les avait souvent fait tourner en bourrique, eux, les militaire. Ils avaient autre chose à faire que de s'occuper des problèmes de famille, ce que cette demoiselle n'avait pas sembler comprendre il y avait de cela quelques jours avant cet incident. Mais Nathan devait bien se l'avouer… Avec son amnésie, la Alice Mondstein, qu'il avait déjà été amené à rencontrer, semblait si différente désormais.

Il marmonna dans sa barbe tandis qu'il partait en direction du QG militaire de la ville. Le soldat devrait expliquer à ses supérieurs pourquoi il revenait les mains vides… Ça n'allait pas être une mince affaire non plus de prévenir le Colonel de la demande de la jeune fille, mais elle semblait tellement y tenir que malgré les pensées qu'il aurait put avoir la concernant, il essaierait au moins une fois de lui obtenir une entrevue avec lui.
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Quelques jours suivant cet événement, le soldat Reïht vint une seconde fois trouver la jeune fille afin de lui confirmer que le colonel Roy Mustang avait accepté de la recevoir le lendemain. De ce fait, Alice demanda rapidement à l'infirmière qui s'occupait d'elle d'aller chercher un médecin, qui était chargé de son cas, afin qu'il lui fasse un diagnostic complet, histoire qu'elle sache comment son corps supporterait son départ de l'hôpital et si l'effort qu'elle lui demanderait de fournir pour se rendre d'elle-même jusqu'aux quartiers de la milice n'allait pas aggraver son état.

Fort heureusement pour la demoiselle, les nombreux jours où elle s'était efforcée à prendre du repos avaient payé puisque bien qu'encore fraîche, sa blessure était totalement refermée. Ainsi, les médecins l'autorisaient à rentrer chez elle. Cependant, ils tenaient à ce qu'elle revienne régulièrement jusqu'à ce que les fils de la suturassions lui soient retirés. Elle n'y voyait aucun inconvénient et accepta cette condition, heureuse de pouvoir prochainement quitter cet endroit car sa tête commençait à la faire souffrir, cette odeur entêtante d'antibiotiques y contribuant beaucoup.

Le jour suivant, Alice eut du mal à se séparer de cette femme qui s'était soigneusement occupée d'elle depuis son réveil, et ce ne fut qu'après de nombreux vœux de rétablissement pour la jeune fille et de réussite pour l'infirmière, qu'elles se séparèrent sous le regard désespéré du soldat Reïht qui avait été chargé d'accompagner Alice. Ainsi, la brune aux cheveux courts suivit silencieusement le militaire en dehors de l'établissement, d'une démarche assurée bien que légèrement boitillante. Sa blessure lui causait encore quelques douleurs, mais c'était plus des tiraillements comparées à cette morsure épouvantable qu'elle avait ressentit en se réveillant sur le chemin de la morgue. Alice s'en soutiendrait sûrement toute sa vie, mais bien que la réalité fusse douloureuse, elle n'avait put guère se sentir aussi vivante qu'en cet instant précis où la mort l'avait peut-être approchée de près. Il était probable que si elle n'avait reçu de soins adéquates sur l'instant, la jeune fille aurait rapidement rejoint « l'autre Alice » dont elle avait prit le corps et qui avait succombée à cette même blessure. La jeune fille, qui avait eut largement le temps d'étayer sa théorie, frissonna à cette pensée et préféra regarder les gens, les ruelles et le paysage qui l'entouraient.

Alice fixa sa paume un instant. Elle aurait très bien put croire dur comme fer que le choc de la blessure, qu'on lui avait faite, l'avait réellement rendue amnésique. Mais la jeune fille sentait bien que ce n'était pas le cas. Bien sûr, quelque chose ou quelqu'un l'aurait produite, elle ne niait pas l'évidence, Alice ne se souvenait de rien. Cependant, de part son dernier souvenir, la brune savait que la déficience de sa mémoire s'était produite avant qu'elle ne ressente cette douleur à l'abdomen et de ce fait, avant qu'elle ne se fasse tirer dessus. Mais à ce compte là, deux choses ne collaient pas.

La première, étant l'existence de son soit disant frère, qu'elle était certaine de n'avait jamais eut et jamais connu.

La seconde étant ce brusque changement d'endroit, passant d'une sorte de parc particulièrement agréable à une civière dans un hôpital, avec une douleur lancinante dans le ventre. En plus, si son amnésie s'était déclarée avant qu'elle se soit faite tirer dessus, pourquoi diable ne s'en souvenait-elle pas ?

Bien entendu, cela aurait put très bien s'expliquer par son amnésie, mais comme celle-ci c'était produite avant l'événement, la jeune fille restait confuse à ce sujet. Vint se rajouter ces étranges éclairs écarlates qu'elle avait vu avant de se réveiller à l'hospice... C'était tellement étrange pour Alice qu'elle en avait conclu que la réponse à ses questions devait l'être tout autant. Ainsi, si elle se référait aux réactions de l'infirmière la concernant, la présence d'un frère inconnu, la sensation étrange de ne pas être totalement dans son corps, ces éclairs et son soudain changement de lieu, Alice ne voyait qu'un changement d'univers comme potentielle explication plutôt plausible de sa situation, bien qu'elle n'arrivait tout de même pas à croire totalement cette hypothèse.

Cependant, la jeune fille avait demandé le nom de l'endroit où ils étaient et après l'avoir regardée avec des yeux ronds en se demandant si la demoiselle ne se payait pas sa tête, le soldat qui l'accompagnait se souvint qu'elle était simplement amnésique. Ainsi, tout en continuant à marcher d'un pas assez rythmé, bien que légèrement plus lent afin que la blessée arrive à rester à sa hauteur, il lui expliqua brièvement qu'ils se trouvaient tous deux à l'Est d'un pays appelé Amestris, dans une ville qui se nommait East City, la plus grande de ce côté du pays. Il put voir la demoiselle se replonger dans ses pensées mais ne préféra pas trop creuser puisque cela ne le concernait pas.

Cette information poussait toujours plus en avant cette théorie de deux mondes puisque que la brune, bien que certaine d'avoir déjà entendu ce nom là quelque part, sentait de part son intuition, que l'endroit où elle devait se trouver ne s'appelait pas ainsi. Au moins, la jeune fille se rassurait du fait que l'excuse de l'amnésie marchait particulièrement bien, ainsi, elle pouvait toujours cacher l'endroit d'où elle venait si sa théorie était exacte ainsi que toutes les réactions qu'elle pourrait avoir en découvrant petit à petit la vie qu'elle allait se construire en prenant racine ici.

Un tiraillement dans son ventre lui affirma instantanément qu'elle n'était pas au bout de ses surprises. Il se pourrait bien que son avenir soit sinueux et remplit d'événements. Encore une fois, loin de l'inquiéter, ça la fit doucement sourire.

Le soldat à ses côtés passa sous silence les différentes expressions faciales de la demoiselle, lui indiquant simplement que le grand bâtiment qui s'élevait devant eut, après un portique surmonté de deux lions ainsi que le déroulement d'un long chemin dallé, était le quartier général de l'Est. Bouche bée, la brune s'arrêta un long moment afin de regarder avec attention les grandes bâtisses aux murs blancs qui s'étalaient autour d'elle telles un véritable palace, dont l'une d'entre elles était accessible par une volée de marche. Avec admiration et des étoiles pleins les yeux, elle s'approcha et bascula sa tête vers l'arrière, ses cheveux lui chatouillant le cou, afin de regarder avec attention le grand drapé vert émeraude frappé d'une espèce de dragon incrusté dans un étrange symbole. Bien que la symbolique de celui-ci échappait totalement à la jeune fille, elle était fascinée.

Le soldat soupira lassement avant de faire remarquer à la fillette que le colonel n'avait pas tout son temps non plus et qu'il ne savait pas pour quelle obscure raison celui-ci avait accepté de la recevoir. Il sembla murmurer quelque chose concernant le pouvoir que les femmes pouvaient avoir même sur leur supérieur puis amena la jeune fille à travers de nombreux couloirs. Ils rencontrèrent de nombreuses personnes qui soit les ignoraient, soit faisait un signe de la main au soldat Reïht avec un petit sourire désolé. Alice ne prit pas longtemps à s'apercevoir que certain la regardait de travers et que ces sourires désolés étaient surtout des encouragements silencieux à son guide pour la supporter. Cependant, elle garda son calme, et suivait toujours sans un mot l'homme, ne se gênant pas de fixer avec une curiosité non feinte chaque personne qui l'a regardait plutôt mal. Il était probable que ce fut assez étrange de péter un câble pour ce genre de chose futile en plein milieu d'une foule de militaires surentraînés.

Alice ne comprenait pas pourquoi on la traitait ainsi, mais pour le moment, son but premier était de s'informer. Si elle désirait rencontrer ce Roy Mustang, c'était surtout pour éviter de garder seule sur ses épaules une information qui pourrait la mettre en danger. Elle n'était pas kamikaze et il était fort probable que son changement de comportement en alerte plus d'un, son excuse de l'amnésie ne pouvant pas fonctionner à tous les coups. Et puis, si jamais elle décidait vraiment de ce confier au Colonel, peut être qu'il aurait déjà entendu parler de ce genre de chose.

Alice fut interrompue dans le flot de ses pensées quand son guide ouvrit une double porte donnant sur un grande salle dans laquelle plusieurs militaires assis à des bureaux, s'acharnaient à remplir de nombreuses fiches qui parurent ennuyeuses à la jeune fille. A leurs entrée, toutes les têtes se tournèrent vers eux et la brune dut se faire violence afin de garder un sang froid face à tous ces regards curieux qui, après l'avoir examinée un instant, se tintaient légèrement de compréhension. Elle espérait au fond d'elle que toutes ces personnes ne soient pas comme les autres et qu'ils ne jugeaient pas sur ce qui avait sûrement été dit à son sujet, que la nouvelle de sa perte de mémoire ait atterrit jusqu'ici, bien qu'une grande majorité de QG ne semblait pas au courant ou ne voulait peut-être simplement pas y croire.

Une jeune femme portant le même uniforme militaire que tous les autres soldats et d'ailleurs, seule image de la gent féminine dans la pièce, se leva pour s'approcher des nouveaux arrivants. Ses yeux bruns laissait transparaître un caractère droit et ses cheveux blonds relevés démontraient tout le sérieux qu'elle abordait lors de son travail. Son instinct lui assurait qu'elle semblait être une personne juste et tout à fait digne de confiance pour ce qu'elle était prête à avouer. Mais après une vision de l'ensemble des soldats derrière celle-ci, qui avaient délaissés brièvement leur boulot pour écouter avec attention ce qui allait être dit, Alice fut très surprise de s'apercevoir de la confiance qui semblait régner dans le groupe ainsi que celle qu'ils lui procuraient. Elle se sentait particulièrement bien ici, et elle ne put effacer ce demi sourire qui s'était installé progressivement sur son visage au fur et à mesure. Elle espérait beaucoup de ce Colonel pour s'être entouré d'autant de personne aux bonnes qualités semblait-il, et aussi dignes de confiance !

Quand son regard revint sur la soldate qui les avait rejoints, Alice fut légèrement déroutée de la voir la fixer silencieusement, comme si à son tour, elle était jaugée.

-« Lieutenant Hawkeye, soldat Reïht ! Je vous amène Alice Mondstein fraîchement sortie de l'hôpital. Elle demandait à voir le colonel Mustang. »

Les yeux bruns de la femme dérivèrent jusqu'à son interlocuteur qui lui offrait son salut militaire. Droite comme un I, elle lui répondit sur un ton formel et respectueux.

-« Je vous remercie soldat Reïht, je vais m'occuper d'elle maintenant. »

Alice fut estomaquée de la rapidité dont témoigna l'homme afin de sortir de la pièce après un autre bref salut militaire. Ainsi, elle se retrouva désormais seule au milieux d'inconnus dont elle ne savait pas le nom, ni les pensées.

Et cela ne lui effleura même pas l'esprit!

La soldate se tourna à nouveau vers elle. Son masque neutre ne quittant toujours pas son visage.

-« Je suis le lieutenant Riza Hawkeye. Avant de vous faire rencontrer le colonel Mustang, pourriez vous m'expliquer en quelques mots ce qui vous amène à vouloir le voir ? »

Alice savait bien que c'était une sorte de formalité, cette femme voulait s'assurer de ce qu'elle aurait put discerner en elle. Ou alors elle voulait simplement s'assurer que la raison, pour laquelle elle venait, n'était pas futile, histoire qu'elle ne dérange pas le Colonel Mustang dans son travail. Ainsi, la jeune fille préféra rester sincère. Elle était fascinée par l'aura de respect et de droiture qui se dégageait de cette soldate.

-« Enchantée de vous rencontrer Lieutenant ! Bien que vous le savez sûrement, je m'appelle Alice Mondstein. Si j'ai demandé à le voir c'est en grande partie parce que j'aimerai expliquer ce qu'il m'est arrivé et on me l'a conseillé. Je vous rassure, ça n'a aucun rapport avec ce qu'il a pu y se passer avec... mon frère... »

Son froncement de sourcils au mot "frère" dut la surprendre un peu, mais même si cela avait été le cas, elle ne laissa rien transparaître. Peut-être que le Lieutenant examinait les paroles que la jeune fille venait de lui donner, puisqu'au bout de quelques secondes où le silence s'était imposé, la soldate eut un léger sourire à son intention.

-« Bien, je vais le prévenir de votre arrivée. »

Tandis qu'Alice se remettait de s'être faite vouvoyer par plus âgée qu'elle, Hawkeye se dirigea vers la porte à l'autre bout de la salle et frappa quelques coups avant de l'entre bailler afin d'avertir son occupant qu'il avait de la visite. Puis elle la referma et rejoignit la jeune fille afin de la prévenir qu'il lui faudrait attendre quelques instants. Celle-ci lui assura que cela ne la dérangeait pas.

Silencieusement, la brune fixait la porte en restant debout, bien que sa plaie la picotait légèrement.

Hawkeye jeta quelques regards en direction de cette étrange demoiselle. Il lui semblait avoir entendu qu'elle était souvent venue demander de l'aide à la milice afin d'avoir quelques renseignements sur les fréquentations de son frère aîné. Tellement, qu'elle lui avait été décrite comme devenant légèrement paranoïaque sur les bords et perdant légèrement la tête. Or, la personne qu'on lui avait dépeinte n'était pas du tout la même que celle qui se trouvait à sa droite. Peut être était-ce son amnésie confirmée qui l'avait changée, mais la jeune fille qui se tenait fièrement devant la porte du bureau de son supérieur, malgré sa blessure, ne ressemblait pas moralement à celle qui s'était faite tirée dessus il y a de cela une bonne semaine. Au lieu de devenir folle, elle semblait particulièrement réfléchie... A la place de demander de l'aide aux militaires, cette fille semblait déterminée à avancer à son rythme et par ses propres moyens. Et le regard examinateur qu'elle avait eut en examinant une à une chacune des personnes présentes dans la pièce, montrait qu'elle n'était pas naïve, et qu'il y avait définitivement quelque chose de très importants qu'elle devait dire au Colonel, préférant d'abord juger son entourage par précaution.

Comment une personne telle qu'elle avait put se faire tirer dessus par son propre frère?

Hawkeye trouvait ça très surprenant et bien que curieuse, la soldate savait bien qu'elle ne pourrait sûrement pas participer à la discussion entre Alice et Mustang. Ainsi, quand la porte devant elles s'ouvrit sur le Colonel, Riza Hawkeye, s'apprêtant retourner s'asseoir à son bureau, fut prise de court lorsque la jeune fille aux cheveux bruns avança d'un pas avant de se retourner vers elle avec un sourire.

-« Lieutenant Hawkeye, j'aimerai que vous soyez présente vous aussi! »

Peut être était-ce parce que le Colonel Mustang abordait son masque qu'il mettait souvent quand une femme se présentait à lui, ce qui avait fait tiquer la soldate puisque la demoiselle n'était âgée que d'une bonne quinzaine d'années, qu'Alice le lui avait proposée. Mais au fond de son regard bleu, Riza Hawkeye put voir nettement une lueur de respect et de confiance qui lui était destinée. Après un regard légèrement confus à son supérieur qui acquiesça silencieusement dans le dos de la demoiselle, la soldate blonde emboîta le pas de la jeune fille et elles rentrèrent toutes les deux dans le bureau du Colonel Roy Mustang sous les regards déconcertés des hommes de la pièce.
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(Quelques instants avant, dans le bureau du Colonel Mustang.)

Roy Mustang, désespéré de voir toujours autant de papiers à remplir entassés sur son bureau, ne put s'empêcher de lâcher un grand soupire, profitant du fait que son lieutenant ne soit pas en cet instant précis dans la pièce. Autrement, il serait fort probable qu'elle lui aurait jeté le regard du siècle en posant simplement sa main sur le revolver qu'elle prenait toujours soin à placer sur sa hanche. Cette image du lieutenant Riza Hawkeye, le forçant à continuer la paperasse le fît une seconde fois soupirer.

Cependant, il se remit rapidement à son devoir, plus à cause des pas qu'il venait d'entendre que cette envie de pouvoir ensuite rentrer chez lui plus tôt. Tandis que son stylo courait sur le papier qui le narguait sur le bois de son bureau, le Colonel entendit clairement la porte de la pièce s'ouvrit. Ainsi, en relevant le regard, il put aisément voir une tête blonde parfaitement reconnaissable entre mille grâce à sa taille plus petite que la moyenne et à son air renfrogné, éternellement suivie de cette géante armure en fer, rentrer dans le bureau. Mustang eut envie de taquiner légèrement l'aîné des Elric qui marchait d'un pas résigné jusqu'aux sofas devant lui, mais en percevant le regard de son Lieutenant de l'autre côté de l'embrasure de la porte, qui semblait lui lancer des éclairs, il s'en abstient.

-« Bien le bonjour Fullmetal, Alphonse. » Se contenta-t-il de dire en essayant de faire abstraction de ces yeux meurtriers qui le fixaient toujours jusqu'à ce qu'Alphonse, le plus jeune des deux frères et pourtant le plus grand avec cette lourde armure, ne referme la porte derrière eux.

-« Bonjour Colonel ! » S'exclama celui-ci, toujours ravi de revoir des têtes connues.

Roy Mustang attendit quelques secondes afin de laisser le temps à ses deux invités de s'assoir sur les canapés avant de demander aux jeunes garçons, en tapotant les feuilles de son dossiers complété sur la table pour ensuite les placer sur la pile de ceux qu'il avait fini de remplir.

-« Alors, comment se passent vos recherches chez Tucker ? »

-« Elles se passent plutôt bien Colonel, bien que nous n'ayons rien trouvé en ce moment. Par contre, sa fille Nina, est juste adorable ! » Répondit encore Alphonse avec enthousiasme.

-« Bien, bien ! »

-« Et vous Colonel, de nouvelles affaires ? » Questionna ensuite le jeune homme.

Le concerné, presque heureux d'avoir un prétexte afin de poser loin de lui ce stupide crayon qui lui avait donné mal à la main à force de le manier en se pressant de remplir ses formulaires, posa ses coudes sur le bois du bureau et son menton sur ses mains. Ses yeux se fixèrent un instant sur Edward qui restait plongé dans ses pensées, les bras croisés et le regard ailleurs, puis revinrent ensuite sur Alphonse.

-« Juste un des nôtres qui a perdu les pédales et tiré sur sa jeune sœur, sinon, rien de bien folichon… »

Un silence s'installa entre eux.

Mustang observait sans retenu le jeune alchimiste blond qui n'avait toujours pas prit la parole. Cela faisait une semaine qu'il ne les avait vu et pour cause, le Colonel avait laissé le temps au jeune homme de faire le tri dans son esprit. L'alchimiste de flamme en était arrivé à la conclusion, quelques jours auparavant, qu'il s'était produit quelque chose mais n'avait pas tenté de le forcer à le lui raconter. Mais maintenant, il supposait que le temps avait fait son affaire et il souhaitait qu'Edward lui en fasse finalement part. C'était d'ailleurs uniquement pour cette raison que les deux garçons se trouvaient ici ce jour là.

-« Je doute que vous nous ayez faits venir uniquement pour converser du beau temps, Mustang ! »

Le ton qu'employa l'aîné des deux frères, se retirant enfin de son mutisme, était emplit d'un sarcasme non dissimulé. Mustang sentait qu'il approchait de son objectif.

-« Bon et bien, je vais aller droit au but... » Avoua-t-il sans quitter un seul instant le jeune homme de son regard sombre. « Que vous est-il arrivé ce jour là ? »

-« Vous en êtes encore à là… » Gronda instinctivement le concerne comme défense.

-« Fullmetal ! » S'emporta le Colonel en plaquant ses mains sur le bois de sa table de travail, mécontent. « J'aimerai tout de même savoir pourquoi vous étiez introuvable pendant une journée entière ! Entendre le boucan que causait un armure de 200 kg courant dans le QG en à intrigué plus d'un, moi le premier. Et je préfère savoir où sont mes subordonnées… »

Raté… Pensa alors Mustang en percevant l'air renfermé qu'abordait désormais le jeune alchimiste sans décroiser ses bras et en lui jetant un regard mauvais. Intérieurement, le supérieur du blond maudissait le caractère tête de mule de celui-ci. Il ne lui restait qu'une seule solution de secours afin de pouvoir une bonne fois pour toute, faire avouer au jeune homme ce qu'il s'était passé. Mais à ce compte là, le Colonel espérait qu'Edward n'ait rien dit à son jeune frère.

En parlant du loup, Alphonse, qui sentait clairement le conflit invisible qui se tramait entre son aîné et leur supérieur, poussé par sa curiosité ainsi que par son inquiétude envers son grand frère qui ne s'était que renforcé à la vue du comportement de celui-ci durant la semaine, ne put s'empêcher de lui dévoiler, en se penchant vers le concerné.

-« Grand-frère, moi aussi j'aimerai connaître le fin mot de l'histoire… Je me suis beaucoup inquiété tu sais ? »

Bingo ! Mustang dut se faire violence pour ne pas laisser un sourire vainqueur naître sur son visage, cela n'aurait fait que reculer un peu plus l'alchimiste dans sa position de refus.

Edward, qui avait délaissé son observation d'une quelconque expression sur le visage de son supérieur, releva le regard sur Alphonse, se plongeant dans une légère réflexion. Depuis qu'il était rentré dans son monde, le jeune homme n'avait cessé de culpabiliser envers le sacrifice d'Alice, son esprit étant sans arrêt hanté par les potentielles issues que subirait la jeune fille si jamais elle devait arriver ici. Il n'avait pas eut le courage d'en parler à son frère, mais maintenant que celui-ci lui faisait comprendre qu'il aimerait avoir aussi quelques réponses, Edward s'était rendu compte à l'instant de toute l'inquiétude qu'Alphonse avait pu nourrir pour lui depuis ce fameux jour. La pointe d'angoisse que le blond avait perçut dans les paroles de son frangin lui rappelait à quel point ils étaient liés tous les deux, ce qui achevait de le sentir coupable et de le faire regretter de ne rien lui avoir dit avant.

-« Raah ! D'accord, je vais vous raconter ! »

Vaincu et décidé à se faire pardonner envers le dernier membre de sa famille encore à ses côtés, le jeune alchimiste prit une grande inspiration en triant ses souvenirs de cet événement, tandis que Mustang et Alphonse restait silencieux.

-« J'étais dans un autre monde… » Lâcha finalement Edward tel une bombe dans une assemblée.

Les réactions qu'il reçut furent légèrement partagées. D'un côté, son petite frère qui restait muet comme une tombe, et de l'autre, son supérieur qui s'étouffait et peinait à reprendre sa respiration. La pensée de le voir peut être aux portes de la mort rien qu'à cause de sa salive était légèrement grisante, mais le jeune homme se reprit rapidement.

-« Qu'est-ce que tu… »

La question du Colonel se mourut avant qu'il n'ait pu la prononcer en entière quand l'aîné des Elric leva une main pour s'interrompre, poursuivant seulement son explication et répondant à celle-ci au passage.

-« Simplement que l'alchimiste que nous poursuivions avait activé un cercle qui m'a précipité dans un autre monde, c'est tout… »

Alphonse murmura ensuite sur un ton légèrement plus sombre.

-« Grand-frère… Cet homme, il était… »

L'aîné acquiesça aux mots de son jeune frère, le visage fermé et une légère grimace sur le coin de sa lèvre.

-« C'est le prix qu'il a dut payer pour m'envoyer là-bas… »

Un long silence suivit cette dernière phrase, et Edward en profita pour demander ce qu'était devenu le hangar abandonné qu'avait exploité l'autre alchimiste pour ses étranges recherches. Quand l'alchimiste des flammes lui répondit, avec un haussement d'épaules, qu'il avait dut expliquer par un accident l'incendie de celui-ci, produit pour la seule raison d'effacer toute découverte, le jeune homme prit un instant pour réfléchir avant de commencer son récit sur son voyage à travers deux dimensions, la sienne et celle d'Alice. Il avoua à quel point ça l'avait inquiété de ne pas retrouver son frère, à quel point il avait agacé de se trouver autre part, ainsi qu'à quel point ça avait été frustrant pour lui d'éviter de mettre le nez dans la bibliothèque de cette demoiselle qui l'avait aidé à repartir en activant le cercle de l'autre côté. Il ne dit finalement pas énormément de choses concernant la vie que menait la jeune fille, sûrement par respect pour elle et passa aussi sous silence sa rencontre avec la Vérité. Surement que le blond en toucherait quelques mots à son jeune frère plus tard… Peut-être…

-« Redit moi ça ?! C'est cette Alice qui t'a renvoyé !? » Éclatait le Colonel en se levant soudainement de sa chaise sous le regard blasé d'Edward qui ne put s'empêcher de piquer légèrement celui-ci.

-« Vous m'écoutez quand je vous parle, Mustang ? »

-« Mais frangin, si l'homme que nous pourchassions avait payé de sa vie ton passage, Alice, qu'a-t-elle payé alors ? » Interrogea Alphonse en voyant par les regards que les deux alchimistes se lançaient, que leur conflit serait susceptible de reprendre de plus belle.

Alors que son frère se trouvait vers lui en ouvrant la bouche afin de lui donner la réponse à sa question, il fut interrompu par la porte du bureau du Colonel qui s'ouvrit sur la tête blonde de Riza Hawkeye qui, après s'être excusée de son interruption, avertit Mustang de l'arrivée de la jeune Mondstein. Après avoir demandé à son Lieutenant de la faire attendre quelques instants, Mustang poussa un petit soupire en voyant le battant se refermer derrière la soldate. Il avait eut peur que celle-ci lui fasse remarquer l'avancement digne d'un escargot de son travail.

Tandis que leur supérieur se massait les tempes, Alphonse, demanda innocemment qui était la demoiselle qui avait demandée à le voir.

-« C'est la jeune sœur de notre ex-soldat Mondstein, elle avait été admise à l'hôpital après qu'il lui ait tirée dessus. J'ai été surprit quand un des nôtres est venu me voir il y a quelques jours de cela pour m'avertir qu'elle souhaitait me rencontrer. Le plus surprenant était qu'il m'avait affirmé qu'Alice Mondstein ne voulait pas du tout me parler de son frère. Soit disant, elle aurait quelque chose d'important à me dire et je m'attends à tout venant d'elle... »

-« Pourquoi dites vous cela, Colonel ? » Demanda Alphonse alors que son grand frère se levait et s'apprêtait à sortir du bureau, guère intéressé par la discussion.

-« Parce qu'elle nous a souvent causés quelques soucis. Elle était un peu folle sur les bords et il est dit que depuis son accident, elle est devenue amnésique… »

Edward s'arrêta net devant la porte du bureau puis se tourna lentement vers l'alchimiste de flamme avec un froncement de sourcils.

-« Vous avez bien dit « Alice », n'est-ce pas ? »

-« Fullmetal, es-tu si petit que mes paroles ne t'atteignent même pas ? » Répondit sarcastiquement son supérieur.

Mais comparé à ses répliques habituelles, Edward surprit Mustang en posant sa main sur son menton avant de déclarer, sur un ton parfaitement sérieux.

-« J'aimerai écouter la discussion afin de m'assurer de quelque chose, Colonel ! »

Les mains de celui-ci se plaquèrent une nouvelle fois sur le bois du bureau alors qu'il s'apprêtait à refuser à ce que l'alchimiste espionne une conversation qui pourrait être importante. Mais en plongeant dans le regard doré du jeune homme, Mustang comprit que ce dont il voulait s'assurer semblait tout aussi important que cette discussion. Finalement, il céda et pointa simplement la porte de la remise sur le mur à gauche de son bureau. Après avoir jeté un regard à son jeune frère, qui paraissait embarrassé de ce qu'il était en train de se passer, les deux garçons se cachèrent dans la petite pièce adjacente alors que Roy se maudissant intérieurement de cette faiblesse.

L'alchimiste de flamme parcourut le chemin entre son fauteuil et la porte de son bureau afin de l'ouvrir sur son Lieutenant, accompagnée d'une jeune fille aux cheveux courts et aux yeux bleus qu'il reconnut presque immédiatement.

Non… Un instant, elle semblait différente…

Au prix des SouvenirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant