J'ai pris une décision

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Allongée sur mon lit, je réfléchis. Je me demande encore une fois comment de banals gens peuvent être aussi cruels, nous sommes créé pareillement. Je sais que je me répète mais tout cela est incompréhensible, je croyais que j'arrivais à passer outre, mais je me trompais, je suis faible. C'est ce qu'ils voulaient après tout, que je disparaisse. Je suis lâche, ils vont s'en prendre à quelqu'un d'autre, cette personne souffrira, se posera beaucoup de questions mais ne comprendra pas. Il faut bien trouver une nouvelle tête pour encaisser tous les coups, cette fois, ça ne sera pas la mienne.

Plusieurs fois depuis notre altercation, elle a essayé d'ouvrir la porte en secouant brutalement la poignée et en me hurlant de la lui déverrouiller, n'avais-je pas encore eu mon quotas? Bien entendu, je ne répondais pas ce qui la mettait hors d'elle encore plus que la minute précédente. Elle lâcha l'affaire au bout de quelques heures et moi j'étais toujours là, allongée les bras le long du corps, la tête prête à exploser, les yeux gonflés et l'esprit en conflit avec le monde. Je voulais m'en aller, je voulais m'endormir, m'évader dans ma clairière, mon refuge. Chacun a sa technique pour s'endormir, j'ai tout essayer, rien ne semblait marcher. J'ai fais de longues respirations, j'ai écrit mes pensées parasites dans un cahier, cela m'a pris beaucoup de temps, j'ai lu, j'ai tenté la technique 4-7-8 qui n'a eu absolument aucun effet sur moi puis finalement, j'ai commencé à compter les taches foncée sur mon plafond en bois. Le soleil s'était maintenant abaissé depuis de nombreuses heures, moi j'attendais que le sommeil frappe à ma porte. Ce n'est qu'après la quatre-millième tache brunâtre que mes paupières se sont abaissées et que mon subconscient a pu commencer à vagabonder là où bon lui semble.

Comme à son habitude, l'homme voilé entre, monte et se dirige vers ma porte. La clé tourne puis tombe sur le sol en une résonance acerbe. La poignée s'abaisse et il entre, fait quelques pas puis se baisse afin de ramper sous mon armoire pour se rapprocher de moi. Je ne peux plus attendre, je me lève brusquement, frappe l'inconnu en pleine tempe afin de le déstabiliser, me jette à plat ventre sur le sol pour me glisser de l'autre côté de la pièce et sors de cette chambre dans laquelle je n'ai passé que trop de temps. Je dévale les escaliers et débuche de cette affreuse maison sans prendre le soins d'enfiler des chaussures. Je tourne vivement la tête et vois qu'il me suit à la trace. << C'est la dernière fois que tu me vois! >> Je redouble de vitesse et m'élance dans le quartier, dans le champ puis pénètre par la lisière dans la sombre forêt. Je suis plus habile et parviens à éviter les ronces. Comme  à chaque fois, l'inconnu s'efface du monde, me laissant seule, moi et ma détermination. J'atteins ma clairière et me pose comme à mon habitude sur la mousse au pied du fabuleux arbre pour admirer les étoiles. De la-haut, on domine le monde. Est-ce vraiment une bonne chose de voir tout ce qui s'y passe? Remarque, on n'est pas obligé de regarder... Je me redresse et commence à escalader l'arbre.

J'ai pris une décision. J'ai pris une décision. J'ai pris une décision.

Une fois arrivée à-pic de la falaise, je saute de ma branche pour atterrir à pieds-joints au bord de l'étang. De là, je me tourne vers le vide et admire le monde de haut. 

J'ai pris ma décision. J'ai pris ma décision. J'ai pris ma décision.

Je regarde l'horizon, pas le vide, à quoi bon regarder en-bas? 

J'ai pris ma décision, c'est la bonne.

J'essaye d'imaginer ma vie autrement.

Quand j'arrive au bahut, les regards tous plus admiratifs les uns que les autres dérobent mon attention, un simple regard vers eux et les voilà ravis. je vois des filles mortes de jalousie, leurs regards sont pleins de haine mêlés à de l'adoration, pourtant je ne fais que marcher. Certains me lancent des regards putrides, d'autres des coups-d'œil convoiteux. Le soir en rentrant dans mon parfait petit foyer, ma belle, grande et victorieuse famille m'acclame de sa tendresse et de son amour mais je n'en ai pas la nécessité, ce que les autres me donne me suffit amplement. Chaque soir, j'arrive et salue nonchalamment mon entourage, j'ai des choses plus urgentes à régler. Je dois décider à quelle soirée moi et mes faire-valoir allons aller le lendemain, je dois trouver une tenue qui me mette en valeur, je dois définir quel rouge à lèvre exhiber sur ma bouche, à présent, ce sont mes seuls problèmes. J'ai tout. Une sublime mère pour m'aimer, un père influent qui veille à ce que je sois heureuse, un charmant frère qui me protège et tous les autres pour me montrer que je suis belle, pour me soutenir, pour m'obéir, pour que je me sente supérieure sans le moindre effort. le lendemain, rebelote. Tout est si simple dès que l'on est chanceux.

C'est une belle vie, mais ce n'est malheureusement pas la mienne.

C'est la seule solution.

Je regarde les étoiles, elles sont si brillantes, je veux les rejoindre pour que les gens m'admirent.

La nuit est si belle, le monde est paisible. 

Tout est trop compliqué.

C'est évident.

Je lève le menton, tends les bras comme pour m'envoler. Je sens l'air tiède de l'été se faufiler entre mes cheveux, c'est si agréable.

Erwan je t'aime, j'espère que tu comprendras ma décision.

Je regarde au loin.

Je saute.


Rêve lucideOù les histoires vivent. Découvrez maintenant