IX

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Elliott la toisa quelques instants. La jeune fille était assez petite, et ses cheveux étaient ramenés en une queue de cheval. Son visage, bien dégagé, arborait une expression intrigante.

-Je suis une amie d'Antonin, s'expliqua-t-elle quand elle remarqua l'incompréhension du garçon.

-Je peux t'aider ? Tu veux que je te raccompagne ?

-Oui, aussi. Mais je voulais te parler de lui.

Elle avança et Elliott la suivit. Il aurait pu refuser sa demande et la laisser partir seule, mais sa bonté le poussait à agir en gentleman. Il ne voulait pas laisser une fille vagabonder dans les rues sombres.

-Qu'est-ce que tu veux savoir ?

Elle posa un doigt sur son menton et leva les yeux au ciel, signe de grande réflexion.

-En fait, je voulais savoir où en était votre relation.

Il se braqua et bégaya.

-T'inquiètes, ajouta-t-elle, il m'a souvent parlé de toi, je sais tout de vous.

-Si tu sais déjà tout, je n'ai rien à te dire.

Elle fit mine de ne pas l'avoir entendu et dit :

-Tu prends ça au sérieux, toi ? Tu vois ton avenir avec lui ?

-Ecoute, ça ne fait que deux semaines qu'on est ensemble. Je ne peux pas te confirmer que je ferai ma vie avec lui, mais je prends notre relation très au sérieux. C'est tout ?

-Tu vois, c'est ça, qui m'embête.

-De quoi ?

-J'aurais voulu que tout ça ne soit pas sérieux. Qu'il se soit planté, et qu'il revienne sur son choix. J'aurais voulu qu'il reste le type innocent et renfermé.

-Pourquoi ? Si tu es son amie, tu devrais être heureuse pour lui. J'ai du mal à te suivre.

Elle rit de façon moqueuse.

-Pas très perspicace, Elliott.

Il arrêta de marcher. Il ne voulait plus parler, car la discussion prenait un tournant qu'il n'appréciait guère. Tout ce qu'il désirait c'était rentrer chez lui et oublier cette soirée étrange.

-Qu'est-ce que tu me veux ? finit-il par demander.

-J'aime Antonin. Depuis qu'on est en primaire. Et, vois-tu, il y a deux semaines, je m'étais préparée à le lui avouer. Mais t'es arrivé, et t'as tout fait foiré.

Elle se planta face à lui et cala son regard téméraire dans le sien. Elle n'avait pas peur de la différence de gabarit, ni des deux têtes qui les séparaient.

-Alors, poursuivit-elle, je voudrais que tu prennes tes distances avec lui. Je le connais depuis bien plus longtemps, et j'en ai marre d'attendre.

-Tu as bu, constata-t-il.

-On s'en fout. Fais ça pour moi. Je te présenterai à une de mes amies si tu veux.

-Je suis gay. Rentre chez toi, et fais attention sur le chemin. Et, soit dit en passant, je refuse de m'éloigner de lui. Bonne soirée.

Il ne l'écouta pas l'insulter et s'en alla. Sur le chemin du retour, il repensa à la fille et il se mit à ronger ses ongles nerveusement. Il avait peur des représailles. Il savait que les problèmes de cœur pouvaient aller loin. Il pensa aussi à Antonin. Devait-il lui dire qu'il avait croisé une de ses amies ? Il ne connaissait même pas son prénom, cela en valait-il la peine ? Ou devait-il mener sa propre enquête ? Il regarda l'heure : une heure et demie.

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