Chapitre 4

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Les heures qui suivirent ne se comptèrent plus qu'entre les murs de sa chambre. Ceux qui connaissaient bien la jeune fille jugeaient haut et fort qu'elle était plus que jamais noyée dans ses ouvrages, préparant sans doute une vie de professeur à la capitale suggérée par des souvenirs de projets. Mais la réalité de ce qui les attendait leur montra la faille de leur existence.

Une fois par matin et par après-midi, elle traversait la ville pour se rendre à la rue des embruns où, le dos contre le mur de l'enceinte de Balfonheim, elle regardait passer les marchands et les voyageurs. Elle portait sa nouvelle robe à chacune de ces sorties. Quelques mogs[10] de sa connaissance s'arrêtaient en la voyant immobile, privée de son dynamisme habituel, et la questionnaient. La jeune fille ne répondait que par son large sourire, et regrettait de ne pouvoir les accompagner dans leur étude du fonctionnement des moulins des plateaux de Cérobi[11] à dos de chocobo[12]. Ils songèrent alors à une affaire urgente qui la retenait, mais lorsqu'ils virent que cette urgence durait plusieurs jours ils convinrent qu'elle avait simplement modifié ses habitudes. Très vite, elle avait cherché et questionné le recruteur qui connaissait le professeur Denkel, et obtenu de lui, non sans apparente dissimulation, qu'on avait vu le marchand d'Archadès aller et venir du côté de Cérobi. Alors elle restait, seule dans un coin de la rue d'où l'on apercevait les plateaux, de plus en plus longtemps, et guettait l'introuvable avec la ténacité du désespoir. Lorsqu'enfin, au crépuscule d'une journée démunie, elle vit revenir la silhouette abattue de Vayne, elle sauta de ravissement et courut vers lui. L'homme leva sa tête, qui fut alors assez dégagée pour qu'on y perçût une pincée d'étonnement, et déposa son grand sac. Lorsqu'elle arriva devant lui, il salua poliment et attendit patiemment qu'elle parlât. Mais l'enthousiasme de la jeune fille l'emportait déjà, et elle s'exclama aussitôt en remarquant le sac à nouveau plein :

— La quête a-t-elle été fructueuse ?

En entendant ces mots, Vayne lâcha le soupir qu'il retenait et répondit :

— Des munitions, deux potions et quelques centaines de gils[13].

— Voilà qui devrait vous aider !

Mais Vayne secoua la tête avec lassitude et demanda à son tour :

— Denkel veut autre chose ?

— Oh, non, répondit-elle rapidement, il... il n'en a plus besoin, et puis il sort trop souvent, ces temps-ci, pour que je puisse savoir ce qu'il veut.

Il leva un sourcil mais la jeune fille serra les poings et ne détourna point son regard.

— Je voulais simplement... vérifier si vous aviez vendu tout ce que vous vouliez en cette ville, ajouta-t-elle en souriant.

Vayne resta un instant silencieux puis dit doucement :

— Je le crains.

Elle afficha tout d'abord un visage satisfait, puis son sourire s'effaça momentanément lorsqu'elle réalisa le sens de ces paroles. Pendant qu'elle réfléchissait, Vayne s'était avancé vers l'intérieur de la ville et lui disait :

— Je dois aller payer un aubergiste. Venez avec moi si vous avez quelque chose à me dire.

Dès qu'il finit sa phrase, elle retrouva son sourire et le suivit dans le marché de Galarina[14]. Elle le vit s'arrêter derrière un homme qui achetait des gambits[15], chercher dans son sac et en sortir quelque chose que l'autre glissa dans sa poche avec agacement.

— Il ne doit plus vous rester grand-chose, supposa la jeune fille une fois qu'elle l'eut rejoint.

— Plus grand-chose, non, confirma Vayne avec un nouveau soupir en poursuivant sa marche.

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