II

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Le réveil fut difficile pour Antonin. Il était tôt, et, comme tous les matins, l'étudiant n'avait pas envie de sortir de son lit. Pourtant, aujourd'hui était la plus longue journée de sa semaine. D'un pas nonchalant, les yeux gonflés et à moitié fermés, les bras ballants et le dos courbé, il s'avança aveuglément vers sa cuisine et se planta devant le frigo. Il se gratta inconsciemment la nuque, puis se décida à se verser une tasse de lait. Le café, il trouvait ça trop amer. Sur sa chaise dure comme du béton, il fit défiler l'actualité sur son petit écran tactile. Rien de bien nouveau... Toujours la même rengaine. Trump par-ci, Brexit par-là, inflation et Bitcoin à gogo. C'était barbant. Antonin ouvrit ensuite sa boîte mail, tout en avalant une gorgée du lait glacé, et, malgré toutes ses prières et espoirs bien placés, aucun cours n'avait été annulé en dernière minute. Lorsqu'il eut terminé sa tasse, il se releva, arborant toujours un air absent et fantomatique, puis il se dirigea vers sa commode et en ouvrit deux tiroirs. Bon, le moment fatidique. Quelle tenue allait-il mettre ? Il sortit un t-shirt rose pâle, ainsi qu'un pantalon noir troué, mais il se ravisa. Non, il fallait quelque chose de plus joyeux. Il fouilla quelques instants, et s'arrêta sur un pull vert en coton. Il attrapa ensuite un jeans moulant, et se changea illico presto. En tout cas, il s'y sentait bien, dans ces vêtements. Antonin se retourna vers son miroir, et admira son chef-d'œuvre.

La mode, il aimait ça, et pas qu'un peu. Il trouvait que c'était un bon moyen de s'exprimer, de montrer qui il était, et d'affirmer ses goûts. Le pull, trop large pour lui, n'épousait pas sa silhouette et renforçait son image de garçon innocent. En contraste, le jeans qui serrait autour de ses cuisses mettait en valeur ses jambes fines et bien dessinées. Il ne faisait pas de sport, pourtant son corps était bien proportionné et il était dans la norme. Satisfait de ce qu'il portait, il alla d'un pas plus assuré vers sa collection interminable de bonnet, et en choisit un en laine de couleur brune. Fin prêt, il rassembla ses cours qu'il fourra dans son sac à dos, noua les lacets de ses baskets, et marcha vers son campus, non loin de là.

-Excuse-moi, t'as fait tomber ton stylo.

Le type qui avait trébuché la veille marchait rapidement devant Antonin. Lorsqu'il entendit le blond l'interpeller, il se retourna et prit un air surpris.

-Merci, répondit-il.

-C'est bizarre, j'ai l'impression qu'on n'arrête pas de se croiser ces temps-ci, dit Antonin en tentant de marcher aux côtés de l'inconnu. Tâche délicate, puisque celui-ci avait de bien plus longues jambes que lui.

-Ah bon ?

-Toi aussi tu vas au Campus 3 ? Moi aussi, ça tombe bien. Je t'accompagne ?

Le mystérieux étudiant baissa la tête, sourit, et se gratta fébrilement le poignet. Antonin, qui n'avait pas l'habitude de marcher aussi vite, était déjà essoufflé, mais il continua tout de même la discussion.

-Tu t'appelles comment ?

-Elliott. Et toi ?

-Antonin. T'étudies quoi ?

-Je suis en quatrième année de littérature. Et toi ?

-Troisième en traduction.

Il y eut un silence gênant. Elliott semblait être timide, ce qui étonna Antonin. En effet, avec ses airs de type bagarreur, il avait l'air de tout sauf d'un garçon renfermé et discret. Ah, la diversité ! se dit-il. Lorsqu'ils furent arrivés au niveau de l'entrée du campus, ils se séparèrent sans dire un mot, et rejoignirent leurs amis respectifs.

-Tu payes rien pour attendre, lança Ismaël avec un sourire mesquin.

-De quoi tu parles ?

-Bah, c'est pas le mec que tu matait hier ? Et t'es déjà à l'attaque, tigresse !

Count me in!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant