Firmament

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(Je vous conseille d'enclencher la musique, pour plus d'immersion !)

***

Aujourd'hui, c'est la nuit des étoiles filantes.

C'est ce qu'avait rappelé la propriétaire des VTT qu'on avait loués cet après-midi.

Hier, Mars était plus visible et brillante que jamais.

C'est ce qu'avait annoncé la journaliste à la télévision.

La semaine dernière, l'éclipse lunaire du siècle.

C'est ce qui se murmurait par-ci ou par-là dans la journée.

Aux alentours de vingt-trois heures, la lune, rousse et peu visible, s'était progressivement cerclée de lumière par la gauche. Une lumière vive, éblouissante. Une lumière qui, lentement, avait gagné la moitié du disque avant de se faire engloutir par une mer infinie de nuages.

Nous avions comme projet d'observer Mars. Cela nous est sorti de la tête. Nous nous en sommes rappelés seulement le lendemain, à notre plus grand désarroi. Cet événement ne se reproduira pas avant plus de deux-cent-cinquante ans. Autant dire une éternité.

Alors ce soir, assise sur le balcon de notre hôtel dans la montagne, je fixe le ciel. Je l'observe. Le dévore du regard.
Je crois que j'ai toujours aimé les étoiles. Cela s'est transformé en passion vers mes douze ans, lorsque j'ai commencé à m'intéresser aux trous noirs.
Véritables mystères.

Ce soir, les ténèbres bleutées de la nuit sont parsemées de mille points lumineux. Certains brillent avec ferveur, d'autres plus timidement. Parfois — souvent —, un avion passe. Sa lumière clignote, avec régularité. On ne le confond pas longtemps avec une étoile.

La nuit, j'ai l'impression de vivre enfermée sous un globe. Un globe que les étoiles épousent gracieusement. C'est dans ces moments-là, lorsque je lève les yeux vers le ciel, que je prends conscience de notre petitesse, de l'immensité de l'Univers.
Plus petits qu'un grain de poussière.
Nous pensons savoir tant de choses, et pourtant il nous reste tant de choses à apprendre.
Je me sens bizarrement émue, tout à coup, à la seule vue de ces étoiles. J'ai comme l'humeur nostalgique. La nostalgie de qui ? de quoi ?

À gauche, un éclat plus brillant, plus gros que les autres. Rougeâtre, aussi. Mars ? C'est bien possible. Certainement.
Je suis du regard le cheminement d'un avion invisible au loin. Seules ses lumières, qui apparaissent brièvement pour les blanches et continuellement pour les rouges, me permettent de le distinguer.

Une étoile. Est-ce vraiment une étoile que je viens d'apercevoir du coin de l'œil ? Une étoile filante ?
Impossible d'en avoir le cœur net : la poussière blanche s'est volatilisée avant même que l'information me parvienne au cerveau.
La prochaine fois, je ne la raterai pas. Voyons, quel vœu pourrais-je faire ?

J'étouffe un bâillement. Il faut s'armer de patience, pour observer les étoiles. Cela tombe bien, j'en ai un stock inépuisable — jusqu'à ce que la fraîcheur nocturne n'ait raison de moi. Je ne me lasse pas d'admirer et de découvrir, encore et toujours.

Le temps passe. Les minutes s'écoulent. Vers la droite, au loin, les phares des voitures créent de furtifs faisceaux lumineux qui s'évanouissent derrière des arbres.

Je ne suis pas fatiguée. Je ne sais même pas l'heure qu'il est. Je veux juste pouvoir admirer plus d'étoiles filantes. Le plus dur, c'est de regarder à l'endroit propice, au moment propice. Tâche ardue. 

Et là.
Elle apparaît.
Une flèche de lumière pure qui tranche les ténèbres nocturnes, laissant dans son sillage une traînée blanche.

Magnifique.

Le piment de la vie (Ah, l'aventure...)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant