Le fantôme d'Halloween

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     Après Halloween, la Toussaint. Le jour des Morts. Tout le monde se rend sur les tombes de leur famille, de leur ami ou de simples connaissances. De nouvelles fleurs ornaient les tombes à nouveau, à chaque premier novembre. Les personnes vivaient la Toussaient, chacun à sa façon. A travers les rangés de pierres tombales, une famille qui vivait la première Toussaint sans leur fils, perdu il y avait encore quelque mois dans un malencontreux accident de voiture, une veuve qui saluait la tombe de son mari parti par un cancer, des amis qui passaient dire bonjour à l'un de leur et remettant leur vie en question devant la tombé de celui qui n'avait pas choisi d'être fusillé par ce spectacle. Au fond de ce cimetière, une stèle en hommage aux disparus des guerres, aux disparus pendant les attentats. Tous les gens étaient regroupés par célébrer les morts.
     A ce moment, Aliaksandra s'en voulait de pénétrer dans le cimetière. La même rengaine chaque année. Avec un seau, des produits de nettoyages et des éponges, elle devait traverser le cimetière sous les yeux des familles. Ecouteurs aux oreilles pour ne plus entendre les grossièretés des familles. Chaque année, le même règne. Chaque année, passer l'éponge sur la tombe de la Sorcière. Maudissant son maigre revenu d'hier, elle se dirigea vers la tombe de sa grand-mère, en priant le bon dieu de ne pas avoir trop de dégât.
     La tombe de sa grand-mère se situait à la dernière rangée de cimetière. Aliaksandra garda la tête haute et évita tout contact avec les personnes présentes. « Si seulement j'avais le pouvoir de tous les faire taire ! Je me ferais un plaisir de faire fermer leurs orifices, tous ! », pensa Aliaksandra en souriant. Mais vite, la réalité revenait au galop et elle finit par faire évanouir son sourire. Dans cette ville où chacun de ses pas était presque photographié, chacun de ses mouvements provoquait une vague d'horreur et sourire dans un cimetière n'aiderait pas à sa réputation. Sûre d'offrir un visage fermé de toute émotion, elle accéléra le pas pour rejoindre la tombe de sa grand-mère.
     A peine arrivée, le premier réflexe d'Aliaksandra était de photographier la tombe. Chaque premier novembre, elle photographiait l'état de la tombe et l'envoya à Evan. Chaque année, Evan voulait l'accompagner mais sa mère refusait. Aliaksandra dans un cimetière était pour elle un synonyme de Satan. Bien que la tombe était couverte de tag et de peinture, d'insultes, Aliaksandra n'était pas différente des autres. Se posant au sol, le seau rempli de matériel à ses côtés, elle toucha la prière tombale et sourit. Elle imaginait toucher le visage de sa tendre grand-mère. Comme à chaque fois, quelques larmes ruisselaient sur le visage de la jeune femme. Sa grand-mère lui manquait et ce jour lui rappelait à quel point sa grand-mère était le centre de sa vie. Bien décidé à se remettre sur pied, Aliaksandra vida le seau et se dirigea vers sa droite pour le remplir d'eau. Se relevant sans trop de peine, elle faisait attention à chacun de ses pas. La boue était glissante à cause d'averse durant la nuit. Ayant des difficultés à ouvrir le robinet, elle ne voulait pas demander d'aide bien décidé d'éviter les contacts avec les habitants. Malgré toutes les forces qu'elle avait, rien ne coula du robinet. Le sort semblait s'acharner sur la jeune femme. Aliaksandra complètement désespérée, se retourna et décida de rejoindre la tombe quand une femme de son quartier s'approcha et ouvrit le robinet pour elle. Avec un sourire rempli de chaleur, la jeune femme se remercia.
     -Merci beaucoup, madame Parker. Je n'y arrivais pas, dit la jeune femme.
     -De rien, Aliaksandra, répondit la voisine avant de jeter un coup d'œil à la tombe. Tu as besoin d'aide pour le nettoyage ?
     -Non, merci beaucoup. Ça ira, je suis habituée, ajouta la Russe avant de retourner à la tombe.
     Sentant l'orage arrivé, les personnes quittaient peu à peu le cimetière mais pour Aliaksandra, orage ou pas, la tombe devait être propre. Se mettant à genoux devant la tombe, elle posa le seau devant elle et appuya deux fois sur le produit pour le sol, afin de libérer du produit et de le diluer dans l'eau. Mélangeant doucement, la mousse apparut et Aliaksandra y plongea une éponge malgré l'eau froide, voire même glacée. Sa main étant en contact avec l'eau, elle se mit à grimacer. « Un mal pour un bien », disait-elle. Posant l'éponge sur la pierre tombale, Aliaksandra commença à frotter, un peu puis plus fort. Au fond d'elle, elle se disait qu'en frottant, elle ferait disparaitre tous les personnes qui avait insultés sa grand-mère, sa famille ou même, elle-même. Plus elle frottait, plus les traces disparaissait et plus elle était heureuse. Malgré tout, des larmes reparaissaient, de joie mais de tristesse à la fois. Finalement, elle se mit à hurler pour libérer tout ce qu'elle avait gardé. Comme les choses n'arrivent jamais seule, la pluie redoubla de force. Sous la pluie, agenouillant dans la boue, Aliaksandra sourit en imaginant un monde sans les insultes des gens, un monde où sa grand-mère serait une seule grand-mère. Profitant de cette pause de l'arrêt de temps, elle regarda la tombe avant d'imaginer un monde où sa mère serait encore là, un monde où sa grand-mère ne serait pas morte, un monde où le travail du soir n'existerait pas. Cette pause, elle le savait était temporaire mais beaucoup trop agréable pour l'ignorer.
     Maintenant que la tombe ne comporte plus qu'aucune trace de peinture, Aliaksandra se releva de la boue qui s'était formée, reprit le seau vide et y posa le produit et l'éponge ruinée. Bien d'accord à arrêter d'être la victime de la ville, Aliaksandra était prête à se rebeller et à montrer qui elle était vraiment. Quittant le cimetière avec la force et le courage, la jeune femme était sûre d'elle et toute la ville allait le sentir.

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