oser avant de mourir pt.1

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Tous les matins, elle partait travailler.
Presque la trentaine, bosseuse et célibataire.
Son travail, elle s'y rendait à pied, pour elle, c'était toujours un plaisir de pouvoir se dégourdir les pieds avant et après avoir passé une journée entière assise en face d'un ordinateur.

Tous les matins, il allait sur son balcon pour prendre son café, il n'était pas pressé, c'était pas comme si il travaillait. Tous les matins, il voyait cette jeune femme passer, elle était belle et marchait d'un pas assuré; ça faisait des mois qu'il souhaitait lui parler mais malheureusement, il était persuadé qu'une femme comme elle, ne pourrait jamais l'apprécier.
Lui qui avait la trentaine, était chômeur et paresseux,
que restait-il à faire dans ces cas là, pour être heureux?

Tous les soirs, elle rentrait chez elle après une longue journée de travail. Elle passait devant chez lui, d'un pas moins rapide qu'à l'aller.
Il admirait ses cheveux à peine décoiffés, ses yeux brillants, sa cravate desserrées et son manteau au bras,

Tous les soirs, elle se sentait fatiguée, et pressée de rentrer.
Elle traversait ces quartiers depuis trois ans maintenant, on y trouvait de charmants immeubles, des résidences principalement, qui était construits autour d'un parc public assez grand.
Lui avait emménagé il y a quelques semaines, et dès la première semaine, il avait remarqué cette femme.

Un matin où elle ne travaillait pas, elle décida de se promener en ville; elle comptait aussi aller au petit parc près de chez lui.
Elle avait détaché ses cheveux bouclés et maquillé ses yeux.
Elle portait une tenue des plus basiques, bien plus confortable que sa tenue de travail, se disait-elle.

Elle n'était pas passée à sept heures comme tous les matins, pourtant nous étions jeudi.
Il semblait impassible mais il ne faisait que cacher son immense déception, la voir le matin était véritablement son rayon de soleil de la journée.
Il avait bu son café et avait essayé de faire quelque chose de ses cheveux qu'il laissait finalement retomber sur son front, comme chaque matin.
Puis il retourna s'accouder au balcon, le regard vague.

Au même moment, la jeune femme passait, et regardait autour d'elle comme pour la première fois, redécouvrant les gamins des immeubles qui s'étaient retrouvés poir un match de foot, leurs mères revenant de courses en discutant gaiement, les arbres qui faisaient de l'ombre sur la belle pelouse verte du parc.

Il la voyait soudain passer, elle était si belle, n'avait ni chignon, ni cravate, ni sac, il supposait qu'elle ne travaillait pas.
Elle semblait émerveillée devant chaque chose de la vie, il rigolait doucement en la regardant.

Jamais, jamais il n'aurait imaginé que leurs regards se croiseraient.

Elle relevait la tête et apercevait un jeune homme, et Dieu, qu'elle le trouvait beau, elle pouvait jurer qu'il la regardait, et un sourire s'étirait soudain sur ses lèvres.
Elle lui souriait, il en était certain. Elle levait même la main pour le saluer, lui agitait la main, bouche bée. Et son teint vira au rouge écarlate.
Il paraissait assez timide, elle trouvait ça mignon.

C'est quelques jours plus tard qu'elle se surprit à regarder le balcon où elle avait aperçu ce magnifique garçon.

Elle le cherchait, il en était plus que ravi, lui qui avait fait ça des mois durant, il se sentait moins seul.
Leurs regards une fois de plus croisés, c'est lui qui la saluait en premier, et malgré le fait qu'elle était pressée, elle le saluait en retour.

Tous les matins, elle partait travailler, et tous les matins, elle tournait la tête pour l'apercevoir, elle lui souriait chaque fois, et tous les matins, il répondait timidement à ses sourires.
Il avait tellement peur, peur que ça ne soit qu'un mirage, que sa présence ne soit qu'une illusion. Il aurait pu mourir pour ses yeux là.

Un soir, il reçut un coup de fil de son ami, Guillaume.
-Eh Orel, ça va?
-Ouais ouais, et toi?
-Carrément, dis moi...toujours célibataire?
- Bah oui, sinon je t'l'aurais dit, pourquoi?
-Viens à la fête de Simon, j'ai une meuf à te présenter.
-Mec, j'ai plus vingt ans, c'est fini les teufs.
-C'est pas une teuf, c'est une crémaillère, c'est juste que ce mot me rappelle que tu joues les darons et que moi j'ai deux ans de plus que toi et je veux revenir à mes vingt ans même si je kiffe ma femme mais c'est juste que tu vois...
-C'est bon, l'avait-il coupé, je viens! T'es content?
-Un peu que j'suis content mon pote, tu verras c'est une amie à Maura que je connais depuis peu, tu vas l'a-do-ré.
-Oui alors les potes à ta meuf sont toutes tarées, permets moi de m'inquiéter!
-Permission refusée. Bref, bouge ton cul, on vient te chercher dans vingt minutes.
-Quoi? Mais c'est ce soir?
-Habille toi cool mon pote, à tout de suite.
- Mais, Guillaume, attends, je...

Il avait raccroché, et il savait que quand son ami avait quelque chose en tête, ça finissait toujours plus ou moins mal pour lui, alors que Guillaume en riait toujours.
Mais ça ne faisait de mal à personne de sortir pour voir un peu de monde.
Et si il pouvait la voir?

À suivre.

OS [orelsan]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant