XXII

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L'été touchait à sa fin, la rentrée arrivait à grands pas. Certaines familles revenaient de vacances, on pouvait les voir dans les rues, le coffre de la voiture ouvert à son maximum tandis qu'ils déchargeaient les grosses valises étiquetées et les sacs de randonnée pleins à craquer. Ils étaient bronzés, tous transpirants, et maudissaient la reprise du boulot. La majorité des étudiants avaient passé leurs vacances chez leurs parents, heureux de les retrouver après une année scolaire bien remplie. Ce n'était pas le cas d'Antonin.

Accoudé à la fenêtre, il regardait les passants. Seuls lui et quelques autres adolescents – ou plutôt, jeunes adultes ? – n 'avaient pas quitté le bâtiment estudiantin et il pouvait les entendre déambuler dans les couloirs. Il faillit envoyer un message à Ismaël, mais il se retint. A quoi bon le déranger alors qu'il renouait avec sa propre famille ? Il fit alors défiler sa liste de contacts. Clément était en vacances. Loïc travaillait. Clara et Lou-Ann faisaient du shopping. Elliott ? Hors de question. Il ne pouvait pas le joindre. Depuis quelques temps, il ne recevait plus de messages de son ex. Pourquoi ? La question restait sans réponse. Certes, cela lui avait fait un peu mal quand, un matin, il avait trouvé sa boîte de réception entièrement vide. Mais bon, il le méritait, pas vrai ? Du moins, c'était ce qu'il s'était convaincu. Antonin fit glisser son doigt vers le haut et se mordit la lèvre. Un peu trop fort.

Nouveau message à : Maman

« Bonjour. On peut se voir ? »

Il n'osa pas attendre la réponse. Alors il se leva, tourna dans sa chambre, fit semblant de ranger quelques affaires, puis alla manger dans la cuisine commune. Au bout d'une heure et-demie, il se décida enfin à regarder son écran.

Message reçu de : Maman

« Je dois y réfléchir. »

Il s'en était douté. Pourquoi sa mère accepterait-elle de le revoir après presque cinq ans ? C'était stupide de sa part de penser qu'il avait encore une chance de revenir à la maison. Antonin bâilla et se laissa retomber dans son lit défait. Jamais il n'avait pensé qu'un jour il se sentirait aussi seul.

Elliott, à bout de forces, s'affala aux côtés d'Ismaël. Leurs respirations étaient saccadées, leurs fronts pleins de transpiration et leurs corps collaient aux draps.

-On n'aurait pas dû faire ça, murmura Elliott.

-C'est mal, très mal. J'ai les voix d'Antonin et de Joshua qui me répètent que je suis un enculé.

Ismaël se gifla.

-Je vais l'appeler, ajouta-t-il. Je suis pas un menteur, autant lui dire tout de suite.

Elliott se redressa, apeuré.

-Il va me haïr. T'es sûr de ce que tu fais ? On ne devrait pas réfléchir un peu plus ?

Ismaël pensa de toutes ses forces. Il sentait les rouages de son cerveau s'activer, même s'ils étaient rouillés.

-On n'a qu'à se voir tous les trois, expliqua-t-il. On avoue, et on trouve une solution ensemble. J'ai ma petite idée.

L'aîné lui fit confiance et le rendez-vous fut rapidement fixé. Le soir-même, ils se retrouvèrent au fast-food dans lequel Lise travaillait (Elliott avait pu vaincre ses mauvais souvenirs) et commandèrent à manger.

-Toujours cette bonne vieille table, dit Joshua en riant.

Ismaël et Elliott se regardèrent, visiblement gênés. Aucun d'eux n'osait faire le premier pas.

-Josh, finit par prononcer Ismaël, on doit te dire quelque chose.

-Oh, je l'avais deviné, ne gaspillez pas votre salive. Tu m'as trompé avec Elliott.

Count me in!Où les histoires vivent. Découvrez maintenant